Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, le projet de loi pour une République numérique que nous nous apprêtons à examiner va conforter et renforcer la place de la France à l’avant-garde de l’économie du net, une économie qui n’est plus fondée sur la rareté, mais sur l’abondance, une abondance qui peut être vertueuse. L’open data illustre cette opportunité en offrant des potentialités inédites d’innovation et d’emplois.
La Commission européenne a récemment publié une étude estimant à 325 milliards d’euros sur la période 2016-2020 le marché direct de l’open data ou encore 100 000 emplois créés sur le sol européen à horizon 2020 !
Au-delà de l’économie et de la lutte contre le chômage, l’open data, c’est gagnant-gagnant : l’analyse et le partage des données bénéficieront aux entreprises, mais aussi aux citoyens et aux collectivités.
Deux exemples : on estime que son utilisation pour analyser le trafic routier des vingt-huit pays de l’Union européenne permettrait de sauver 1 400 vies par an ou d’économiser 629 millions d’heures d’attente inutile sur nos routes !
Mais pour que la République du numérique soit véritablement la société de tous, il nous reste du chemin à parcourir. L’opportunité que constitue la quatrième révolution industrielle, comme vous l’évoquiez, Mme la secrétaire d’État, doit s’appliquer partout et pour tous.
Je veux avant tout parler des problématiques d’accès au numérique, qui constitue le troisième volet de votre projet de loi. Force est de constater que notre pays reste encore marqué par une fracture numérique forte, à la fois générationnelle et géographique. Certains territoires ruraux et de montagnes ne disposent pas encore de téléphone mobile en 2G – c’est ce qu’on appelle « les zones blanches » – et connaissent de grandes difficultés dans le fonctionnement du téléphone fixe.
À l’heure où nous avons plus que jamais besoin de rassemblement, nous ne pouvons accepter qu’une partie de nos concitoyens soit oubliée et exclue de la participation à cette nouvelle ère qui s’ouvre. Nous ne pouvons laisser les inégalités technologiques, sociales et économiques s’accroître. Il en va de la santé économique, de la vivacité de nos territoires ; il en va également du lien social au sein de notre République.
Depuis 2012, le Gouvernement s’est attaqué de front à ce chantier. Dans le cadre des assises de la ruralité, le Gouvernement a fixé un cap clair : l’obligation pour les opérateurs de couvrir en 2G, d’ici à la fin de 2016, les 237 communes qui ne disposent d’aucune couverture mobile et numérique à ce jour.
Au-delà de cette urgence, les quatre opérateurs nationaux devraient équiper en 3G ou 4G, d’ici à mi-2017, plus de 2 200 communes rurales couvertes à ce jour uniquement par la 2G. Plusieurs mesures de ce projet de loi visent à compléter les efforts réalisés.
Concernant l’aménagement numérique du territoire par exemple, le texte facilite la mise en oeuvre des programmes existants, notamment du plan France Très Haut Débit. Au-delà des mots, ce sont tout de même 3 milliards d’euros qui seront consacrés à des projets de couverture numérique portés par les collectivités, dont 1,5 milliard est déjà engagé.
Quant à l’entretien du réseau de téléphonie fixe qui pâtissait de défaillances avérées au détriment des usagers, l’article 39 du projet de loi procède à la clarification juridique nécessaire des responsabilités d’entretien du réseau sur les propriétés privées. Cet article reprend les mesures de la proposition de loi de mon collègue André Chassaigne dont je salue le travail.
Il confère au prestataire de service universel de nouvelles obligations relatives à l’entretien de son réseau téléphonique fixe qui est désormais considéré « d’utilité publique ». De plus, l’opérateur s’expose à des sanctions accrues en cas de non-respect des engagements. En contrepartie, l’opérateur historique bénéficiera de moyens accrus pour lui permettre de maintenir son réseau en bon état.
Je me félicite du volontarisme du Gouvernement sur cette question essentielle de l’accès au numérique, mais je souhaiterais néanmoins aller plus loin. Je vous proposerai un amendement en vue de rendre plus homogène le déploiement du très haut débit en fibre optique au sein de nos communes.
En effet, dans l’état actuel du droit, il existe un risque qu’un opérateur déployant la fibre optique se contente de couvrir uniquement des zones les plus rentables, c’est-à-dire les centres bourgs. Or le critère de couverture des centres bourgs ne se révèle pas toujours suffisant, notamment dans les communes poly-centrées.
L’amendement que je vous proposerai permettra de prévenir un tel risque en autorisant l’opérateur primo-investisseur à réserver dans sa convention d’accès le bénéfice de la péréquation tarifaire aux seuls opérateurs qui déploieront leur propre réseau FTTH au-delà de la zone la plus rentable. Il s’agit là d’une mesure raisonnable et de bon sens qui, je l’espère, pourra recueillir l’assentiment du plus grand nombre d’entre nous, au bénéfice de tous les territoires qui, eux aussi, veulent s’inscrire dans la République du numérique.