La séance est ouverte à 17 heures.
Présidence de M. Guy Geoffroy, président.
La commission spéciale procède à l'examen, en nouvelle lecture, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat en deuxième lecture, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, (n° 3149) (Mme Maud Olivier, rapporteure).
Mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de saluer en votre nom trois stagiaires du service des comptes rendus de l'Assemblée nationale du Niger, que nous sommes ravis d'accueillir.
Avant de laisser la parole à notre rapporteure Maud Olivier, je rappellerai le cadre de notre débat. Nous approchons du terme d'un long travail parlementaire, engagé à notre initiative, celle de l'Assemblée nationale, sous la précédente législature et repris – de quelle manière ! – par la nouvelle majorité sous la présente législature, avec mon plein accord et dans le droit-fil du consensus de très haut niveau qui nous unit depuis le début sur ces questions difficiles mais essentielles.
Notre réunion d'aujourd'hui pourrait bien être la dernière, et sera en tout état de cause l'avant-dernière.
En effet, la commission mixte paritaire que nous avons tenue il y a quelques semaines à l'Assemblée nationale et que j'avais l'honneur de présider n'a pu aboutir, bien que nous ayons tout fait vis-à-vis de nos collègues sénateurs pour y parvenir, comme c'était notre devoir. Nous les avons écoutés, nous les avons invités à comprendre le sens de notre combat – ils nous ont d'ailleurs entendus – et à considérer que les propositions que nous leur présentions ou que nous étions prêts à leur faire dans le cadre de la CMP apportaient une réponse parfaite à leurs légitimes préoccupations.
Toutefois, comme je l'ai dit, nous avons malheureusement dû conclure – j'ai préféré le faire en assumant pleinement ma responsabilité – que cette CMP ne pourrait aboutir. Certes, mathématiquement, nous pouvions faire voter à la majorité de ses membres le texte que nous souhaitions voir adopter. Néanmoins, tous en ont convenu, c'était s'exposer au risque – qui n'est pas exclu – que notre Assemblée le votât mais que le Sénat ne fît pas de même, ce qui aurait allongé d'autant la navette entre les deux assemblées en retardant la nouvelle lecture.
Compte tenu de l'encombrement naturel de l'agenda législatif, j'ai donc décidé, en parfait accord avec les membres de la CMP et dans le respect dû à nos collègues sénateurs – un respect que je ne regretterai jamais de leur avoir témoigné –, de donner une chance supplémentaire au texte en abrégeant la navette.
Nous allons par conséquent, comme notre rapporteure va vous l'expliquer en détail, vous proposer une série d'amendements que j'ai, pour certains, cosignés avec elle et qui tendent principalement à revenir au texte qui était le nôtre avant le dernier passage au Sénat, assorti des dispositions qui nous semblent pertinentes, qu'il nous est apparu utile de proposer à nos collègues sénateurs, mais que ces derniers n'ont pas jugé suffisantes.
Si j'ai souhaité que nous procédions ainsi – Maud Olivier en est parfaitement d'accord –, c'est parce que notre travail parlementaire doit être cohérent, lisible et efficace. Nous devons aboutir, et nous y parviendrons, à un texte équilibré, responsable, qui change du tout au tout l'appréhension par notre société et l'ensemble de nos institutions du phénomène prostitutionnel dans notre pays. Tel est l'objectif qu'il nous faut atteindre dans le respect de chacun, en indiquant qui est responsable, qui est victime, et en apportant encore plus de soutien, en témoignant encore plus de considération aux personnes prostituées victimes du système qui les emploie et les fait sombrer dans la dépendance et dans la violence.
À ces personnes et à notre pays, nous devons une responsabilité qui a fait jusqu'à présent défaut, malgré l'engagement de 1949 sanctifié dans nos lois à partir de 1960. Nous sommes un pays abolitionniste ; la loi que nous examinons aujourd'hui, et dont le texte issu de nos travaux devrait être très proche de la version finale que nous adopterons si nécessaire en lecture définitive, donnera à cette ambition abolitionniste toute sa puissance.
L'instant est solennel, et le sera d'autant plus que nous approcherons du terme du combat. Ce combat que nous avons décidé de mener ensemble, nous l'avons livré dans l'intelligence et le respect mutuels ; nous avons cherché à répondre précisément aux besoins des victimes que sont les personnes prostituées, comme aux attentes légitimes de nos concitoyens, auxquels la question a été trop souvent présentée dans des termes archaïques, caricaturaux, qui ne correspondent en rien à ce qu'est réellement ce phénomène dramatique pour l'humanité, pour les femmes et pour toutes les victimes de cette violence insupportable.
Je commencerai par rappeler, après notre président, que les parlementaires des deux chambres ont été guidés par des ambitions communes ; la preuve en est que plusieurs dispositions du texte ont été adoptées dans des termes identiques.
Il s'agit tout d'abord de l'article 1er bis, qui vise à améliorer la formation des professionnels engagés dans la prévention de la prostitution et l'identification des situations de prostitution, de proxénétisme et de traite des êtres humains.
