Intervention de Solange Mer

Réunion du 1er décembre 2015 à 17h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Solange Mer, présidente coordinatrice d'Action pour enfants oubliés, APEO :

Je suis fondatrice d'APEO, une organisation à but non lucratif qui travaille depuis onze ans dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), dans la province du Sud-Kivu, auprès des femmes et des enfants victimes des conflits armés. Je remercie Mme Claudy Vouhé d'en avoir parlé parce qu'il s'agit vraiment d'une cause oubliée.

Cette relation entre conflits et climat, nous la vivons concrètement dans les villages où nous intervenons sous l'égide du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA – Office for the Coordination of Humanitarian Affairs) de l'ONU qui organise l'action des nombreuses associations présentes sur le terrain. Nous participons aux réunions régionales des ONG.

Quand il y a des mouvements de population, les arbres sont coupés, les routes de desserte agricole deviennent inaccessibles et très peu d'ONG se rendent dans les villages d'où viennent les victimes. Or, il y a de nombreux problèmes à résoudre dans ces villages où restent des veuves et des orphelins. Les femmes parviennent à bénéficier de soins physiques après avoir parcouru des kilomètres et des kilomètres à pied, mais elles ont aussi besoin d'une prise en charge psychologique.

Actuellement, nous nous inquiétons beaucoup des inondations dues aux perturbations climatiques, phénomènes qui s'ajoutent aux conséquences des conflits armés. Pas plus tard que la semaine dernière, plusieurs écoles ont été inondées dans les villages. Des milliers d'enfants se retrouvent dehors, exposés au recrutement forcé, tandis que les jeunes filles sont souvent emmenées comme esclaves sexuelles. Ce double phénomène – conflits armés et dérèglements climatiques – touche directement les femmes qui sont des moteurs dans les villages où je travaille : le plus souvent ce sont elles qui vont chercher le bois et la nourriture pour la famille.

Nous avons lancé un programme baptisé MILKA, l'acronyme de « Champs, source de vie » en mashi, la langue parlée dans le Sud-Kivu (Mikolo l'ishwa l'iriba lya kalamo). Souvent victimes de viols sur leur lieu de travail, ces femmes n'osent plus retourner aux champs et nous les aidons à se soigner physiquement et psychologiquement. Nous faisons aussi de la formation car, sous l'influence d'ONG qui sont arrivées là avec des produits chimiques, elles ont délaissé puis oublié l'usage d'engrais organiques, tels que la bouse. Elles doivent réapprendre comment planter sur un petit lopin de terre de manière à manger aujourd'hui, demain et après-demain.

Malheureusement, nous n'avons pas beaucoup de moyens et ces femmes sont seules ; le gouvernement est loin ; elles sont livrées à elles-mêmes. S'il vous plaît, pensez à lier l'impact des conflits armés et des dérèglements climatiques lors de vos interventions, car ces phénomènes se conjuguent particulièrement en RDC.

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