Intervention de Daniel Gibbes

Séance en hémicycle du 11 décembre 2015 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2016 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Gibbes :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, comme l’année dernière, je veux tout d’abord saluer le travail de nos collègues sénateurs, qui ont examiné non seulement la première partie du budget sur les recettes, mais aussi la seconde partie sur les crédits et les articles non rattachés.

Pour les ménages, pour les entreprises comme pour les collectivités, de nombreuses dispositions ont permis d’améliorer le texte initial.

La navette a également permis au Gouvernement de faire adopter les 815 millions d’euros de mesures qui doivent renforcer la sécurité des Français. La situation dramatique que nous vivons au lendemain des terribles attentats appelle en effet des réponses fortes en matière de sécurité et nous serons bien entendu à vos côtés sur ce plan-là. Nous approuvons d’autant plus ces mesures que nous vous alertons depuis de nombreux mois sur l’insuffisance des moyens alloués à notre défense et à notre sécurité. En revanche, si les nouvelles dépenses annoncées devaient être un prétexte pour s’affranchir de nos engagements européens, notre opposition serait totale.

Je souhaite m’arrêter quelques instants sur les crédits en faveur des outremers – sensiblement épargnés il est vrai par les coupes budgétaires. Néanmoins, je continue à m’interroger sur certains « oublis » – dont je me demande s’ils sont volontaires ou non – relatifs plus particulièrement aux COM, les collectivités d’outre-mer, disposant d’une fiscalité propre : je parle bien évidemment de l’absence de compensation du CICE renforcé, malgré les savants calculs gouvernementaux qui ne satisfont personne.

Je parle aussi de la promesse non-tenue, puisque non traduite dans ce PLF, que le chef de l’État avait faite lors de sa visite éclair sur l’île de Saint-Martin, de supprimer cette absurdité administrative qu’est la dotation de compensation négative.

Un autre débat devra être engagé dans les prochains mois concernant l’exonération de la taxe de solidarité, dite « taxe Chirac », pour les vols d’une distance inférieure à 50 kilomètres pour les territoires ultramarins. Le cas d’un passager se rendant de l’île de Saint-Barthélemy vers l’aéroport international de Juliana situé à quelques kilomètres, dans la partie néerlandaise de l’île de Saint-Martin, est révélateur. En effet, cet aéroport est considéré comme non européen puisque situé à Sint Maarten, la jumelle néerlandaise « Pays et territoire d’outre-mer » de Saint-Martin, la Française « Région ultrapériphérique ». Conséquence : le passager doit acquitter une taxe de 4,51 euros, soit la même somme que le passager qui ferait un Paris-Tokyo.

L’application de cette taxation est ainsi plus problématique dans les outremers et spécialement dans les îles du Nord. En effet, hormis la voie maritime, l’avion est le seul moyen de transport entre des îles distantes parfois de quelques dizaines de kilomètres.

Je referme cette parenthèse outremer et j’en viens maintenant à la trajectoire budgétaire proposée par le Gouvernement dans ce projet de loi de finances pour 2016.

Tirant profit d’un nouveau report du délai de correction du déficit excessif par les autorités européennes, le Gouvernement a fait du retour du déficit en deçà de 3 % du PIB en 2017 son principal objectif budgétaire. Ainsi, il anticipe un déficit de 2,7 % en 2017, après 3,3 % en 2016. Toutefois, entre 2014 et 2015, le solde effectif n’afficherait qu’une amélioration très modeste de 0,1 point pour s’établir à 3,8 % du PIB cette année. On peut légitimement s’interroger sur la capacité du Gouvernement à revenir sous la barre des 3 %.

Concernant la croissance, le Gouvernement retient pour 2016 une prévision de 1,5 %, après 1 % en 2015. Pour autant, des inquiétudes existent, qu’il s’agisse d’un ralentissement des pays émergents, d’une contraction du commerce mondial ou de l’instabilité des marchés financiers – la Banque de France a d’ailleurs récemment revu ses prévisions de croissance à la baisse.

Plus inquiétant encore, la comparaison des principaux indicateurs des finances publiques des États de la zone euro se révèle particulièrement défavorable pour la France. Monsieur le ministre, les difficultés de votre gouvernement à engager des réformes structurelles en privilégiant la technique du « coup de rabot » en sont les principales raisons.

Ce budget sera le dernier en année pleine du quinquennat de François Hollande. Nous devons donc nous interroger sur les résultats de votre politique qui, malheureusement, sont loin d’être au rendez-vous. Non seulement la France connaît un taux de chômage record jamais atteint depuis 1997, mais elle est également la vice-championne du monde des prélèvements obligatoires. Tristes records !

En bref, ce projet de loi de finances pour 2016 n’est pas à la hauteur des enjeux. Il ne contient aucune décision courageuse en ce qui concerne le déficit, la politique de croissance, la baisse réelle de la dépense publique et, hélas, la question de la résorption durable du chômage.

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