L'article 8 ensuite, qui étend le bénéfice de l'allocation de logement temporaire (ALT) aux associations agréées pour l'accompagnement des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle.
L'article 9, qui étend aux victimes de la prostitution et du proxénétisme l'accueil – déjà offert aux victimes de la traite – en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) dans des conditions sécurisantes.
L'article 11, qui autorise les associations dont l'objet statutaire est la lutte contre la traite des êtres humains et le proxénétisme ou l'action sociale en faveur des personnes prostituées à exercer les droits reconnus à la partie civile à l'occasion d'un procès pénal.
L'article 13, qui supprime de notre corpus pénal le délit de racolage public.
J'aimerais m'attarder un instant sur cette disposition essentielle grâce à laquelle, pour la première fois dans notre pays, les personnes prostituées cessent d'être pénalisées dans le cadre de leur activité. Ainsi, nous mettons enfin notre droit en cohérence avec les principes défendus de longue date par la France : la prostitution est une violence faite aux femmes et les personnes prostituées sont victimes de cette violence, et non coupables. C'est un progrès pour toutes les femmes. Avec l'inversion de la charge pénale et la responsabilisation des clients – à condition que nous réintroduisions cette disposition dans le texte, mais je ne doute pas que nous le ferons –, nous affirmons enfin que la prostitution existe parce que les hommes choisissent en conscience d'acheter un acte sexuel.
Les deux chambres ont également adopté conforme l'article 14 ter, qui définit le cadre dans lequel doit s'inscrire la politique de réduction des risques sanitaires, sociaux et psychologiques liés à la prostitution.
Il en a été de même pour les articles 15 et 15 bis, qui enrichissent le contenu de l'information et de l'éducation à la sexualité dispensées aux élèves et font une place à l'information sur les « réalités de la prostitution » et sur les « dangers de la marchandisation du corps ».
Assemblée nationale et Sénat ont aussi adopté conforme l'article 4, qui crée un fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées, dont les recettes annuelles devraient s'élever, conformément à l'engagement du Gouvernement, à 20 millions d'euros.
Je me félicite de toutes ces avancées, fruit du travail des deux chambres.
Les sénateurs ont toutefois modifié plusieurs dispositions de la proposition de loi en deuxième lecture.
Ils ont complété l'article 1er, qui vise à renforcer la lutte, sur Internet, contre les réseaux d'exploitation sexuelle.
Ils ont en partie réécrit l'article 1er ter, qui accorde une protection renforcée aux personnes prostituées victimes de la traite des êtres humains ou du proxénétisme qui aident l'autorité judiciaire, par leurs témoignages, à démanteler les réseaux.
Ils ont apporté quelques modifications, d'ampleur sans doute moindre, à l'article 3, qui trace les contours du parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle, à l'article 6, destiné à faciliter l'admission au séjour des personnes étrangères victimes de la traite des êtres humains ou du proxénétisme, et à l'article 18, consacré au rapport sur l'application de la loi que le Gouvernement devra remettre au Parlement.
Mais surtout, les sénateurs ont supprimé les articles 9 bis, 16 et 17, comme ils l'avaient d'ailleurs fait en première lecture.
L'article 9 bis aggravait les peines encourues par les personnes reconnues coupables de certaines infractions commises à l'encontre d'une personne prostituée dans l'exercice de son activité.
L'article 16, pièce maîtresse du volet de la proposition de loi consacré à la responsabilisation du client, créait une infraction de recours à l'achat d'actes sexuels, punie d'une amende contraventionnelle de cinquième classe, c'est-à-dire de 1 500 euros, et, en cas de récidive, d'une amende délictuelle de 3 750 euros.
Enfin, l'article 17, qui fait partie du même volet, instaurait une peine complémentaire : l'obligation d'accomplir un stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels.
Étant donné les divergences subsistant sur ces points après deux lectures dans chaque assemblée, une commission mixte paritaire s'est réunie le 18 novembre dernier, mais ne nous a pas permis de nous mettre d'accord sur la question fondamentale du statut que la loi doit reconnaître aux personnes prostituées, d'une part, et aux clients de la prostitution, d'autre part.
Je le regrette naturellement. Je souhaite néanmoins, comme notre président, que la proposition de loi – qui est inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée le 27 janvier prochain – puisse être définitivement adoptée dans les meilleurs délais afin de s'appliquer rapidement. Il est urgent, en effet, de garantir aux personnes prostituées la protection dont elles ont besoin et de se donner les moyens de les accompagner dans leur projet de rupture avec l'activité prostitutionnelle.
Le débat sur la pénalisation de l'achat de tout acte sexuel nous occupe depuis vingt-quatre mois. Vous connaissez la position du groupe Écologiste : une très grande majorité de ses membres est opposée à la pénalisation des clients. Au cours des débats, nous avons aussi condamné la pénalisation du racolage ; la sénatrice Esther Benbassa avait d'ailleurs déposé dès 2012 une proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à supprimer le délit de racolage.
