On l’a rappelé, la France a été frappée par les terroristes en 2015, et la menace reste particulièrement présente. Notre pays a été frappé au coeur, mais ce sont aussi les valeurs universelles, celles de la République, qui ont été attaquées : la liberté d’expression, la liberté de croire ou de ne pas croire, l’égalité, un art de vivre.
Ces crimes ne sont pas des crimes ordinaires. Le terrorisme fauche les vies et ébranle les consciences ; il cherche à faire naître la peur, la haine, et finalement la guerre. Son projet ne s’arrête pas à l’assassinat : il cherche à défaire une société, à détruire les solidarités, à briser le contrat social.
Nous devons réagir et, comme chaque gouvernement face à des actes de guerre, nous le faisons à travers les moyens donnés à la police, à la gendarmerie et aux services de renseignement. Je pense également, bien sûr, à la mobilisation de nos armées et aux moyens supplémentaires qui leur sont aussi donnés ; à la mobilisation du peuple français, depuis plusieurs mois, sous des formes chaque fois différentes mais toujours avec le même courage ; au nouveau patriotisme, enfin, qui doit s’installer : les Français ont brandi, et avec quelle force, les couleurs nationales et ont chanté notre hymne, La Marseillaise.
Les auteurs de ces actes doivent être poursuivis et sanctionnés. L’honneur d’une démocratie, c’est de désigner le djihadisme et l’islamisme radical comme des idéologies mortifères, et c’est d’affirmer, avec la plus grande force, qu’elle combat le terrorisme sur tous les fronts.
Trois jours après les attentats, le Président de la République s’est exprimé devant le Congrès : sa tâche était de tout faire pour que l’unité nationale s’impose à un moment où tout pouvait vaciller. C’est la raison pour laquelle il s’est engagé sur la constitutionnalisation, d’abord, de l’état d’urgence, avant de proposer d’étendre la déchéance de nationalité à tous ceux qui, nés ou devenus Français, se sont rendus coupables d’un crime terroriste, sans pour autant créer des apatrides.
Cette possibilité existe déjà dans de nombreux pays ; en France, elle est inscrite dans le code civil. Oui, monsieur Chassaigne, la République prévoit, depuis des dizaines d’années, une possibilité de déchéance de nationalité. Personne ne remet cette mesure en cause : Bernard Cazeneuve et moi-même, dans nos fonctions de ministre de l’intérieur, y avons d’ailleurs eu recours.
L’extension de cette mesure ne porte pas atteinte aux valeurs républicaines, bien au contraire : elle a une valeur symbolique, hautement symbolique même, bien entendu ; mais elle a aussi des effets concrets. De toute façon, monsieur Chassaigne, quelle autre sanction un terroriste qui veut donner et se donner la mort pourrait-il craindre ? La prison ? Là n’est donc pas le sujet. Le sujet, pour la nation, est d’affirmer, à travers ce nouveau patriotisme, ce que nous sommes, nous, Français, autour de nos valeurs, celles d’un patriotisme généreux, qui n’exclut personne.
Aucun binational ne doit se sentir concerné par la mesure dont nous parlons, de même qu’aucun naturalisé – et j’en suis un, monsieur Chassaigne – n’a eu à se sentir concerné par les déchéances de nationalité que nous avons engagées.
Être Français, c’est au-delà du droit du sol ou du droit du sang, et c’est au-delà de la naturalisation : c’est appartenir à une communauté de valeurs, la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité, le respect de la loi.
Alors oui, face au nouveau monde dans lequel nous sommes entrés, face à l’instabilité que nous observons partout, nous devons affirmer ce qu’est la nation, ce qu’est le patriotisme, ce qu’est être Français, partout dans le monde, où l’on nous admire pour notre courage. Ce courage, c’est d’aller jusqu’au bout ; c’est de respecter la parole engagée par le Président de la République devant le Congrès ; car engager sa parole devant le Congrès, devant la nation tout entière, c’est être à la hauteur de ses responsabilités.