Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après l’adoption d’une motion tendant à opposer la question préalable au Sénat, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2016 est de nouveau examiné aujourd’hui par notre assemblée. La rédaction qui nous est soumise est donc celle que nous avions adoptée en nouvelle lecture, et mon analyse reste bien sûr la même : entre efforts budgétaires et avancées sociales, ce texte est équilibré.
Le déficit de la Sécurité sociale, qui s’élevait à 17 milliards d’euros en 2012, est ainsi ramené à moins de 10 milliards pour 2016. Pour la première fois depuis 2004, la branche vieillesse du régime général reviendra à l’excédent en 2016. Je l’ai déjà dit la semaine dernière dans cet hémicycle, mais il me semble important de le souligner.
Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale traduit en partie des dispositions prévues par le pacte de responsabilité, et sur ces points, notre groupe demeure partagé.
La baisse de 1,8 point des cotisations sociales s’appliquera aux salaires jusqu’à 3,5 fois le niveau du SMIC à compter du 1er avril 2016. Cette mesure vise à soutenir des emplois français qui aujourd’hui sont fragilisés par l’attractivité de certains pays voisins. Les secteurs de la recherche et développement par exemple, sources d’investissement incontestables, sont notamment concernés par cette disposition qui favorisera leur maintien sur nos territoires. Cette mesure me semble donc aller dans le bon sens.
Cependant, pour ce qui concerne la baisse de la C3S – payée par les entreprises, les réticences sont davantage partagées au sein du groupe écologiste. En effet, il s’agit de 1 milliard d’euros de manque à gagner en faveur d’un très large panel d’entreprises. Pour ma part, s’il semble opportun que cette mesure bénéficie aux entreprises dont les marges sont les plus faibles, les dispositions proposées dans ce texte nous semblent excessives. Nous serons attentifs à la traduction effective des promesses annoncées par cette mesure qui pour le moment ne nous convainc pas et demandera à être évaluée.
Ce PLFSS traduit également des réductions de dépenses pour la Sécurité sociale, à la fois pertinentes d’un point de vue budgétaire, mais également appropriées en matière de santé publique.
C’est précisément le cas pour ce qui concerne la lutte contre l’abus de médicaments, les dispositions prises pour promouvoir les génériques et lutter contre le gaspillage en général, le développement de l’ambulatoire et la lutte contre la redondance des examens et diagnostics souvent fastidieux.
Par ailleurs, la réduction des dépenses ne s’oppose pas à quelques mesures certes coûteuses, mais nécessaires pour renforcer notre système de protection sociale et plus largement l’esprit de solidarité. Soulignons par exemple l’effort consenti en faveur de l’autonomie des personnes handicapées : plus 2,1 %, soit un rattrapage utile très attendu et qui demandera à être poursuivi dans les années à venir.
Nous actons aussi votre volonté de renforcer encore l’accès à la contraception et à l’autonomie des femmes ou encore de garantir le versement d’une pension de 100 euros mensuels pour les parents isolés dont le conjoint dérogerait à ses obligations. Ces mesures de solidarité et d’égalité vont dans le bon sens.
Par ailleurs, la gratuité du dépistage du cancer du sein sera étendue aux examens supplémentaires réalisés pour les femmes présentant un risque plus élevé ; des programmes de prévention de l’obésité chez les jeunes enfants seront expérimentés ; la gratuité et la confidentialité du parcours de contraception des mineures seront garanties.
Je tiens également à souligner les avancées notables que l’individualisation de la gestion des droits à la protection universelle maladie permet en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. Certes, cette mesure ne concerne pas seulement les femmes, mais elle leur apportera une protection, notamment en cas de séparation pour celles qui sont sans activité. Elle garantira en outre leur indépendance, donc la confidentialité de certains actes ou certaines prescriptions comme l’usage d’un contraceptif ou le recours à une interruption volontaire de grossesse.
La création de la protection universelle, qui avait été annoncée par le Président de la République, permettra de répondre à l’évolution des changements de vie et d’éviter les failles dans la couverture, voire les situations de rupture de droits. Nous nous réjouissons de voir introduite dans ce texte cette avancée que nous défendons depuis longtemps.
Nous accueillons favorablement le rééquilibrage, prévu par le nouveau mode de tarification des soins de suite, entre les moyens alloués au secteur public et non lucratif et ceux destinés au secteur privé. En effet, le « tout T2A » ne nous semble pas un mode de financement toujours adapté. De plus, la distorsion entre public et privé n’était pas justifiée. Nous serons attentifs aux résultats de cette mesure de financement mixte et saurons rappeler au Gouvernement son intention de l’étendre notamment aux soins palliatifs.
La semaine dernière, j’avais fait part à notre Assemblée de nos inquiétudes concernant le dispositif visant à améliorer le rapport garanties-prix en matière de couverture complémentaire santé des personnes âgées de plus de 65 ans. Si nous sommes d’accord sur l’objectif recherché, j’avais pointé les risques de dumping et les effets négatifs qu’une telle mesure aurait pu avoir pour nos concitoyens et pour les plus petits organismes de complémentaire santé, alors même que la mise en concurrence des mutuelles permet aujourd’hui une large diversité de contrats adaptés aux situations de chaque bénéficiaire. Quel que soit son intérêt financier pour le public visé, le dispositif ne doit donc pas se traduire par une moindre efficacité de la protection complémentaire : sur ce point, nous avons été entendus par le Gouvernement qui a proposé une nouvelle rédaction, plus satisfaisante.
Nous serons néanmoins attentifs à ce que ne soient pas remis en cause ni l’efficacité de nos couvertures complémentaires, ni les emplois qui en dépendent, particulièrement dans les plus petites structures.
Je terminerai donc ce discours de la même manière qu’en nouvelle lecture, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État : ce texte d’équilibre entre mesures d’économies et de soutien à notre système de protection sociale nous semble raisonnable. Si nous émettons quelques inquiétudes quant à l’efficacité et l’applicabilité de certaines mesures, nous reconnaissons tout de même que ce projet de financement de la Sécurité sociale pour 2016 est le fruit d’un travail à la hauteur de la situation économique et sociale de notre pays.
Enfin, je salue également les mesures que vous venez d’annoncer, madame la ministre, qu’il s’agisse de la réduction des inégalités en matière d’offre de soins palliatifs ou du dégel de 150 millions d’euros pour les établissements de santé.