Je salue la qualité du débat qui a eu lieu au sein de la Commission. Nous n'étions pas toujours d'accord et les discussions ont été parfois tendues, mais les accusations de promotion de la prostitution que l'on avait pu entendre au début n'ont pas été réitérées. Peut-être avons-nous simplement appris à nous connaître et à respecter les arguments de chacun ; et puis les intervenants ont changé…
L'opposition des écologistes se fonde notamment sur le fait que les arguments aujourd'hui mobilisés pour défendre la pénalisation sont similaires à ceux que l'ancienne majorité avançait en 2003 à l'appui du délit de racolage. À l'époque, déjà, on promettait de démanteler les réseaux de proxénétisme et de traite. Plus de dix ans après, le constat est malheureusement sans appel : loin d'atteindre cet objectif, la disposition a eu pour principal effet d'aggraver la précarité et la stigmatisation des travailleuses et des travailleurs du sexe.
Si nous sommes opposés à cette mesure, c'est aussi que nous ne partageons pas la philosophie qui l'anime. À la suite de l'instauration de ce délit, les forces de police ont accru leur pression sur les personnes prostituées, alors que les réseaux de proxénètes ou de traite n'ont pas eu à souffrir de leur action. Nous l'avons suffisamment rappelé tout au long de nos débats.
Enfin, outre ses conséquences sur la santé publique, la pénalisation ne permet pas de contenir le développement de la prostitution, comme l'ont montré de nombreuses études et comme l'a notamment rappelé la Commission mondiale sur le VIH et le droit, affiliée à l'Organisation des Nations unies, à la lumière de l'exemple suédois.
En ce qui concerne la lutte contre le proxénétisme, le texte comporte quelques mesures qui méritent d'être saluées mais qui restent tout à fait insuffisantes. Je le dis d'autant plus volontiers que certaines d'entre elles sont inspirées d'amendements que j'ai défendus et que vous avez bien voulu voter.
Ainsi, le dispositif permettant de régulariser les victimes du proxénétisme en échange de leur témoignage fait partie des points dont nous avons débattu et sur lesquels nous sommes tombés d'accord, même si nous ne placions pas le curseur au même endroit.
L'article 1er ter, qui organise l'accompagnement des victimes grâce à une identité d'emprunt et à un suivi au long cours afin d'échapper aux réseaux, s'inspire de deux amendements du groupe Écologiste sur la domiciliation et l'identité d'emprunt. J'ai eu l'occasion de le dire au cours des débats, cela témoigne de la qualité de l'écoute qui a parfois prévalu au sein de notre Commission – d'autant plus notable qu'elle n'a pas toujours été la règle.
S'agissant du parcours de sortie de la prostitution, la formulation du Sénat me paraît plus réaliste que celle de l'Assemblée ; je regrette donc votre amendement visant à la supprimer. Nous en avons plusieurs fois discuté, il faut avoir conscience du fait que l'on n'arrête pas la prostitution du jour au lendemain ; dès lors, il est délicat de subordonner le bénéfice du parcours de sortie à la cessation définitive de cette activité. Il est dommage que vous n'ayez pas changé d'avis sur ce point alors que le Sénat avait opéré quelques avancées.
En ce qui concerne l'admission au séjour des étrangers victimes de la traite et du proxénétisme, le Sénat a également apporté plusieurs modifications substantielles à l'article 6. Sur ce point également, nous avons eu quelques désaccords. Là encore, le Sénat m'a semblé plus réaliste que notre commission spéciale lorsqu'il a porté de six mois à un an la durée de l'autorisation provisoire de séjour. Sur la question de la sortie de la prostitution également, nos collègues sénateurs, même s'ils ont buté sur la proposition très polémique et doctrinaire que vous portiez, ont peut-être su faire preuve de davantage de réalisme que notre commission spéciale.
Je m'étonne enfin que, s'agissant des dispositions de l'article 1er concernant le blocage administratif des sites Internet, dont vous faisiez la pierre angulaire de la lutte contre les réseaux de proxénétisme et de traite, vous persistiez dans l'erreur alors que vous avez déjà dû faire marche arrière en séance, à la suite d'un amendement de suppression du Gouvernement. Je vous avais invités à le faire dès l'examen en Commission, mais vous vous y étiez refusés. J'avais également dû en appeler à la commission des Finances puisque vous vous étiez affranchis de l'article 40 de la Constitution malgré les avertissements qui vous avaient été adressés.
Le débat doit se concentrer désormais sur l'accompagnement et sur la sortie de la prostitution. Sur la pénalisation, nous ne tomberons pas d'accord. Nous ne voterons pas ce texte. Je vous l'ai dit au début de la discussion, voici vingt-quatre mois : cette position est idéologique, doctrinaire, elle fait fi des travaux des associations qui accompagnent sur le terrain celles et ceux qui vivent de la prostitution et de ceux qui sont menés en sciences humaines – il est vrai que c'est à la mode de s'asseoir sur ces outils de compréhension et d'analyse du réel, si l'on en croit certaines déclarations des plus hautes personnalités de l'État ! Mme la rapporteure s'inscrit bien dans cette tendance. Pour ma part, ce qui m'intéresse, c'est bien de comprendre le réel.
