Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, avec cinq mois de retard, nous nous apprêtons à transposer la directive du 26 juin 2013 qui, elle-même, révise la directive PSI. Dans moins d’un mois, nous étudierons le projet de loi pour une République numérique, qui contient une partie entière sur l’ouverture des données publiques. Nous ne cessons de déplorer cette drôle de gestion du calendrier parlementaire, qui rend très difficilement lisible la stratégie numérique de notre pays, et plus particulièrement, sa stratégie en matière d’open data.
Si le chantier a été ouvert avec ce texte, pour bien des amendements déposés, vous nous avez renvoyés au projet de loi numérique. C’est sans doute la raison pour laquelle, au moment d’adopter ce texte, nous avons l’impression, avant tout, d’une politique de petits pas : on avance un peu, mais on garde l’ambition pour le projet de loi numérique. Et la commission mixte paritaire doit surtout sa belle unanimité au fait que les sujets majeurs sont renvoyés à plus tard.
Ainsi en est-il de la question centrale des redevances et du principe qui doit être au coeur de la politique d’open data : la gratuité est la règle ; les redevances, l’exception.
Bien sûr, nous sommes tous ici d’accord pour dire que le libre accès renforcera l’efficacité de l’action publique, et dynamisera la croissance économique. Fondamentalement, pourtant, les députés du groupe Les Républicains ne croient pas qu’inscrire dans la loi le principe de gratuité, en l’assortissant dans le même temps d’exceptions notables, soit le gage d’une vraie politique volontariste en matière d’ouverture et de partage des données publiques. Il faut bien le dire : les sénateurs semblent voir les choses de façon plus restrictive que les députés, si l’on compare les textes issus des deux chambres.
Heureusement, la CMP a permis de conserver les avancées – relativement modestes par rapport à ce que l’on pouvait attendre de ce texte – que nous avions obtenues en première lecture. C’est ainsi que le projet de loi a conservé : la limitation à 15 ans de la période d’exclusivité pouvant être accordée pour la numérisation de ressources culturelles ; l’obligation d’utiliser une licence lorsque la réutilisation des données est soumise à redevance ; la transparence des redevances, tant sur leur montant que sur les modalités de calcul utilisées ; la révision régulière, tous les cinq ans, des catégories d’administration autorisées à établir des redevances, ainsi que des montants de ces redevances ; l’inscription par décret de la liste des informations ou catégories d’informations qui peuvent donner lieu à l’établissement d’une redevance.
Il faudra être extrêmement vigilant sur le contenu de ces décrets afin qu’ils ne viennent pas restreindre le principe adopté par le législateur et freiner le mouvement amorcé. Aussi je souhaite, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement s’engage à informer les parlementaires du contenu de ces décrets pendant leur phase de préparation.
Concernant les points négatifs, le groupe Les Républicains regrette que l’article 1er B ait été voté dans sa version issue du Sénat. Alors que le texte adopté par l’Assemblée nationale imposait à l’administration de mettre à disposition les informations sous forme électronique et faisait du standard ouvert la règle, la version sur laquelle nous voterons dispose que la mise à disposition sous forme électronique n’est pas obligatoire et que, lorsque le format numérique existe, les informations sont mises à disposition, « si possible, dans un standard ouvert ».
Enfin, la navette – très brève à cause de la procédure accélérée – n’a pas permis d’éclaircir la question de la transparence des accords d’exclusivité prévue à l’alinéa 6 de l’article 2, qui prévoit que « les accords d’exclusivité et leurs avenants sont transparents et rendus publics sous forme électronique ». Cette formulation, toujours assez floue, même si de bonnes raisons le justifient peut-être, est plus restrictive que ce qui avait été envisagé en première lecture.
Nos objections sont donc les mêmes depuis le début : ce projet de loi se borne à une simple transposition de la directive. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi, mais en refusant d’aller au-delà, je crains que le mouvement de l’open data, qui avait besoin d’un coup de fouet pour finir le travail commencé en 2011, ne soit freiné. J’espère me tromper et que vous ne fermerez pas la porte aux propositions qui rouvriront le débat dans quelques semaines à peine, lors de l’examen du projet de loi pour une République numérique. Je vous préviens déjà que nous déposerons des amendements pour aller plus loin que cette directive.
En résumé, même s’il faut une révolution, et que nous n’avons aujourd’hui qu’une transposition, le groupe Les Républicains votera pour ce projet de loi.