Je commencerai par aborder les questions de sécurité, non pas dans notre pays mais au Cameroun et en Centrafrique. J'ai visité la semaine dernière un camp de réfugiés centrafricains au Cameroun, petit pays qui accepte chez lui 250 000 réfugiés centrafricains – effort comparable à celui que font le Liban ou la Jordanie et à mettre en regard avec la faiblesse des chiffres d'accueil de réfugiés en Europe. J'y ai parlé avec une femme bororo peule centrafricaine, dont les propos m'ont ému au point que j'en ai eu les larmes aux yeux. Cette femme a quitté la Centrafrique après que son mari et ses enfants eurent été tués devant elle, et a certainement été violée une quinzaine de fois même s'il est impensable qu'elle le dise – a fortiori devant un étranger – de peur d'être rejetée. Or, les premiers mots qu'elle m'a adressés, en ce dimanche qui a suivi les attentats de Paris, ne concernaient pas les violences qu'elle avait subies mais la France : elle m'a fait part, dans sa langue, de sa peine de savoir que Paris était « en guerre », transposant à cette ville ce qu'elle avait vécu dans les campagnes. Je souhaite donc d'abord rendre hommage aux victimes des attentats et des guerres, aux réfugiés et aux femmes subissant des violences – tant celles de la guerre que du changement climatique.
Comme vous l'avez souligné, Madame la présidente, CARE est une grande ONG de solidarité internationale, intervenant tant en cas d'urgence que dans le cadre de programmes de développement. Une partie importante de nos projets étant aujourd'hui remise en cause par les impacts du changement climatique, nous devons faire évoluer ces programmes. Parmi les urgences, nous devons aussi prendre en compte le fait que la situation des femmes est encore plus difficile que celle des hommes. Il nous faut ainsi traiter ce que nous avons appelé la double injustice d'être à la fois une femme et une victime des dérèglements climatiques. Comme vous le savez, hommes et femmes n'ont pas la même capacité à agir ou à réagir en cas d'urgence ou de problème climatique. Cela va de soi dans cette salle, mais pas du tout dans l'esprit des dirigeants, ni forcément pour toutes les ONG. Faire comprendre la nécessité d'adopter une approche différenciée des situations est un véritable combat.
Les statistiques onusiennes correspondent à une réalité que je vois sur le terrain. Savez-vous nager, madame Coutelle ?