Je voudrais d'abord remercier très sincèrement M. le président et Mme la rapporteure d'avoir animé des débats d'une si haute qualité. Voilà qui nous a permis d'avancer ensemble, en nous écoutant, et qui va sans doute nous permettre d'arriver en 2016 au terme de ce long chemin entamé dès 2011, avec la mission constituée au sein de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, autour de Mme Danielle Bousquet et, déjà, de M. Guy Geoffroy.
Contrairement à ce que vient de dire notre collègue, l'ensemble des travaux de notre Commission nous ont permis de mieux comprendre le réel, de partir de la réalité de ce qu'est la prostitution, loin des clichés et des images sympathiques que l'on a pu en donner au cours de l'histoire pour avaliser la domination de l'homme sur la femme et l'idée que la femme puisse être consentante en étant l'objet des désirs masculins. Comprendre le réel, c'était aussi comprendre la violence faite aux victimes de la prostitution – une prostitution fondée sur les réseaux, sur la traite, sur l'incapacité à se défendre de jeunes filles sans papiers. Oui, c'est bien cette réalité qui a renforcé notre ambition abolitionniste, parce que nous voulons mettre un frein à cette violence faite aux femmes.
Il y a dans ce texte plusieurs éléments essentiels. D'abord, l'inversion de la charge pénale : la prostituée est victime, le coupable est le client ; c'est pourquoi il faut le pénaliser. Cette disposition va servir d'outil pour modifier le regard de la société sur la prostitution. Voilà la clé de la pénalisation : non le montant de l'amende, mais bien cette affirmation que la victime, c'est la prostituée, et que le client est coupable d'acheter le corps humain.
Mais, au-delà de la pénalisation du client, la loi comporte un autre volet qu'il faut aussi mettre en valeur : la prévention, et surtout l'accompagnement à la sortie du système prostitutionnel, pour que la prostituée ou le prostitué – car, ne l'oublions pas, des hommes sont eux aussi victimes de ce système – puisse retrouver sa liberté, sa dignité, et prendre la place qui lui revient dans la société.
Enfin, nous montrerons par ce texte les beaux résultats que peut produire le travail parlementaire, si souvent décrié.
Comme présidente de la délégation aux droits des femmes, je me réjouis que l'année 2015 ne se termine pas sans que nous ayons reparlé de ce texte sur lequel nous avons tant travaillé et à propos duquel la délégation s'est tant impliquée. Je remercie le président et la rapporteure du travail commun qu'ils ont mené jusqu'au bout, jusqu'au résultat que nous avons sous les yeux.
Je souhaite que l'examen en séance publique, prévu à l'Assemblée le 27 janvier, soit suivi peu après par un examen au Sénat, de sorte que nous puissions dire, dès le premier trimestre 2016, que la France est un pays abolitionniste. L'Europe l'attend, et ce sera un puissant signal non seulement pédagogique et symbolique, mais réel, comme l'a dit Marie-George Buffet, de notre volonté de lutter contre la traite et pour le droit des femmes – et des hommes concernés – à disposer de leurs corps, c'est-à-dire à ne plus être les esclaves de marchands.
La loi comporte quatre volets : elle forme un tout que l'on ne saurait réduire à la pénalisation du client, même si l'inversion de la charge pénale est essentielle, en particulier du point de vue pédagogique.
Contrairement à ce qu'a affirmé notre collègue Sergio Coronado, la lutte contre le proxénétisme existe ; elle est intense et s'est accentuée. Ainsi, en novembre encore, et jusqu'au début du mois de décembre, des arrestations ont eu lieu au sein des réseaux de proxénètes, jusqu'en Essonne. Nous avons une loi contre le proxénétisme qui est bien rédigée. Nous devons désormais renforcer la lutte contre ces réseaux dans toutes ses dimensions.
Je le répète au nom de la délégation aux droits des femmes, il n'est pas question ici de « travailleurs du sexe ». Nous nous opposons à cette appellation et à son utilisation en France : il ne s'agit pas d'un travail ; il n'y a là ni convention collective, ni formation, ni métier que l'on pourrait choisir et qui déterminerait une place dans la société. Nous devons être d'autant plus vigilants qu'aujourd'hui des lobbies s'introduisent à l'ONU pour tenter d'intégrer cette terminologie aux textes des Nations unies. Nous sommes abolitionnistes et, pour nous, il s'agit de personnes prostituées, en aucun cas de travailleurs libres du sexe.
Je me félicite du travail accompli. Attelons-nous vite à ce qui nous reste à faire, puis demandons à nos collègues du Sénat de s'emparer très rapidement des quelques dispositions qui resteront en discussion, avant la lecture définitive.
