Intervention de Marie-George Buffet

Réunion du 16 décembre 2015 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-George Buffet :

Le rapporteur a essayé de traduire dans cette proposition de loi un engagement justifié en faveur de la promotion des langues régionales. La République française est, en effet, riche parce que diverse. Elle s'est construite en choisissant de faire de ses diversités un bien commun. Ni le français ni la nation française ne sont menacés par les langues régionales, ni d'ailleurs par les langues utilisées par les personnes issues des différentes immigrations. Souvent, les enfants arrivent en maternelle en étant déjà bilingues, ce qui est source d'un développement positif.

Que la France et son peuple puissent avoir une langue commune est indispensable pour permettre à chacun et à chacune d'accéder à égalité à tous les actes administratifs et politiques, à tous les débats et à toutes les prises de décision en commun. Dans le passé, faute d'avoir eu accès au français pour lire et écrire, une partie des Français et des Françaises ont été dominés par l'État central. Si parler, lire et écrire une langue commune a été facteur d'égalité, de liberté et de souveraineté populaire, cela ne s'oppose pas au rayonnement de notre patrimoine culturel dans sa diversité, dont font partie les langues régionales.

Nous étions favorables à la ratification de la Charte des langues régionales et nous souscrivons aisément à l'exposé des motifs de cette proposition de loi, qui rappelle ces mots du Conseil constitutionnel : « L'insertion des langues régionales dans le patrimoine constitutionnel s'inscrit dans une complémentarité avec l'article 2 de la Constitution qui fait du français la langue commune de la République ». C'est sur ce fondement qu'a été rédigé l'article 40 de la loi pour la refondation de l'école de la République : « Les langues et cultures régionales appartenant au patrimoine de la France, leur enseignement est favorisé prioritairement dans les régions où elles sont en usage. Cet enseignement peut être dispensé tout au long de la scolarité selon des modalités définies par voie de convention entre l'État et les collectivités territoriales où ces langues sont en usage. » Cet article semble assurer un équilibre entre, d'une part, l'exigence que le français soit la langue commune pour la démocratie et la souveraineté populaire et, d'autre part, le rayonnement des langues régionales. J'aimerais donc que le rapporteur nous éclaire sur les conséquences de l'ajout prévu par l'article 1er de sa proposition de loi, qui pourrait poser problème quant à la parité entre le français et la langue régionale.

S'agissant de l'élargissement des possibilités de subventions d'investissement des collectivités aux établissements privés, l'alinéa 11 de l'article 2 peut certes rassurer, puisqu'il prévoit que les financements que les collectivités pourraient accorder à l'enseignement privé bilingue ne sauraient dépasser ceux qu'elles accordent aux établissements publics. Toutefois, à mon sens, cet article demeure flou et gagnerait à être précisé. Il en va de même, à nos yeux, de l'article 5 relatif aux langues régionales dans les médias, qui mérite d'être approfondi, s'agissant notamment du financement.

L'article 4 ouvre une possibilité – et non une obligation – en laissant les régions libres de décider l'apposition de signalétiques bilingues. Je me réjouis qu'il ne rende pas obligatoire l'usage des langues régionales dans les actes administratifs et, surtout, qu'il ne contraigne pas les fonctionnaires à l'utiliser dans l'exercice de leurs fonctions.

En attendant les éclaircissements du rapporteur, les députés du Front de gauche s'abstiendront.

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