Intervention de Fabrice Verdier

Réunion du 12 janvier 2016 à 16h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabrice Verdier :

Le projet de loi pour une République numérique que nous nous apprêtons à examiner aujourd'hui constitue une opportunité majeure face au défi que le numérique pose à nos sociétés, à nos économies, à nos cultures et à nos démocraties.

Le numérique est un outil qui, comme tout outil, peut, selon l'usage que l'on en fait, servir ou desservir les valeurs que nous défendons. Il peut tour à tour se faire menace pour nos systèmes de solidarité – c'est l'ubérisation – ou constituer une chance inespérée de refonder notre pacte social.

Depuis le début du quinquennat, le Gouvernement agit en matière de numérique en favorisant le développement de l'offre, grâce notamment au financement de l'innovation, à la valorisation de nos entrepreneurs à l'étranger – la French Tech –, le déploiement du très haut débit, au plan « France très haut débit » ou encore en faisant entrer l'école dans l'ère du numérique.

La loi sur les nouvelles opportunités économiques (Noé) et la future réforme du travail traiteront des adaptations nécessaires de notre système de protection sociale aux nouvelles formes de relations de travail issues de l'économie numérique. L'objet de cette loi, quant à elle, est de créer un cadre ouvert et concurrentiel pour orienter l'outil numérique dans un sens vertueux, vers l'innovation et la création économique, en permettant la libération des énergies au bénéfice du plus grand nombre, tout en protégeant nos concitoyens et en démocratisant les usages et les accès au numérique.

Trois axes structurent et équilibrent l'ensemble du projet de loi, au premier rang desquels la circulation des données et du savoir, en d'autres termes la question de l'open data. L'open data, accès gratuit aux données publiques, nous offre une chance historique de générer la création de nouvelles activités économiques, de nouveaux emplois mais aussi de faire émerger des innovations de rupture grâce aux usages inattendus qui seront faits de ces données.

L'open data pourra également améliorer la qualité des services rendus à la population par les entreprises traditionnelles mais aussi par l'État et les collectivités territoriales, et donc la vie quotidienne des citoyens. Certaines études estiment ainsi que sa systématisation fera gagner en moyenne trente-cinq heures par an à ceux qui utilisent les transports en commun, ou encore qu'elle permettra d'économiser trois trillions de tonnes de carbone dans les émissions des immeubles : en Grande-Bretagne, le croisement des données ouvertes a permis, en seulement deux mois, une diminution de 30 % de la facture énergétique dans les bâtiments publics.

Mais pour que l'open data révèle tout son potentiel, il est essentiel de lever les freins à la publication des données. La secrétaire d'État Axelle Lemaire l'a bien compris et propose de clarifier la législation concernant l'utilisation et la qualité de ces données, de façon qu'elles soient compréhensibles et exploitables par les citoyens, les entreprises et les services publics. Dans cette perspective, l'article 4 du projet de loi pose le principe de « l'open data par défaut », autrement dit de la systématisation de la publication des documents administratifs : sous couvert de changement juridique, c'est un véritable changement culturel qui s'amorce. Dans ce même esprit, je salue la création d'un « service public de la donnée », chargé de garantir un accès de tous à des données de qualité.

Autre avancée : l'introduction dans le droit de la notion de « données d'intérêt général », qui impose aux délégataires de mission de service public et, à des fins statistiques, à certaines entreprises privées, la communication de certaines données.

Tout cela permettra à la France de rester à l'avant-garde dans ce secteur pionnier où elle est d'ores et déjà très bien positionnée, entre le troisième et le quatrième rang mondial selon les classements.

Le deuxième volet de ce projet de loi concerne la protection des droits dans la société du numérique. Il s'agit d'encadrer certaines pratiques des acteurs du net, à travers l'affirmation du principe de neutralité du net et de loyauté des plateformes, la création d'un droit de portabilité des données ou encore l'introduction de nouveaux droits pour la protection de la vie privée en ligne.

Enfin, le troisième axe du projet de loi s'organise autour de l'accès au numérique, condition de base pour l'intégration de tous dans la République du numérique. Il comporte des mesures favorisant l'obligation de couverture mobile du territoire pour les opérateurs, des mesures d'aménagement numérique du territoire pour faciliter la mise en oeuvre des programmes déjà existants, notamment le Plan France très haut débit, des mesures d'entretien du réseau de téléphonie fixe, reprises de la proposition de loi de M. André Chassaigne, que nous avons adoptée à l'unanimité mais qui se trouve malheureusement bloquée au Sénat, et, enfin, des mesures en faveur de publics spécifiques comme les personnes sourdes et malentendantes ou les ménages financièrement fragiles, qui pourront voir maintenue leur connexion internet en cas d'impayés.

Dans le cadre de ce troisième volet, je présenterai un amendement visant à garantir un déploiement homogène du très haut débit optique à l'échelle d'une commune, pour éviter le risque d'un déploiement partiel, couvrant uniquement les centres-bourgs des communes rurales.

Pour conclure, le groupe Socialiste, républicain et citoyen souhaite donc adresser un très large satisfecit au Gouvernement pour la préparation sérieuse, démocratique, et originale de ce texte.

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