Je ne saurais mieux dire que Catherine Coutelle, Marie-George Buffet et Maud Olivier. Le terme de « travailleur du sexe » est terrible en ce qu'il donne le sentiment qu'il s'agirait de travailleurs indépendants comme les autres et laisse croire qu'il n'existe à cet égard aucune responsabilité de la collectivité, de la société. Or s'agissant du corps humain, de son exploitation, de son usage par ou pour quelqu'un d'autre, la responsabilité collective, traduite dans la loi, doit impérativement être affirmée. On ne peut pas laisser le corps humain, une personne humaine livrée aux besoins du marché, fût-elle consentante – ce qu'elle est d'ailleurs très rarement : elle est la proie des réseaux, la victime d'une exploitation, l'objet d'un commerce qui profite à d'autres, que ce soit officiellement, sous la forme de la fraude et du banditisme, ou officieusement, par le biais d'un arrangement.
Ce texte est essentiel, parce qu'il pose en principe le fait que l'utilisation du corps d'autrui ne peut échapper à la loi, expression de la responsabilité collective. En l'affirmant, et en se déclarant ainsi abolitionniste, la France fait oeuvre humaine, comme nous l'avons fait avec l'accord de Paris qui vient de conclure la COP21.
Monsieur le président, madame la rapporteure, madame la présidente de la Délégation aux droits des femmes, au nom du groupe Socialiste, républicain et citoyen, je tiens à vous remercier de votre engagement et de votre ténacité depuis plus de deux ans. Cette proposition de loi, dont l'enterrement avait été maintes fois pronostiqué par certains observateurs, va bel et bien devenir la loi de la République.
La commission mixte paritaire a échoué, notamment sur la responsabilisation du client, qu'il nous appartient aujourd'hui de rétablir. Cette proposition de loi n'est pas seulement un texte sur la pénalisation du client : c'est un texte d'émancipation des femmes et des hommes qui, dans leur immense majorité, n'exercent pas librement l'activité de prostitution et doivent être considérés comme les victimes d'un système de traite et d'exploitation qui réduit les êtres humains au rang de marchandises.
Nous devons nous féliciter que le coeur de cette proposition de loi, à savoir l'abrogation du délit de racolage, lequel faisait de ces victimes des coupables, soit aujourd'hui définitivement acquise. Je veux remercier nos collègues sénateurs, notamment ceux qui, au centre et à droite, ont su dépasser les clivages traditionnels pour nous rejoindre.
Même si quelques arbitrages techniques subsistent, nos travaux vont aboutir à la création d'un parcours de sortie de la prostitution, assorti de dispositifs protecteurs, notamment en matière de logement et de droit au séjour, ce qui amènera les acteurs de la société civile accompagnant ces personnes à jouer tout leur rôle.
Je reviendrai plus précisément dans nos débats sur l'article 16, qui continue de nous diviser. L'enjeu de cet article n'est pas la sanction, mais l'éducation. Or l'éducation implique de poser des principes et des interdits. La liberté de disposer de son corps n'est pas la liberté de disposer du corps d'autrui, le corps humain n'est pas une marchandise et il ne pourra y avoir d'égalité entre les hommes et les femmes tant que la société tolérera que les désirs sexuels peuvent faire l'objet d'un marché où les uns seraient des sujets et les autres des objets.
Alors oui, si ces principes de liberté et d'égalité nous guident, nous devons poser un interdit et dire clairement que le système de traite et d'exploitation des êtres humains, que nous voulons résolument combattre, n'existerait pas s'il n'y avait pas de client.
Je vous remercie, mes chers collègues, de vos interventions : elles nous encouragent à avancer.
Pour m'être rendue récemment à Bruxelles, où j'étais invitée pour parler de ce texte, je peux vous dire que nos voisins européens nous regardent et seront très attentifs à ce que nous allons décider.
Rappelons aussi que nous luttons contre le terrorisme ; or ce terrorisme se nourrit de l'argent de la prostitution dépensé par les clients. Dans ces conditions, comment peut-on avoir un double discours et supporter que la prostitution soit autorisée ? La lutte contre le terrorisme doit passer par tous les moyens, y compris par la lutte contre la prostitution.
La Commission passe à l'examen des articles restant en discussion de la proposition de loi.
Chapitre Ier Renforcement des moyens de lutte contre le proxénétisme et la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle
Article 1er (art. 6 et 6-1 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique) : Renforcement de la lutte contre les réseaux de traite et de proxénétisme agissant sur Internet
La Commission est saisie de l'amendement CS1 de M. Sergio Coronado.
Le I de l'article 1er propose que soit étendue l'obligation faite aux hébergeurs et fournisseurs d'accès à Internet (FAI) de mettre en place des dispositifs de signalement des contenus illicites ayant trait à la traite et au proxénétisme. L'alinéa ne vise pas à interdire ces contenus, qui peuvent déjà être bloqués, mais seulement à instaurer une obligation spécifique pour les FAI et les hébergeurs. Or, conformément à la loi pour la confiance dans l'économie numérique, c'est la Plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (PHAROS) qu'il convient de privilégier.
