Intervention de Jacqueline Fraysse

Séance en hémicycle du 30 novembre 2015 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacqueline Fraysse :

En limitant à ce point les moyens pour les établissements de santé, vous savez que vous affaiblissez d’abord les hôpitaux publics, les seuls à être accessibles à tous.

En exigeant 10 milliards d’économie sur la santé en trois ans, dont 3,4 milliards en 2016, nous savons que l’on ne pourra pas développer grandement la prévention, affronter les problématiques nouvelles liées à l’environnement, au développement des maladies chroniques, au vieillissement de la population, ni répondre aux attentes des personnes handicapées.

Nous ne pensons pas que de telles mesures permettent de surmonter les difficultés actuelles, que ce soit dans le domaine de la santé, dans le domaine social ou sur le plan économique.

Les chiffres catastrophiques du chômage pour le mois d’octobre, hélas, viennent d’ailleurs encore le confirmer : 42 000 personnes supplémentaires inscrites en catégorie A le mois dernier, ce qui porte le nombre total de personnes sans emploi à plus de 3,8 millions.

Ces recettes éculées, qui n’ont jamais montré leur efficacité, s’inscrivent au contraire dans une spirale de régression qui accentue les inégalités. Et force est de constater, mes chers collègues, que la multiplication des dispositifs palliatifs mis en place pour atténuer les effets négatifs de ces choix politiques sur l’accès aux soins aboutissent finalement à une segmentation des droits et à de nouvelles inégalités. C’est le cas avec les assurances complémentaires, devenues incontournables pour pouvoir se soigner correctement, mais que de nombreuses personnes – et elles sont de plus en plus nombreuses – ne peuvent pas s’offrir.

Non, ce n’est pas ainsi que vous redresserez, que nous redresserons, les comptes sociaux et la situation du pays. Notre Sécurité sociale ne souffre pas d’un excès de dépenses, mais d’un manque de financement à la hauteur de ses besoins. Ces dernières décennies, la Sécurité sociale a dû prendre en charge les nouveaux maux résultant de l’ultralibéralisation de notre économie : maladies professionnelles causées par la pénibilité, départ anticipé des seniors, pathologies liées au chômage et à l’environnement. Et, alors qu’on lui en demandait toujours plus, dans le même temps, ses sources de recettes se sont appauvries, en raison principalement de la récession économique liée à la crise de 2008, qui a coûté une quarantaine de milliards d’euros.

C’est pourquoi, face à ce constat, il demeure incompréhensible pour les députés de mon groupe que vous refusiez, ne serait-ce que d’étudier les propositions que nous formulons, avec d’autres, pour trouver de nouvelles sources de financement de la protection sociale. Car, contrairement au discours ambiant, l’argent existe bel et bien dans notre société pour financer une protection sociale de haut niveau, prenant à bras-le-corps les défis d’aujourd’hui. Mais cela exige d’avoir le courage d’affronter les forces conservatrices qui défendent les moyens colossaux dont disposent quelques privilégiés, au détriment de l’écrasante majorité de tous les autres.

De toute évidence, ce n’est pas la voie courageuse qu’a choisie le Gouvernement. Croyez que nous le regrettons, car nous en avions l’espoir, comme nombre de nos concitoyens, quand ils ont choisi François Hollande pour chef de l’État. Pour notre part, nous n’avons pas modifié notre cap : nous refusons aujourd’hui les orientations et les choix que nous avons dénoncés en leur temps, et souvent avec vous, face à la droite quand elle dirigeait le pays. C’est pourquoi nous voterons contre ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

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