Intervention de Frédérique Massat

Séance en hémicycle du 17 janvier 2013 à 21h30
Tarification progressive de l'énergie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédérique Massat :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce texte revêt un aspect révolutionnaire, car il bouleverse nos repères, nos curseurs et aura des effets sur notre façon de consommer l'énergie. Merci à François Brottes d'en être le porteur.

Ce n'est pas un simple bonus-malus, comme celui taxant les véhicules, mais c'est un véritable changement dans notre modèle français. Il est urgent de construire ensemble un modèle qui implique les citoyens dans une démarche nouvelle. Notre salut énergétique doit s'articuler autour de plusieurs impératifs : la maîtrise de l'énergie, la sobriété, les énergies renouvelables et la solidarité.

La politique énergétique que nous voulons devra venir en aide à ceux qui vivent dans la plus grande précarité. Ils ont trop souffert de l'augmentation du prix de l'énergie, en la subissant faute de pouvoir être aidés.

Nous souhaitons donc sanctuariser les tarifs sociaux et les étendre, en faisant passer le nombre de foyer bénéficiaires de 650 000 à 4,6 millions ! C'est aussi pour protéger les plus faibles que nous proposons l'instauration d'une trêve hivernale pour tous.

Notre politique énergétique devra aussi être plus juste. C'est un des objectifs du dispositif de bonus-malus. Dorénavant, l'électricité qui servira à chauffer une famille modeste coûtera moins cher que celle qui sert à chauffer la piscine d'une famille aisée. Actuellement, la facture d'électricité des 20 % des Français les plus modestes pèse deux fois et demie plus que celle des 20 % des ménages les plus aisés. Nous ne pouvons accepter cela.

Les critiques caricaturales de l'opposition sur ces dispositifs sont nombreuses, mais infondées. Notre volonté est de repenser notre consommation d'énergie, pas de sanctionner ceux qui vivent dans des « passoires énergétiques ». Ils sont les premiers à souffrir de la mauvaise isolation de leurs logements et de la vétusté de leur mode de chauffage. Pour ces derniers, il faudra donc mener un travail d'identification et de rénovation. Il sera mené par un service public de la rénovation de l'habitat, pour rendre ces logements moins énergivores et éviter ainsi la double peine.

Il s'agit donc de responsabiliser les Français en les invitant à opter pour un mode de consommation plus vertueux. Ceux qui consommeront moins, grâce au dispositif de bonus-malus, verront leur facture se réduire. Ceux qui auront un comportement moins responsable seront pénalisés.

Cette responsabilisation à travers un dispositif pédagogique est une nécessité. Nous devons sortir de la spirale infernale du « consommer plus ». Nos ressources en hydrocarbures et en matières premières sont limitées, et nous sommes encore loin de pouvoir compter sur les énergies renouvelables pour répondre à nos besoins ! Consommer davantage coûtera plus cher. Il faut arrêter le principe du « plus on consomme, moins c'est cher » et entrer dans la boucle vertueuse, pour le portefeuille comme pour notre environnement : moins on consomme, plus on est récompensé.

La structure des tarifs, la péréquation, ne sont pas impactées par cette loi. On ne modifie pas la structure des tarifs, il faut le répéter. Concernant la péréquation, c'est la même chose : le bonus-malus ne menace pas la péréquation tarifaire, au contraire! Le système actuel défavorise les populations des territoires où il fait froid. Je pense en particulier aux zones de montagnes, où, dans certaines communes, à plus de 1 500 mètres d'altitude, le chauffage est allumé du 15 août au 1er juillet. Aujourd'hui, que vous ayez besoin de vous chauffer onze mois sur douze ou trois mois sur douze, vous payez l'énergie de façon indifférenciée. Demain, grâce à ce nouveau dispositif, les inégalités subies face aux besoins énergétiques seront corrigées.

Enfin, cette proposition de loi ne se limite pas au « consommer mieux » ou au « consommer moins ». Elle traite aussi du « produire mieux », via des dispositions visant à assouplir les conditions d'implantation de l'éolien terrestre dans notre pays, qui a pris un important retard dans ce domaine. Ainsi, aujourd'hui, nous sommes loin des 1 300 mégawatts annuels qui sont nécessaires pour atteindre l'objectif, fixé par le Grenelle de l'environnement, de porter à 23 % la part des énergies renouvelables à l'échéance 2020.

Il faut donc lever les freins qui entraînent cette stagnation du développement de l'éolien, sans négliger ni la concertation avec les élus et les populations, ni l'information.

Si la création des ZDE en 2005 correspondait à une nécessité de planifier l'éolien, les dispositifs nés de la loi Grenelle, avec les schémas régionaux éoliens opposables et le régime ICPE, s'y substituent et, de ce fait, justifient leur suppression. On reproche à notre pays de crouler sous l'empilement des normes. Pour une fois qu'un texte législatif s'attache à faire le ménage, on peut le saluer.

Ce texte pose une première pierre dans le chantier ambitieux que vous avez commencé, madame la ministre. La conférence environnementale en posera une deuxième. D'autres viendront, et d'abord le débat sur la transition énergétique. Vous pourrez compter sur les députés socialistes pour vous accompagner dans la construction de la politique énergétique plus juste, plus efficace et plus responsable que vous appelez de vos voeux, tout comme nous accompagnons aujourd'hui cette proposition de loi, qui, j'en suis persuadée, cette fois-ci, arrivera jusqu'au bout. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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