Le II de l'article propose d'instaurer un blocage administratif des sites proposant un accès à la prostitution. Or cette disposition a été votée contre l'avis du Gouvernement.
Mon amendement propose donc de supprimer dès à présent l'article 1er, ce qui nous éviterait d'attendre un amendement de suppression du Gouvernement en séance publique, qui ne manquera pas d'être adopté par une majorité que l'on sait disciplinée…
Avis défavorable.
Effectivement, des signalements peuvent être faits sur le portail officiel de signalement des contenus illicites qui dépend du ministère de l'intérieur. Néanmoins, il me semble important d'impliquer toute la société, y compris les FAI, dans la lutte contre la traite des êtres humains.
Sur le deuxième point, nous sommes d'accord. Cela étant dit, monsieur le député, ce n'est pas une question de doctrine ; attendons de voir ce que donnera le blocage des sites dont les contenus appellent au terrorisme ou ont un caractère pédopornographique. Peut-être pourrons-nous plus tard introduire le blocage des sites sur la traite des êtres humains.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques CS2 de M. Sergio Coronado et CS3 de Mme Pascale Crozon.
Au vu de l'importance prise par les technologies de l'information dans la promotion du proxénétisme, chacun est bien conscient de la nécessité de lutter contre cette forme de cybercriminalité. Cependant, nos débats sur l'article 1er portent sur les moyens à mettre en oeuvre pour lutter contre cette violence, notamment le blocage administratif des sites, sur lequel notre commission spéciale et le Gouvernement avaient émis des avis divergents lors des précédentes lectures.
Mon amendement CS3 propose donc de revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale, qui représente une voie médiane, la responsabilisation des hébergeurs et des éditeurs de contenus dans les mêmes conditions que celles actuellement en vigueur, par exemple en matière de contenus incitant à la haine raciale. Le Sénat nous invite à aller au-delà, en permettant le blocage administratif des sites, comme nous le faisons pour la pédopornographie et l'apologie du terrorisme ; mais comme le Gouvernement l'a rappelé en deuxième lecture, nous devons éviter d'étendre ce dispositif – qui reste un dispositif d'exception et qui doit donc être étendu aux infractions pénales au fur et à mesure des textes que nous examinerons – tant que nous ne disposons pas du recul suffisant.
La Commission adopte les amendements identiques.
Puis elle adopte l'article 1er modifié.
Article 1er ter (art. 706-40-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Protection des personnes victimes de la traite des êtres humains et du proxénétisme
La Commission est saisie de l'amendement CS22 de la rapporteure et de M. Guy Geoffroy.
Cet amendement vise à rappeler que l'article 62 du code de procédure pénale, aux termes duquel une personne peut être entendue par les enquêteurs sans faire l'objet d'aucune incrimination ni mesure de contrainte, s'applique à la personne prostituée. En effet, l'article 1er ter affirme que cette personne prostituée est protégée, en bénéficiant d'un statut spécifique – qui n'est pas le statut de repenti – et qu'elle est une victime, en n'étant plus passible du délit de racolage. Nous proposons ainsi de maintenir une disposition qui avait été écartée par nos collègues sénateurs.
Je rappelle que lorsque nous avons voté la grande et belle loi du 9 juillet 2010 qui vise à rendre plus efficace la lutte contre les violences faites aux femmes, nous avons renoncé à nos amendements afin de voter un texte rigoureusement identique à celui adopté par nos collègues sénateurs. Ce faisant, nous souhaitions tenir l'engagement pris par le Premier ministre François Fillon et l'ensemble de l'Assemblée de voir cette loi tant attendue votée avant la fin du premier semestre 2010. Nous n'avons jamais regretté ce geste. Je propose aujourd'hui à nos collègues sénateurs, qui savent que nous les respectons malgré la procédure du « dernier mot à l'Assemblée nationale », de nous rejoindre en votant cette proposition de loi en termes identiques.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 1er ter modifié.
Chapitre II Protection des victimes de la prostitution et création d'un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle
Section I Dispositions relatives à l'accompagnement des victimes de la prostitution
Article 3 (art. L. 121-9 et L. 121-10 du code de l'action sociale et des familles ; art. 42 et 121 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure) : Création d'un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle
La Commission adopte l'article 3 sans modification.
Article 3 bis (art. L. 441-1 et L. 441-2 du code de la construction et de l'habitation ; art. 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement) : Extension de la liste des publics prioritaires pour l'attribution de logements sociaux
La Commission adopte l'amendement de coordination CS15 de la rapporteure.
Puis elle adopte l'article 3 bis modifié.
Article 6 (art. L. 316-1, L. 316-1-1 [nouveau] et L. 316-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) : Admission au séjour des étrangers victimes de la traite des êtres humains ou du proxénétisme
La Commission est saisie de l'amendement CS16 de la rapporteure.
Cet amendement a pour objet de rétablir la rédaction adoptée à l'Assemblée nationale en deuxième lecture : pour bénéficier d'une autorisation provisoire de séjour d'une durée minimale de six mois, la personne étrangère devra avoir cessé son activité de prostitution et non être simplement « engagée dans un processus de cessation de son activité ».
