Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi qu’examine aujourd’hui l’Assemblée nationale a été conçue au cours des derniers mois. D’abord élaborée pour répondre aux difficultés rencontrées au quotidien par les contrôleurs et les agents de sûreté de la SNCF et de la RATP, elle a évolué lorsque le terrorisme a, par deux fois, montré sa face hideuse sur le sol français : d’abord en août, lors de l’attaque du Thalys déjouée par quelques héros, ensuite le mois dernier, avec les événements tragiques que nous avons tous en mémoire.
Nous savons que les transports publics sont pour nos ennemis une cible privilégiée, comme on l’a déjà vu il y a dix ans à Madrid et à Londres, et même il y a vingt ans à la station Saint-Michel. Face à la menace, le Gouvernement fait tout ce qui est possible – vous, monsieur le ministre de l’Intérieur, faites tout ce qui est possible. Nous vous devons, en tant que parlementaires, de voter des lois qui soutiennent votre action. Nous le devons aussi aux personnels de sécurité, forces de l’ordre, agents de sûreté, qui travaillent chaque jour à la sécurité des Français. Nous le devons enfin à nos concitoyens, qui ont besoin de protection pour continuer à mener une vie normale.
C’est donc un double objectif qui est désormais poursuivi, mêlant la prévention du terrorisme à la lutte contre les incivilités. Le rapporteur Gilles Savary a choisi d’adapter le titre de la proposition de loi à ce nouveau contexte pour le rendre plus explicite, et je crois qu’il a bien fait.
La commission des lois s’est saisie pour avis de la totalité de cette proposition de loi, qui comprend de nombreuses dispositions relatives à la sécurité intérieure et à la procédure pénale. Je ne vous surprendrai pas en indiquant d’ores et déjà qu’elle a délivré un avis favorable.
Nous nous sommes attachés à concilier la légitime demande de sécurité supplémentaire des Français et la préservation des droits et libertés des personnes. Ainsi, il n’a pas été question de remettre en cause la préservation du droit à la vie privée, ni de confier à d’autres qu’aux forces de police et de gendarmerie des pouvoirs de contrainte. De même, nous sommes partis du principe que les Français qui prennent le train, le RER, le métro ou le bus pour aller travailler ne peuvent pas se soumettre matin et soir à des procédures de contrôle intense inspirées du transport aérien : ce serait tout à la fois irréaliste et inopportun.
La commission des lois a discuté trente-sept amendements, dans un dialogue constructif où, comme les circonstances l’exigent, majorité et opposition ont pris toute leur part. Douze amendements ont été adoptés. Je n’aurai guère l’occasion de les défendre au cours de la séance publique puisqu’ils ont convaincu la commission du développement durable, qui les a intégrés au texte en discussion. Je remercie le président et le rapporteur de la commission au fond pour la qualité de nos échanges et de nos débats.
Je me bornerai donc à présenter, ici, les quatre avancées dont la commission des lois est à l’origine et qui me semblent les plus importantes.
En premier lieu, dans le cadre de la lutte contre la fraude, un amendement devenu l’article 8 bis précise que le manquement à l’obligation de demeurer à la disposition du contrôleur pendant qu’il rend compte à un officier de police judiciaire constitue désormais un délit. Les contrôleurs se plaignent amèrement de ne pas disposer des moyens de retenir un contrevenant le temps d’exposer la situation à un officier de police judiciaire, seul à même de décider un contrôle d’identité. Ce dispositif permet de ne pas créer une nouvelle forme de rétention administrative, que le juge constitutionnel n’accepterait d’ailleurs pas en répression d’une simple contravention, mais de parvenir à un résultat équivalent : le fuyard commettant un délit flagrant, des mesures coercitives pourront être mises en oeuvre à son encontre dans l’attente de l’arrivée des forces de police.
En second lieu, nous proposons de mettre un terme aux « mutuelles de fraudeurs » en faisant de leur activité un délit sur le modèle de ce que prévoit la loi sur la liberté de la presse. Certains, en effet, construisent des systèmes d’assurance qui jouent sur les probabilités de contrôle et qui remboursent leurs amendes, ce qui leur permet de voyager gratis ou presque. Le dispositif proposé à l’article 8 ter sanctionne l’organisation d’une mutuelle, c’est-à-dire le fait de lancer une souscription pour acquitter une amende future, de six mois d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Je gage que nous dissuaderons ainsi certaines vocations.
En troisième lieu, le président de la commission des lois a tenu à préciser explicitement, à l’article 9, l’application des dispositions de la loi Informatique et libertés. Je sais que cette préoccupation est partagée sur plusieurs bancs. Le renvoi opéré garantit la consultation de la CNIL sur les mesures réglementaires d’application, le pouvoir de contrôle et de sanction de cette même CNIL, et l’application des règles classiques de protection des données personnelles.
Je conclus avec ce qui me semble la mesure la plus importante et la plus attendue en termes de prévention des actions terroristes. À mon initiative, par le biais d’un amendement que j’ai défendu avec le soutien du rapporteur Gilles Savary, l’article 3 bis prévoit un mécanisme de criblage pour que la SNCF et la RATP puissent solliciter des enquêtes administratives, dans le cadre existant de l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure, afin de mieux contrôler certains personnels recrutés ou affectés sur des fonctions sensibles. Les événements récents ont souligné la nécessité de ce mécanisme. Je sais que ce dispositif répond pour partie à des préoccupations de l’opposition,…