L’idée n’est pas aujourd’hui de se tourner vers l’OMC, car ce n’est pas le sujet : le sujet est d’avoir une initiative au G7, au G20 et à l’OCDE pour conduire les Chinois à respecter les règles relatives au dumping. À court terme, c’est plutôt à nous de prendre des mesures de rétorsion, et ce sont ces mesures qui pourraient nous conduire à l’OMC.
Permettez-moi d’élargir quelques instants la discussion concernant la Chine. En vertu des accords signés il y a près de quinze ans, celle-ci serait en droit de demander le statut d’économie de marché – c’est le débat que nous aurons tout au long de l’année – à la fin de 2016. Si nous le lui refusions, elle serait sans doute conduite à porter des litiges devant l’OMC. Selon nos analyses, c’est dans ce contexte que l’on pourrait avoir un débat à l’OMC. À court terme, le moyen d’action le plus efficace n’est pas l’OMC, mais, je le répète, une discussion au sein du G7, du G20 et de l’OCDE sur les pratiques actuelles de la Chine, pour amener ce pays à réduire sa production et à cesser le dumping.
Or ces enceintes n’ont pas la capacité de décider de mesures de rétorsion. Les mesures de rétorsion sont conduites dans les enceintes européennes, en recourant aux quatre leviers que j’évoquais, parmi lesquels, au premier chef, la modernisation des instruments de défense commerciale – il nous faut accélérer la mise en oeuvre de ce qui a été décidé en 2013 – et toutes les mesures permettant, à court terme, de pratiquer des saisies et de raccourcir le délai maximum de neuf mois qu’une procédure anti-dumping normale nous contraindrait de respecter. Les leviers européens sont donc essentiels, et nous les privilégions en même temps que ceux du G7, du G20 et de l’OCDE.
Peut-être aurons-nous aussi des conflits à l’OMC, soit que nous disposions de la base légale pour les intenter – mais les procédures sont trop longues pour les entreprises concernées –, soit que les Chinois engagent eux-mêmes des procédures sur tel ou tel point.
Les règles environnementales et sociales constituent également un levier d’action, complémentaire de nos autres dispositifs juridiques. Là encore, nous devons porter ces critères devant le G7, le G20 et l’OCDE pour qu’ils soient respectés par les groupes chinois. Nous savons bien qu’il y a là un différentiel de compétitivité très fort. Il faudra du reste le prendre en compte dans le débat que nous aurons collectivement sur le statut d’économie de marché : on ne peut bénéficier d’un statut d’économie de marché au titre de l’OMC si cela n’emporte pas des règles homogènes concernant toutes les externalités, comme disent les économistes, que celles-ci soient environnementales, sociales ou autres, ainsi que des pratiques égales en matière de non-subventionnement. À défaut, il y a, comme aujourd’hui, une réelle distorsion de concurrence.
Je souscris donc à vos arguments, monsieur le président Chassaigne, mais ils ne permettent pas d’amener à des effets de rétorsion.
Je ne sais – nous pourrions poursuivre ce débat, mais j’ai largement dépassé les deux minutes qui m’étaient imparties – si la situation de la sidérurgie doit nous conduire à revoir en profondeur le logiciel capitaliste et tout ce qui s’ensuit. En l’espèce, je dirais plutôt que le diable a été introduit par des groupes et une économie qui ne me paraissent pas représenter la quintessence du capitalisme financier !