Intervention de Christian Eckert

Séance en hémicycle du 2 décembre 2015 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2015 — Après l'article 16

Christian Eckert, secrétaire d’état chargé du budget :

Cet amendement a pour objet de mettre le régime des groupes fiscaux en conformité avec le droit européen, en tirant les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 2 septembre 2015, rendu dans l’affaire C-38614 et plus connu sous le nom d’« arrêt Steria ». La Cour a jugé contraire à la liberté d’établissement le fait de réserver aux dividendes versés entre membres d’un même groupe fiscal l’exonération de la quote-part de frais et charges applicable aux dividendes relevant du régime mère-fille, aujourd’hui fixée à 5 % du montant des dividendes. Le respect de la liberté d’établissement impose en effet d’appliquer la même exonération aux dividendes provenant de filiales situées dans un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen qui, si elles avaient été résidentes en France, auraient pu être membres du groupe.

Toutefois, le Gouvernement a considéré qu’une mise en conformité par extension de l’exonération à ces filiales européennes risquait d’avoir un coût trop élevé – on évoque, je crois, un montant de 400 millions d’euros.

Il est donc proposé de procéder à cette mise en conformité en retenant une solution différente : l’exonération de la quote-part actuellement applicable au sein du groupe serait supprimée et le pourcentage de cette quote-part serait ramené à 1 % pour les distributions intragroupe, afin d’atténuer le coût de la suppression de l’exonération pour les groupes fiscaux.

Cette mise en conformité proprement dite repose sur le fait que le taux de la quote-part de frais et charges afférents aux dividendes éligibles au régime mère-fille sera abaissé à 1 %, non seulement lorsque les dividendes sont versés entre membres d’un même groupe, mais aussi lorsqu’ils sont perçus par une société membre d’un groupe à raison d’une participation d’une société établie dans un autre État de l’Union ou de l’Espace économique européen qui aurait rempli les conditions pour être membre du groupe fiscal français si elles avaient été établies en France.

Pardonnez-moi d’avoir été un peu long et précis, mais il s’agit d’une affaire importante, lourde sur le plan financier, qui a des conséquences importantes pour les entreprises et qui a fait l’objet de nombreux et longs travaux.

Il s’agit, tout d’abord, que cette indispensable mise en conformité vis-à-vis du droit puisse être globalement neutre pour l’État sur le plan budgétaire – ce que permet le taux de 1 %. Deuxièmement, nous avons mené une importante concertation avec les entreprises – surtout avec les grandes, car il s’agit principalement ici d’intégration fiscale, mais aussi avec les très grandes et les moyennes – et nous nous sommes efforcés d’évaluer les conséquences de cette mesure car, comme vous l’avez dit hier à très juste titre, madame la rapporteure générale, il est rare que des réformes ne fassent aucun gagnant ni aucun perdant lorsqu’elles sont globalement neutres sur le plan budgétaire.

La profession, qui ne souhaitait pas forcément la remise en cause de ce dispositif, n’était pas enchantée de l’arrêt de la Cour de justice européenne et a même regretté qu’un contentieux ait été engagé par l’un de ses membres. Chacun a cependant convenu que cette solution était plutôt convenable et ne faisait pas trop de perdants, ou du moins que ceux-ci ne l’étaient pas trop lourdement, et qu’il y avait, à l’inverse, quelques gagnants. Toujours est-il que cette question délicate et qui a été très difficile à régler n’a pas suscité de levée de boucliers. C’est toutefois cette difficulté qui nous a fait différer son examen jusqu’à ce projet de loi de finances rectificative, car les discussions se sont poursuivies assez tard dans le calendrier.

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