Nous avons parfois eu des désaccords réels avec le Sénat, sur la pénalisation ou sur le racolage. Mais, pour avoir suivi les auditions et les débats, je crois que la rédaction adoptée par la Haute assemblée tient ici compte d'une réalité : on n'arrête pas la prostitution du jour au lendemain. Cela exige du temps, un accompagnement. Et il est difficile de s'arracher à une activité lucrative quand on n'a pas de possibilité d'insertion sociale, ni l'espoir d'obtenir un travail et un titre de séjour stable. C'est un débat que nous avons eu, puisque je vous avais reproché de lutter autant contre les flux migratoires que contre le proxénétisme, madame la rapporteure.
Pourquoi revenir sur une disposition qui semble mieux prendre en considération la réalité ? Il ne me semble pas y avoir là une opposition de principe entre la rédaction adoptée au Sénat et l'orientation des débats de l'Assemblée. Pourquoi choisir une position si restrictive et finalement si peu réaliste, quand on connaît la difficulté des parcours de sortie de prostitution ?
La personne engagée dans un parcours de sortie de la prostitution sera évidemment accompagnée par l'État, nous l'avons vu, mais aussi par des associations.
La rédaction du Sénat présentait un danger : s'il suffisait de s'engager à sortir de la prostitution, et rien de plus, pour obtenir un titre de séjour, les réseaux auraient beau jeu de se servir de ce texte pour convaincre des personnes de venir se prostituer en France en expliquant que, sur la foi d'un simple engagement, il leur serait facile d'obtenir une autorisation de séjour. Il faut en effet être réaliste, et ne pas faciliter la tâche des proxénètes.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement l'amendement de coordination CS17 et l'amendement rédactionnel CS18 de la rapporteure.
Elle adopte alors l'article 6 modifié.
Article 9 bis (art. 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13, 222-24 et 222-28 du code pénal) : Aggravation des sanctions à l'encontre des personnes ayant commis des faits de violence à l'encontre de personnes prostituées
La Commission examine l'amendement CS19 de la rapporteure et de M. Guy Geoffroy.
Cet amendement propose de revenir à la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale. Je précise que cette formulation a été, dans son principe, acceptée par nos collègues sénateurs lors de la CMP. Nous savons qu'ils la maintiendront lors du nouvel examen du texte.
La Commission adopte l'amendement.
L'article 9 bis est ainsi rétabli.
Chapitre IV Interdiction de l'achat d'un acte sexuel
Article 16 (art. 225-12-1, 225-12-2, 225-12-3 et 611-1 [nouveau] du code pénal ; art. L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles) : Création d'une infraction de recours à la prostitution punie de la peine d'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe
La Commission est saisie de l'amendement CS14 de la rapporteure et de M. Guy Geoffroy.
Cet amendement vise à rétablir l'article 16, qui constitue le quatrième pilier de la proposition de loi : il crée, en effet, une infraction de recours à la prostitution. Cet article est indispensable à l'équilibre et à la cohérence du texte de loi. Il réaffirme clairement la position abolitionniste de la France et permet d'affirmer que nul n'est en droit d'exploiter la précarité et la vulnérabilité, ni de disposer du corps d'autrui pour lui imposer un acte sexuel par l'argent.
L'amendement CS14 tend par ailleurs à améliorer la cohérence de l'insertion des dispositions de l'article 16 dans le code pénal. Il n'est en effet pas possible de prévoir la contravention dans l'article 225-12-1 du code pénal, qui figure dans le livre II de ce code, dans la mesure où ce livre ne traite que des crimes et des délits contre les personnes, et que les contraventions sont prévues par le livre VI du code pénal.
L'amendement insère donc cette contravention dans la partie législative du livre VI, qui ne comporte pour l'instant aucun article. Sa numérotation correspond à celle utilisée pour les contraventions. Seul le délit constitué en cas de récidive figurera dans l'article 225-12-1 et dans le livre II du code pénal.
Depuis le début de nos travaux, nous avons affirmé collectivement notre conviction que les personnes prostituées doivent être considérées comme des victimes, et accompagnées dans un parcours de sortie de la prostitution. Nous nous sommes également entendus pour désigner les coupables : les proxénètes, et les réseaux de plus en plus mondialisés qui exploitent la misère.
Notre texte serait bancal s'il continuait de fermer les yeux sur l'existence d'un troisième acteur : les clients. Sans eux, ce marché, cette exploitation, ces violences, n'existeraient pas. Il existe d'ailleurs déjà en France une catégorie de clients qui commettent un délit : ceux qui recourent à la prostitution des mineurs. Or, on constate que dans bien des cas, l'intention délictuelle ne peut être retenue contre eux, car ils arguent qu'ils ignoraient l'âge de la personne prostituée, et qu'ils ne pouvaient dès lors avoir conscience qu'ils commettaient un acte interdit.
