Intervention de Louis Gautier

Réunion du 2 décembre 2015 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Louis Gautier, secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale :

Monsieur Boisserie, les responsabilités que j'occupe m'engagent fortement, y compris personnellement, mais le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale n'est architecte et maître d'ouvrage que de la gestion des outils de crise : la gestion de la crise elle-même incombe aux autorités politiques – le Premier ministre et, sur le terrain, essentiellement le ministre de l'intérieur. Ceux qui sont chargés de l'action opérationnelle, ce sont les services de renseignement, de police, d'enquête judiciaire. Je n'entends pas confondre les registres. Cette formule visait simplement à montrer que le rôle du SGDSN consiste à définir, établir et actualiser pour le compte du Premier ministre les instruments de gestion de crise qui sont ensuite utilisés et développés par les services que j'ai cités.

L'hébergement des forces Sentinelle est une vraie préoccupation. Le ministère de la Défense y travaille, notamment avec le gouverneur militaire de Paris, afin de trouver des solutions adaptées et pérennes, en particulier à Paris et en région parisienne où se concentrent les effectifs.

Monsieur Audibert Troin, les mesures touchant les effectifs ont permis de revaloriser le contrat opérationnel de protection de manière à pouvoir déployer 7 000 soldats dans la durée, grâce aux rotations régulières, ce qui implique de disposer d'un réservoir de forces de 21 000 militaires.

Quant aux carrières militaires, c'est ainsi qu'elles ont été organisées ! Dans les faits, la majorité des militaires – notamment tous les militaires du rang - servent en vertu d'un contrat ; d'autres servent sous statut de militaire de carrière. Le service pour une période courte correspond d'ailleurs souvent au souhait de ceux qui sont recrutés comme militaires du rang : alors qu'ils peuvent le plus souvent rester huit ans, ils partent majoritairement au bout de cinq ans. Cette courte durée de service reflète donc une réalité sociologique plutôt qu'une situation subie. Elle est en outre utile dès lors que l'on veut une armée jeune. Ainsi beaucoup d'engagés décident-ils de mener une première carrière dans l'armée avant d'entamer une seconde carrière dans la vie civile. C'est la réalité des armées d'aujourd'hui. Mais ce modèle existait dès l'origine. Il a permis de préserver souplesse et dynamisme en évitant la déformation de la pyramide des âges et le vieillissement des armées.

Il existe aussi des contrats courts dans la police mais les parcours y sont plus organisés, du fait des nécessités du métier et de la conduite de la carrière sur l'ensemble du territoire national : on est d'abord affecté à certains postes, avant, l'expérience venant, de gagner en autonomie à d'autres postes.

Bref, ce sont deux métiers différents, sans être opposés. La logique de réservoir et le fait qu'aucun militaire ni aucune unité ne soient voués à des missions exclusivement sur le territoire national, mais qu'il leur soit ensuite possible de rejoindre le Mali ou une autre opération extérieure, fait partie de l'intérêt du métier militaire.

S'agissant de la réserve et de la garde nationale, notre réflexion actuelle implique de renforcer la réserve opérationnelle. C'est une question d'effectifs et de budget. Il convient également d'étudier la manière de la régionaliser davantage, de territorialiser son commandement et son emploi. Ce travail est encore en cours.

Sommes-nous en guerre sur le territoire national ? Mais c'est l'état d'urgence que vous avez voté, non l'état de siège ! En France, un djihadiste est un criminel. En revanche, la France est en guerre contre Daech. Ce n'est d'ailleurs pas elle qui a désigné son ennemi, mais lui qui a fait d'elle son adversaire, qui a porté des coups sur son territoire.

En ce qui concerne la coordination entre gendarmerie, police et soldats, vous avez raison : l'essentiel, c'est ce que l'on va faire sur le terrain ; comment définir et affiner, au niveau des zones de défense, puis au niveau local, le contact entre les officiers subalternes ou supérieurs qui gèrent une opération sur place, le sous-préfet et le commissaire de police ? La logique qui est à l'oeuvre est normale. La planification des moyens est plus hiérarchique, plus verticale, au ministère de la Défense, cependant que la définition de la mission suppose d'être au plus près du terrain et de ses besoins ; elle doit donc provenir de ceux qui savent où sont les points sensibles, les zones vulnérables, les noeuds routiers potentiellement problématiques, etc. Vu la manière dont se posent les problèmes et la difficulté à ajuster les moyens aux missions, c'est sur ce point qu'il nous faut travailler le plus, en identifiant les instances chargées de définir les besoins, puis celles auxquelles incombe l'arbitrage en cas de conflit.

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