Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, chers collègues, nous entamons aujourd’hui la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2016, après son passage au Sénat, où l’existence d’une majorité différente présente l’avantage – c’est sans doute le seul – de donner à voir quelle serait la politique budgétaire d’une majorité alternative au niveau national.
La majorité sénatoriale a ainsi voté l’allégement de l’impôt des plus aisés pour 2,8 milliards d’euros, en baissant le taux de la tranche à 30 % et en relevant le plafond du quotient familial. Corrélativement, elle a supprimé la réforme gouvernementale de la décote, qui allégeait de 2 milliards d’euros l’impôt de ceux qui se situent en bas du barème. La majorité sénatoriale a donc déplacé 2 milliards d’impôt sur les plus modestes et creusé le déficit de 800 millions. Elle a, de plus, allégé l’impôt sur la fortune en faisant passer l’exonération de la valeur de la résidence principale de 30 % à 50 %. En un mot, les propositions fiscales de la majorité sénatoriale sont contraires à la justice la plus élémentaire.
Côté dépenses, la majorité sénatoriale a proposé de couper dans les dépenses publiques pour un total de 3,9 milliards d’euros : 650 millions sur le revenu de solidarité active – RSA –, 457 millions sur les contrats aidés, 107 millions sur l’enseignement scolaire et 2,8 milliards sur l’emploi et la rémunération des fonctionnaires. Nous laisserons les Français apprécier si c’est la politique dont le pays a besoin.
L’une des seules mesures dont nous pourrions discuter – mais pas dans ses modalités – serait la réduction à 1,6 milliard d’euros, au lieu des 3,7 milliards actuellement prévus, de la baisse des dotations aux collectivités locales. Cette baisse nous apparaît en effet comme l’élément le plus négatif du projet de loi de finances proposé par le Gouvernement et ses conséquences brutales sur les territoires nous conduisent à la plus grande vigilance sur les effets de la mise en oeuvre de ce budget.
Les Écologistes seront très attentifs à ce que, dans cette nouvelle lecture du projet de loi de finances, les mesures d’allégement de l’impôt pour les ménages aux revenus modestes et les classes moyennes soient maintenues, notamment la limite de la décote – portée, je le rappelle, de 1 135 à 1 553 euros pour les célibataires et de 1 870 à 2 560 euros pour les couples –, ainsi que l’indexation sur l’inflation des tranches de l’impôt sur le revenu. L’impact de cette mesure est une diminution de l’impôt sur le revenu pour huit millions de contribuables, parmi lesquels trois millions de foyers fiscaux qui n’avaient pas bénéficié de mesures de baisse d’impôt au cours des années précédentes. Environ 500 000 foyers sortiront du champ de l’impôt et autant n’y entreront pas. Concrètement, c’est un allégement de 2,1 milliards pour ceux qui sont dans les premières tranches de l’impôt. C’est une orientation que préconisaient les Écologistes et il faut la rétablir à l’occasion de cette nouvelle lecture.
Les Écologistes seront également très attentifs à ce que les avancées du débat à l’Assemblée nationale soient maintenues.
Je pense notamment à l’inclusion des transactions financières intra-journalières dans la taxe sur les transactions financières française, qui annonce, nous l’espérons, une même extension de l’assiette au niveau européen. C’est un élément important pour progresser dans la régulation du système financier. Les engagements qui ont suivi la crise de 2008 doivent être tenus et nous n’avons que trop tardé pour mettre en place l’ensemble des outils de régulation nécessaires.
Je pense également à l’amendement de Jean-Marc Ayrault et Pierre-Alain Muet sur la diminution de la contribution sociale généralisée – CSG – pour les salaires jusqu’à 1,34 fois le SMIC, amendement essentiel qui rend enfin la CSG dégressive et qui permet de redonner du pouvoir d’achat directement sur la feuille de salaire, y compris à tous ceux qui ne paient pas aujourd’hui l’impôt sur le revenu – ou qui, plutôt, paient un impôt sur le revenu sans le savoir, sous la forme d’une CSG au taux de 7,5 % pour tous, quel que soit le niveau de revenus.
Nous serons également attentifs à ce que soient rétablis les 162 millions d’euros supprimés au titre de l’aide publique au développement en seconde délibération lors de la première lecture. Cette coupe budgétaire est difficilement compréhensible au moment où nous demandons à tous les pays de faire un effort budgétaire pour l’adaptation au changement climatique des pays du Sud dans le cadre de la COP21.
Mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur la responsabilité particulière qui pèse sur nous, à l’instant où nous parlons. Nous traversons des périodes difficiles et le Gouvernement a apporté les réponses qu’il pensait justes sur le plan de la sécurité, mais nous devons également répondre aux attentes des Français sur le plan économique et social. C’est à cette condition que nous éviterons la fragmentation de notre société.