C'est là tout l'enjeu : faire prendre conscience, pour que nul ne puisse dire : « je ne savais pas ». « Je ne savais pas » qu'elle était mineure, « je ne savais pas » qu'elle avait été vendue par sa famille à un réseau, « je ne savais pas » qu'elle devait rembourser plusieurs milliers d'euros à ceux qui l'ont fait venir en France, « je ne savais pas » qu'elle exerçait cette activité sous la menace…
Nous sommes donc face à une alternative : fermer les yeux et tolérer que les clients soient des complices irresponsables ; ou bien distinguer clairement ce qui s'achète de ce qui ne s'achète pas. Le corps humain n'est pas une marchandise ; les services sexuels, pas plus qu'un organe ou une grossesse, ne doivent pouvoir s'acheter. Disposer librement de son corps, ce n'est pas vendre à autrui le droit d'en disposer.
Si nous ne posions pas ce principe, tout ce sur quoi nous sommes d'accord par ailleurs serait en réalité bien vide.
La Commission adopte l'amendement.
L'article 16 est ainsi rétabli.
Article 17 (art. 131-16, 131-35-1 et 225-20 du code pénal ; art. 41-1 et 41-2 du code de procédure pénale) : Création d'une peine complémentaire de stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels
La Commission examine l'amendement CS13 de la rapporteure et de M. Guy Geoffroy.
Cet amendement vise à rétablir l'article 17, qui crée un stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels ; ce stage peut constituer une peine complémentaire ou une alternative aux poursuites. Nous nous sommes inspirés de ce que réalise par exemple l'association pour le contrôle judiciaire en Essonne, qui organise des stages de sensibilisation destinés aux conjoints violents. Cela fonctionne plutôt bien, semble-t-il.
La Commission adopte l'amendement.
L'article 17 est ainsi rétabli.
Chapitre V Dispositions finales
Article 18 : Rapport du Gouvernement au Parlement sur l'application de la loi
La Commission adopte successivement l'amendement de conséquence CS20 et l'amendement CS21 de la rapporteure, qui tend à corriger une erreur matérielle.
Puis elle adopte l'article 18 modifié.
Le groupe Les Républicains prend évidemment position contre la prostitution. Néanmoins, nous avions soulevé certains problèmes, ce qui nous a conduits à nous abstenir sur la majeure partie du texte.
Je regrette profondément qu'il n'ait pas été possible d'arriver à un accord avec le Sénat. Peut-être le travail en amont n'a-t-il pas été suffisant. (Exclamations.) Je dis simplement que c'est dommage. Nous en revenons donc ce soir, à quelques modifications près, au texte initial.
Nous nous abstiendrons. Mais je ne minimise pas vos efforts, madame la rapporteure, monsieur le président, y compris dans la discussion avec nos collègues sénateurs.
Ma chère collègue, on peut dire beaucoup de choses sur ce texte, on peut s'abstenir, mais on ne peut pas dire qu'il n'a pas été travaillé !
Je vous ai peut-être mal comprise.
Mais je veux rappeler ici qu'au cours de la précédente législature, la délégation aux droits des femmes, sous la houlette de Mme Danielle Bousquet et M. Guy Geoffroy, avait déjà rendu un rapport sur ce sujet. L'Assemblée nationale a, en 2011, adopté une résolution à l'unanimité. Nous travaillons à cette proposition de loi depuis 2013, autrement dit depuis le début de la présente législature.
C'est donc un texte qui a fait l'objet d'un long travail. Nous avons auditionné des personnes qui ont vécu la prostitution et qui en sont sorties, mais aussi nombre d'associations, il est vrai très diverses.
Il existe, c'est vrai, un clivage idéologique au sein de ces associations. Mais nous avons vraiment vu la réalité de la prostitution et du système prostitutionnel. Nous avons mené un travail de longue haleine et son résultat est, je crois, de grande qualité. Chacun peut ensuite, naturellement, voter comme il l'entend.
Pour bien clarifier la situation, j'insiste sur le fait que le texte que je vais soumettre à votre vote est à très peu de mots près celui sur lequel nous avons travaillé avec nos collègues sénateurs, dans l'idée de le faire adopter par la CMP. Ce texte amélioré avait l'aval de la rapporteure du Sénat et il aurait été voté par une majorité des membres de la commission mixte paritaire. Je répète donc que nous n'avons pas aujourd'hui simplement rétabli le texte que nous avions adopté à l'Assemblée en deuxième lecture : nous allons voter un texte qui, conforme bien sûr pour l'essentiel à l'architecture globale, cohérente et équilibrée que nous avons bâtie dès l'origine de ce travail, apporte aussi des réponses aux attentes légitimes formulées par certains de nos collègues sénateurs comme par les élus locaux, qui s'inquiètent des répercussions en termes de sécurité et de tranquillité publiques que peuvent avoir certaines activités prostitutionnelles. Autrement dit, nous n'avons pas repris le texte que nous avions adopté en deuxième lecture ; nous votons un texte qui, à peu de choses près, était celui que tous les députés étaient prêts à accepter en CMP.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La séance est levée à 18 heures.