Monsieur le président, madame la rapporteure, madame la présidente de la Délégation aux droits des femmes, au nom du groupe Socialiste, républicain et citoyen, je tiens à vous remercier de votre engagement et de votre ténacité depuis plus de deux ans. Cette proposition de loi, dont l'enterrement avait été maintes fois pronostiqué par certains observateurs, va bel et bien devenir la loi de la République.
La commission mixte paritaire a échoué, notamment sur la responsabilisation du client, qu'il nous appartient aujourd'hui de rétablir. Cette proposition de loi n'est pas seulement un texte sur la pénalisation du client : c'est un texte d'émancipation des femmes et des hommes qui, dans leur immense majorité, n'exercent pas librement l'activité de prostitution et doivent être considérés comme les victimes d'un système de traite et d'exploitation qui réduit les êtres humains au rang de marchandises.
Nous devons nous féliciter que le coeur de cette proposition de loi, à savoir l'abrogation du délit de racolage, lequel faisait de ces victimes des coupables, soit aujourd'hui définitivement acquise. Je veux remercier nos collègues sénateurs, notamment ceux qui, au centre et à droite, ont su dépasser les clivages traditionnels pour nous rejoindre.
Même si quelques arbitrages techniques subsistent, nos travaux vont aboutir à la création d'un parcours de sortie de la prostitution, assorti de dispositifs protecteurs, notamment en matière de logement et de droit au séjour, ce qui amènera les acteurs de la société civile accompagnant ces personnes à jouer tout leur rôle.
Je reviendrai plus précisément dans nos débats sur l'article 16, qui continue de nous diviser. L'enjeu de cet article n'est pas la sanction, mais l'éducation. Or l'éducation implique de poser des principes et des interdits. La liberté de disposer de son corps n'est pas la liberté de disposer du corps d'autrui, le corps humain n'est pas une marchandise et il ne pourra y avoir d'égalité entre les hommes et les femmes tant que la société tolérera que les désirs sexuels peuvent faire l'objet d'un marché où les uns seraient des sujets et les autres des objets.
Alors oui, si ces principes de liberté et d'égalité nous guident, nous devons poser un interdit et dire clairement que le système de traite et d'exploitation des êtres humains, que nous voulons résolument combattre, n'existerait pas s'il n'y avait pas de client.