… texte qui a été inscrit dans la précipitation et étudié dans des conditions assez rocambolesques alors que notre commission avait déjà beaucoup de travail au mois de septembre : nous avons suffisamment dénoncé à l'époque les conditions dans lesquelles nous avons dû travailler.
Surtout, ce texte n'a pas été précédé d'une étude d'impact et c'est bien dommage, parce que dans tous les pays où il y a eu une étude d'impact, où on s'est vraiment intéressé au sujet, on a fini par mettre de côté ce qui apparaît il est vrai, au premier abord, comme une belle idée. En réalité, tous ceux qui se sont réellement intéressés à la question ont vite refermé le dossier pour passer à autre chose. Nous n'avons pas eu cette chance puisqu'il n'y a pas eu d'étude d'impact. C'est une proposition de loi et il n'y a pas d'études d'impact pour les propositions de loi, mais on aurait peut-être pu prendre le temps de la réflexion et peut-être se renseigner, travailler un peu plus au fond.
Il n'y a pas eu non plus, et c'est beaucoup plus choquant, de consultation et de débat. Ce texte intéresse les élus locaux, les associations d'élus locaux n'ont absolument pas été consultées ; ce texte intéresse les organismes comme l'ADEME ou l'ANAH, ils n'ont pas été consultés ; ce texte intéresse les associations de consommateurs, elles n'ont pas été consultées et sont d'ailleurs, dans l'ensemble, hostiles à ce texte. Les associations de protection de l'environnement, comme Sauvons le climat, ont dénoncé également ce texte. Les syndics par exemple, puisqu'il est beaucoup question des copropriétés, n'ont pas été consultés. Je recevais ce matin le président de la FNAIM, je lui disais : « Mais bien évidemment vous avez été reçu pour ce texte, puisqu'il est question de mettre en place un système pédagogique qui va permettre de repérer les logements qui sont mal isolés. » Il m'a répondu : « Je n'ai pas besoin du bonus-malus pour vous dire quels sont les logements qui sont mal isolés, on a déjà ces informations. » Si on avait pris la peine d'écouter les représentants des syndics, peut-être aurait-on finalement renoncé à ce texte ou l'aurait-on rédigé autrement.
Pour une majorité qui se veut à l'écoute, qui prétend légiférer autrement, c'est quand même assez incroyable et je veux le dénoncer avec force à cette tribune.
Il y a aussi un gros problème de calendrier. On n'y comprend absolument plus rien, puisque, la ministre l'a rappelé, il y a actuellement un débat important sur la transition énergétique et je ne peux que m'en féliciter au nom de l'UMP : bien évidemment, il faut travailler à la transition énergétique, bien évidemment nous avons en face de nous un double problème qui est l'augmentation des prix de l'énergie et la raréfaction de certaines ressources. Il faut passer à autre chose et cela suppose une mobilisation de tous. Mais pourquoi, d'un côté, engager ce débat et puis, sans attendre les conclusions de ce débat, légiférer sur une question qui lui est forcément reliée ? D'ailleurs, je ne comprends même pas que vous puissiez défendre un texte qui porte un tel titre.
Au départ, c'était un texte sur la tarification progressive. On a dit : « Attendez, vous êtes en train de toucher aux tarifs, est-ce conforme au droit européen ? » Alors, panique à bord, on a changé de titre. On appelle cela autrement, mais le contenu reste le même et la question de la conformité au droit européen reste la même : l'avis du Conseil d'État, d'ailleurs, ne me semble pas très convaincant.
On est passé de la tarification progressive à – accrochez-vous – la « transition vers un système énergétique sobre ». Puisqu'il est question de transition énergétique, madame la ministre, demandez à ce que ce texte soit retiré. Attendons que le débat sur la transition énergétique ait eu lieu. Cela n'a absolument aucun sens : c'est même une véritable provocation à l'égard de ceux qui travaillent sur la transition énergétique. Comment peut-on nous demander de légiférer sur la « transition énergétique » alors que vous-mêmes vous menez un débat et une concertation sur la transition énergétique ? Je ne comprends pas.
On peut commettre des erreurs. L'affaire a été mal engagée : eh bien, reconnaissez cette erreur, retirez ce texte, laissons le débat sur la transition énergétique aller à son terme et revenez devant nous avec un texte qui soit global et équilibré.
Ce texte est aussi impréparé quant à son périmètre : on voit bien qu'au fil des semaines, des mois, on a ajouté des choses. Au départ, il y avait principalement le bonus-malus et la tarification progressive, c'était d'ailleurs le titre de la proposition de loi. Et puis on nous a ajouté la trêve hivernale. Pourquoi pas ? Mais nous aurions pu régler ce problème de la trêve hivernale autrement et bien plus rapidement, sans s'encombrer d'un dispositif aussi complexe et sans perdre autant de temps. Sur la trêve hivernale, j'étais prêt avec vous à travailler et à avancer, comme sur le tarif social, bien sûr. Mais en mélangeant bonus-malus et tarif social, vous mélangez des questions qui n'ont pas à être associées et vous nous mettez les uns et les autres mal à l'aise. Vous essayez de faire voter certains qui ne voudraient peut-être pas voter le bonus-malus et parce qu'il y a le tarif social, vous allez peut-être arriver à les contraindre à voter votre texte. Franchement, c'est une manoeuvre politicienne, peut-être habile, mais je la dénonce ici, car ce sont des questions qui n'avaient pas à être associées : il n'y a rien à voir entre le bonus-malus et la trêve hivernale. Expliquez-moi le lien, madame la ministre, entre la trêve hivernale et la « transition vers un système énergétique sobre ». Je ne vois vraiment pas le lien.