Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 16 décembre 2015 à 21h30
Transports collectifs de voyageurs — Discussion générale

Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur :

Mais cette autoroute est également longue de plusieurs centaines de kilomètres ! Si vous ne mesurez la présence des forces de l’ordre qu’à l’aune de celle des policiers et des gendarmes à chaque point de passage de cette frontière septentrionale, ou tout au long de l’autoroute A1, vous serez éternellement insatisfait.

En effet, avec au total 257 000 policiers et gendarmes, dont 120 000 sont affectés à la lutte contre le terrorisme, nous ne sommes pas en situation de poster deux policiers ou deux gendarmes devant les 77 000 écoles de France, sur l’ensemble des axes routiers ou des points de contrôles aux frontières.

La vérité m’oblige à le dire. Je ne suis d’ailleurs pas certain qu’un tel déploiement de forces garantirait l’efficacité des forces de l’ordre : il faut simplement qu’elles se trouvent là où cela est nécessaire, et qu’un travail de renseignement réalisé en amont leur permette d’atteindre leurs objectifs.

Pour autant, monsieur Carvalho, vous savez très bien que, parce que nous avons conscience du fait que la ressource humaine est un gage d’efficacité dans la lutte contre le terrorisme, nous aurons, d’ici la fin du quinquennat, créé 10 000 emplois au sein des forces de police et de gendarmerie, dont une partie dans les services de renseignement.

En effet, la création de près de 1 500 emplois a été décidée dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme, dont près de 1 100 au sein de ces mêmes services. Les agents concernés seront affectés à des missions de renseignement territorial ou intérieur, ou à la préfecture de police de Paris.

Les 5 000 emplois supplémentaires dont la création a été décidée par le Président de la République manifestent également notre volonté d’envoyer des policiers et des gendarmes partout où cela s’avère nécessaire afin d’accroître l’efficacité de la lutte contre le terrorisme.

Enfin, je veux revenir sur le criblage. Madame Valérie Lacroute, vous avez insisté sur le fait que les fiches « S » devaient être communiquées aux employeurs. Nous ne le ferons jamais, car procéder ainsi reviendrait à tuer le renseignement en France.

La fiche « S » est une source d’information qui a une dimension de classification et qui contient des éléments de nature secrète qui n’ont, bien entendu, pas vocation à être rendus publics. Et contrairement à ce que vous avez dit, même dans les centrales nucléaires, les employeurs n’ont pas connaissance des fiches « S » portant sur leurs salariés, ni de leur contenu.

Nous procédons en réalité à un criblage des salariés amenés à pénétrer dans les centrales nucléaires. J’ai d’ailleurs proposé, concernant la SNCF et la RATP, que nous puissions utiliser le fichier mis en place au moment de la création de l’état-major opérationnel de prévention du terrorisme, l’EMOP, pour procéder au signalement de salariés de ces entreprises.

C’est la bonne méthode, car les entreprises de transport comptent des dizaines de milliers de salariés. Le criblage est actuellement réalisé par les services des préfectures. Si nous devions cribler des dizaines ou des centaines de milliers de professionnels à risque, je vous laisse imaginer quel déploiement de fonctionnaires et de bureaucratie cela impliquerait !

En revanche, nous disposons d’un outil, qui est le fichier de données à caractère personnel dénommé FSPRT, à partir duquel nous pouvons opérer un signalement auprès des employeurs et faire en sorte qu’aucune personne dont nous serions amenés à apprendre la radicalisation ne puisse nuire dans les entreprises pour lesquelles elle pourrait représenter un risque.

Cette méthode répond à votre préoccupation et nous permet d’éviter l’embolie bureaucratique dont je viens de parler.

Tels sont les éléments que je souhaitais donner en réponse à la discussion générale. Bien entendu, je ne doute pas que le débat sur les amendements permettra d’aller au fond de l’ensemble de ces sujets.

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