Je voudrais, comme bon nombre de mes collègues, dont MM. Cinieri et Morel-A-L’Huissier, revenir sur la question de l’égalité des territoires et de l’égalité des citoyens dans ce texte. Celui-ci, au-delà des problématiques que peut soulever son intitulé, pose aussi la question de l’espoir qu’il suscite chez ceux qui s’imaginent que tous les problèmes qu’ils rencontrent seront résolus demain.
Dans l’article 1er, la mise en accessibilité des données publiques a été très bien présentée par l’une de vos oratrices, que j’ai écoutée avec beaucoup d’attention : rappelant que, dans la situation actuelle, les administrés demandent à l’administration de fournir un certain nombre d’éléments et que vous souhaitez que, demain, l’administration mette ceux-ci à disposition des administrés avant même qu’ils ne le demandent, elle a expliqué que ce revirement posera un problème grave aux collectivités rurales.
En effet, à l’heure actuelle, celles-ci ne parviennent déjà pas à dématérialiser de simples données comptables parce que le débit n’est pas suffisant : il y a donc déjà une rupture d’égalité. Comment ces collectivités locales feront-elles demain pour appliquer la loi qui sera probablement votée dans les jours qui viennent et pour mettre à disposition de leurs administrés, au même titre que pour les autres institutions, les données qui seront exigibles par chacun en application de cette loi ?
Cela m’amène à une réflexion sur d’autres types d’inégalités et à un constat très simple : il aurait été bien préférable de mettre en début de ce texte la partie qui s’y trouve à la fin, même si elle ne fait qu’évoquer la question des infrastructures qui permettront peut-être un jour de combler le gouffre entre ceux qui sont déjà bien équipés, et qui se trouvent aujourd’hui dans les ensembles urbains importants, et ceux qui ne le sont pas et n’ont malheureusement aucune perspective de l’être.
Pour vous citer un exemple, dans mon département de l’Aveyron, comme partout, une structure a été créée pour mettre en oeuvre le plan France Très Haut Débit. Cette structure prévoit une contribution, à hauteur de 10 euros par an et par habitant pendant quinze ans, à ce qui ne sera très souvent que de la montée en débit, et non du FTTH. Cette montée en débit améliorera la situation de 30 % de la population, les 30 % déjà les mieux desservis.
Ainsi, en 2020-2025, 70 % des gens habitant en zone rurale n’auront pas accès aux technologies – lesquelles auront nécessairement évolué dans l’intervalle – ni aux données publiques que vous voulez rendre accessibles avec cet article. De surcroît, ils feront face à une administration qui ne pourra pas appliquer la loi – si ce texte est voté en l’état.