Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements qui visent à rétablir l’article 2 de la proposition de loi initiale, qui avait été supprimé par la commission. Cet article est contraire à nos principes constitutionnels.
En effet, les dispositions de l’article L. 151-4-1 qu’il est proposé d’introduire dans le code de l’éducation ne satisfont pas les conditions posées par le Conseil constitutionnel dans une décision du 13 janvier 1994 ; cet article ne peut donc être regardé comme conforme à la Constitution. Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a jugé que, si le législateur peut prévoir l’octroi d’une aide des collectivités publiques aux établissements d’enseignement privé, les aides allouées doivent, pour être conformes aux principes d’égalité et de liberté, obéir à des critères objectifs. En l’espèce, la condition de dispenser un enseignement laïc écarte sans aucune justification les écoles privées confessionnelles, alors même que la plupart d’entre elles sont associées au service public de l’éducation par la conclusion d’un contrat d’association, et se soumettent de ce fait à des obligations fixées par l’État, dont ce dernier assure le contrôle.
Par ailleurs, le fait de dispenser un enseignement bilingue en langue régionale ne peut être regardé comme un critère objectif de financement des écoles privées permettant d’exclure le financement des écoles privées qui ne dispensent pas un tel enseignement, alors même que l’enseignement des langues régionales est et ne peut être que facultatif, comme l’a rappelé à plusieurs reprises le Conseil constitutionnel. L’enseignement des langues régionales ne peut donc être regardé comme un critère objectif permettant d’établir une différence entre les écoles privées ; c’est d’autant plus vrai, compte tenu des réserves du Conseil constitutionnel, pour la méthode de l’enseignement en immersion.
En outre, les garanties prévues aux trois derniers alinéas du projet d’article L. 151-4-1 ne peuvent pas être considérées comme suffisantes au regard des exigences constitutionnelles rappelées par la décision de 1994 que j’ai citée tout à l’heure. Aux termes de cette décision, en effet, il revient au législateur de prévoir les garanties nécessaires pour prémunir les établissements d’enseignement public contre les ruptures d’égalité à leur détriment, au regard des obligations particulières que ces établissements assument, en encadrant strictement cette aide. Or les dispositions prévues par ces amendements se bornent à reprendre le considérant de la décision du Conseil constitutionnel de 1994, et demeurent très abstraites : aucun plafond d’aides n’est fixé, aucune distinction n’est expressément formulée entre les établissements privés sous contrat et hors contrat, ni entre les établissements sous contrat d’association et les établissements sous contrat simple.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.