Intervention de Barbara Pompili

Réunion du 13 janvier 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

Monsieur le président Durand, je vous remercie de cette présentation très complète. Comme vous le savez, les députés écologistes ont particulièrement soutenu la refondation de l'école, ainsi que les mesures qui ont été prises depuis et qui prolongent avec cohérence l'état d'esprit de cette réforme. L'enjeu est bien de refaire de l'école une promesse pour tous, une école qui doit savoir s'adapter aux besoins de chaque élève, y compris lorsqu'ils ont des difficultés, que ces dernières soient temporaires ou non, je pense aux enfants en situation de handicap, précoces, « dys », en difficulté familiale ou sociale, aux enfants allophones nouvellement arrivés en France, ou encore issus de familles itinérantes et de voyageurs. C'est pourquoi deux ans après les débats sur la refondation de l'école, qui a inscrit pour la première fois dans la loi le principe de l'école inclusive, j'ai souhaité, avant vous, faire un bilan d'étape sur cet aspect essentiel dans mon récent avis budgétaire centré sur l'école primaire inclusive. J'aimerais donc savoir quelles sont les analyses et recommandations du comité de suivi à ce propos.

Aujourd'hui, de nombreux outils existent pour mettre en oeuvre cette école inclusive, mais des améliorations doivent être menées. Je pense au projet personnalisé de scolarisation (PPS) pour les élèves en situation de handicap, mais aussi aux deux autres outils créés par la loi pour la refondation que sont le plan d'accompagnement personnalisé (PAP) pour les élèves rencontrant des troubles des apprentissages, comme les « dys », et le programme personnalisé de réussite éducative pour les élèves qui n'ont pas de trouble ou de handicap mais qui connaissent de réelles difficultés scolaires. Ces instruments sont un premier pas vers une individualisation des parcours, et l'on constate que les accompagnements différenciés et les pratiques pédagogiques spécifiques qu'ils permettent sont bénéfiques pour l'ensemble des élèves. Aussi les retours de terrain que vous avez pu avoir sur ces nouveaux outils pour l'inclusion créés par la loi m'intéressent-ils tout particulièrement. Bien entendu, cette question est indissociable de celle des moyens humains. J'aimerais donc connaître l'avis du comité de suivi sur le besoin de renforcer le nombre des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, qui sont les acteurs essentiels pour mettre en place l'école inclusive que nous souhaitons tous.

Concernant le mouvement actuel de décloisonnement entre milieu ordinaire et dispositifs particuliers, avez-vous eu des retours d'expérience qui permettraient de faciliter encore le rapprochement entre ces dispositifs et la classe ordinaire, laquelle doit demeurer le lieu ayant vocation à scolariser tous les élèves ?

En lien avec cet objectif, quelques mots sur la formation des enseignants. La loi pour la refondation de l'école a eu la sagesse de restaurer cette formation, notamment en créant les ESPE. Mais, comme vous l'indiquez vous-même, le nouveau modèle de formation peine à trouver son équilibre sur le plan structurel et sur le plan pédagogique. Les ESPE ne sont pas encore à la hauteur, y compris sur la question de l'inclusion. La formation initiale et continue est insuffisante au regard des enjeux. Les pratiques de l'école inclusive, intégrées au tronc commun de formation, sont totalement isolées du reste de la formation. Or l'école inclusive exige un changement d'état d'esprit qui passe nécessairement par la formation. Il est aujourd'hui nécessaire de modifier les maquettes des formations des ESPE. D'une façon plus générale, il faudrait également déplacer le concours en fin de licence, afin de libérer la première année de master du bachotage et de déployer une formation professionnelle digne de ce nom, ce qui permettrait de remédier à la cassure entre disciplinaire et pratique que vous mentionnez. Cette demande de révision du continuum de formation fait sens de façon globale, et pas seulement au regard des enjeux de l'école inclusive.

Concernant l'ouverture des ESPE à l'ensemble des acteurs de l'éducation, là aussi, la marge de progression est grande. Sur les questions de l'inclusion, les experts extérieurs ne représentent pas plus de 20 % à 35 % des intervenants. De même, les formations communes aux enseignants, aux personnels des établissements médicosociaux et des maisons départementales des personnes handicapées et aux AESH sont embryonnaires. Pourtant, faire émerger une culture de travail en équipe, dans laquelle les équipes éducatives et médicosociales mais aussi les associations et les parents auraient toute leur place, est essentiel. Je partage votre analyse : il faut mieux associer les parents pour que la coéducation ne soit pas réduite à un simple principe et que les parents ne demeurent pas les « fantômes » de l'institution.

Enfin, il me semble nécessaire de mieux diffuser les pratiques pédagogiques différenciées permettant de trouver des méthodes d'enseignement adaptées à chacun face à l'hétérogénéité d'une classe et, ainsi, de prévenir l'échec scolaire. L'innovation pédagogique devrait être mieux valorisée dans le parcours professionnel des enseignants et les évolutions de leur carrière. Je vous remercie des précisions que vous voudrez bien apporter sur ces différents points.

Pour conclure, je m'associe à votre souhait que la priorité accordée au primaire produise des effets concrets sur le terrain.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion