Intervention de François Rochebloine

Séance en hémicycle du 12 janvier 2016 à 9h30
Questions orales sans débat — Conditions d'exercice de la profession de coiffeur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Le 1er décembre dernier, l’Union nationale des entreprises de coiffure lançait l’opération « J’aime con coiffeur » pour souligner combien, au sens propre, « Coiffeur, c’est un métier » – j’ajouterai, pour ma part, que c’est un beau métier. Cette opération a mobilisé des professionnels inquiets après des annonces surprenantes concernant l’éventuelle suppression de l’obligation d’obtention du brevet professionnel pour exercer l’activité de coiffeur.

Déréguler, libéraliser notre économie, ne nous pose pas de problème de principe ; nous pourrions même nous réjouir de cette conversion du Gouvernement à l’esprit d’entreprise. Mais le secteur de la coiffure ne manque pas de dynamisme : rappelons qu’il est le premier secteur de l’artisanat en France, avec 6,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires généré en 2013, pour 82 700 établissements regroupant pas moins de 168 000 actifs, dont 96 000 salariés. En cinq ans, on estime que le nombre d’entreprises du secteur a progressé de 25 %.

La coiffure est loin d’être un secteur en déclin et s’il souffre, comme d’autres, du poids de contraintes excessives et de charges trop nombreuses, comme le RSI – le régime social des indépendants –, le Gouvernement lui-même a d’ores et déjà pris des mesures visant à diminuer certaines charges sociales, notamment dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Dans ce contexte, pourquoi remettre en cause ce qui fonctionne bien ? Pourquoi déstabiliser un secteur qui s’est fortement professionnalisé par la formation et l’apprentissage ? La coiffure est ainsi le deuxième secteur artisanal, après le bâtiment, à former des jeunes par la voie de l’apprentissage.

Dès lors, le Gouvernement ne se trompe-t-il pas de cible, en s’attaquant à la coiffure, alors que la réglementation en vigueur n’a pas été un frein au développement des entreprises et de l’emploi ?

En revanche, la suppression de l’obligation d’obtention du brevet professionnel pour l’installation est une vraie menace pour ce secteur déjà fragilisé par la concurrence des auto-entrepreneurs, lesquels représentent près de 20 % des coiffeurs.

La gestion d’un salon exige des compétences, le métier réclame des savoir-faire et de la technique – sans parler du respect des règles d’hygiène ou de la bonne utilisation de produits complexes.

En libéralisant à outrance, de quelle garantie les consommateurs disposeront-ils ? Les pouvoirs publics ne devraient-ils pas au contraire veiller à renforcer les contrôles et conditionner l’installation – dans les secteurs d’activité qui le nécessitent – à l’obtention de certificats de capacité et de diplômes professionnels, ce qui devrait être d’ailleurs notamment le cas dans la restauration ?

Or, lorsque je lis les déclarations de M. le ministre de l’économie concernant le diplôme qui n’aurait pas – je le cite – « le monopole de la compétence », les bras m’en tombent ! Vous-même, madame la secrétaire d’État chargée du commerce et de l’artisanat – mais la question pourrait être posée à Mme Macron –, seriez-vous prête à vous faire coiffer chez un professionnel non diplômé ? Je ne le pense pas et, comme je vous vois sourire, je constate que vous partagez mon sentiment – ce en quoi vous avez raison.

S’il s’agit de revoir les règles de valorisation de l’expérience, je pense que les professionnels qui assurent les formations sont les mieux placés pour formuler des propositions.

Aussi, madame la secrétaire d’État, face à toutes ces objections de bon sens et sachant que plusieurs exigences se mêlent – qualité du service et des prestations, hygiène et sécurité du consommateur, formation des jeunes, ou encore pérennité des activités –, je souhaiterais savoir si le Gouvernement est prêt à revoir sa position et à abandonner cette réforme qui ne peut que dévaloriser le beau métier de la coiffure.

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