Je prendrai quelques minutes pour développer cet amendement, avec une argumentation très précise.
La loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile a renforcé les garanties des personnes maintenues en rétention qui entendent présenter une demande d’asile, en inscrivant à l’article L. 551-3 du CESEDA les garanties prévues par la directive « procédure » du 26 juin 2013 et les jurisprudences européennes du Conseil d’État.
La Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt I.M. contre France du 2 février 2012, et le Conseil d’État, dans une décision du 30 juillet 2014, n’ont pas contesté le principe du délai de cinq jours, prévu par l’article L. 551-3 du CESEDA, pendant lequel un étranger retenu en centre de rétention administrative peut déposer une demande d’asile. Le Conseil d’État a cependant précisé les conditions dans lesquelles l’irrecevabilité d’une demande présentée postérieurement à ce délai pouvait être opposée, en excluant les cas dans lesquels la demande d’asile repose sur des faits nouveaux postérieurs à l’expiration du délai de cinq jours.
La rédaction actuelle de l’article L. 551-3 du CESEDA, issue de la loi du 29 juillet 2015, répond à l’ensemble de ces exigences. D’abord, la jurisprudence du Conseil d’État sur les demandes déposées au-delà du cinquième jour est inscrite dans la loi. Ensuite, l’article L. 551-3 du CESEDA prévoit que tout retenu doit pouvoir bénéficier d’une assistance juridique et linguistique. Je rappelle que tout retenu reçoit également, dès son placement en rétention, une information sur les droits qu’il est susceptible d’exercer en matière de demande d’asile.
En revanche, cette disposition ne règle pas explicitement les cas de demandes d’asile présentées au dernier moment, dans le seul but de faire échec à la mise en oeuvre effective et imminente de la mesure d’éloignement. Cette situation recouvre le cas d’étrangers, après le cinquième jour de la rétention, pour lesquels l’administration dispose de tous les éléments utiles permettant de mettre en oeuvre l’éloignement et de programmer un départ devant intervenir rapidement.
Face à des demandes d’asile ne reposant sur aucun fait nouveau et déposées dans le seul but de faire échec à cet éloignement, l’autorité administrative doit pouvoir opposer elle-même l’irrecevabilité. On ne peut en effet contraindre l’administration à annuler en toutes circonstances l’éloignement programmé, sauf à rendre le dispositif vulnérable à des manoeuvres dilatoires tendant à instrumentaliser la procédure d’asile en vue de faire échec à ces mesures d’éloignement.
Aussi, l’amendement no 152 vise non seulement à limiter ces cas d’abus de procédure, mais aussi à circonscrire clairement le champ de cette appréciation administrative. C’est l’autorité administrative qui, dans ce cas, doit apprécier en urgence le caractère dilatoire de la demande, en considérant l’ensemble des éléments de contexte extérieurs au fond de la demande. Je vous demande de bien vouloir adopter le présent amendement, qui apporte cette précision.