La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Madame la secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État, le Sénat, dans sa grande sagesse, a introduit deux dispositions permettant à notre pays de déterminer le nombre d’étrangers qu’il est capable d’intégrer ou d’assimiler.
La commission des lois de notre assemblée, avec beaucoup moins de sagesse, a supprimé cet article. C’est un point essentiel du texte puisque nous sommes au coeur du débat : notre pays veut-il enfin réguler des flux migratoires qui deviennent non seulement de plus en plus importants mais de moins en moins maîtrisés ?
L’amendement adopté par le Sénat prévoyait, outre un rapport, un débat annuel pour débattre des orientations de la politique d’immigration. Il me semblait légitime qu’il y ait un tel débat devant la représentation nationale pour décider où nous voulons aller. Le Sénat avait également donné au Parlement le pouvoir de déterminer pour les trois années à venir le nombre d’étrangers admis à s’installer durablement sur notre territoire pour chacune des catégories de séjour.
L’article 1er A instauré par le Sénat nous autorisait donc à reprendre le cours d’une politique migratoire enfin choisie et non plus subie. Malheureusement, et je le regrette, la majorité, avec la complicité du Gouvernement, va sans doute se priver de cet outil majeur d’élaboration de nos politiques publiques en matière d’immigration.
Mon amendement vise donc à reprendre le cours d’une politique migratoire que le Parlement aurait la faculté de déterminer.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 7 .
Au mois de juillet, lorsque nous avons débattu de ce texte en première lecture, nous avions défendu cet amendement fondamental qui, Éric Ciotti vient de le rappeler, permettrait au Parlement de décider du nombre d’étrangers admis à s’installer durablement en France.
Nous pensons profondément que la France a le droit de choisir qui elle souhaite accueillir sur son territoire et qui elle refuse d’accueillir.
Il s’agit, c’est vrai, un désaccord majeur que nous avons avec la majorité, et Bernard Cazeneuve, le ministre de l’intérieur, le rappelait tout à l’heure à la tribune. Le Gouvernement, les députés socialistes ne souhaitent pas que la France détermine le nombre d’étrangers admis à émigrer vers la France. Nous pensons au contraire que le moment est venu pour le Parlement de fixer, de manière transparente, démocratique, le nombre des personnes que nous pouvons accueillir compte tenu de nos capacités d’intégration, de l’état du marché du travail, de la situation des finances publiques, de la crise du logement.
Nous pensons qu’il faut diminuer les flux d’immigration vers la France, drastiquement, et s’en donner les instruments juridiques, diplomatiques et opérationnels. Tel est l’objet de cet amendement, sur lequel, monsieur le président, le groupe Les Républicains demandera un scrutin public.
La parole est à M. Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements.
Ces amendements tendent à rétablir l’article 1er A adopté par le Sénat.
Vous proposez un débat d’orientation sur la politique d’immigration au Parlement. Nous avons eu ce débat il y a six mois lors de la première lecture. La loi prévoit déjà la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement sur les orientations de la politique de l’immigration et de l’intégration. Cette politique peut d’ailleurs donner lieu à un débat. Cela a déjà été le cas en 2013 sur les orientations en matière d’immigration professionnelle et de mobilité étudiante.
Vous proposez ensuite que le Parlement détermine, catégorie par catégorie, un système de quotas ou de contingents, les deux mots ayant été utilisés par vous à l’instant ou lors de la discussion générale. Comme cela a déjà été dit, le système de quotas n’est conforme ni à la Constitution ni aux conventions internationales que nous sommes tenus de respecter. C’est notamment le cas de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme sur le respect de la vie privée et familiale et des différentes directives européennes, dont la directive de 2003 relative au droit au regroupement familial.
Enfin, nous vous avons opposé les arguments qu’avait donnés Pierre Mazeaud en juillet 2008 dans son rapport d’une mission effectuée à la demande de Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur à l’époque : « Des quotas migratoires contraignants seraient irréalisables ou sans intérêt. Les pouvoirs publics nationaux ne disposent pas d’un pouvoir discrétionnaire pour déterminer les flux relatifs aux deux principales sources d’installations, l’immigration familiale et l’asile. S’agissant de l’immigration de travail, une politique de quotas serait sans réel objet. Enfin, elle n’a pas de sens pour l’immigration irrégulière. » Il conclut – et je ne cite que la synthèse de son rapport – : « Dans ce domaine plus encore qu’ailleurs, l’action patiente, résolue et respectueuse de la complexité des choses doit être préférée aux remèdes spectaculaires mais illusoires. »
Vous nous avez répondu tout à l’heure, monsieur Larrivé, que ce texte datait de 2008 et qu’il n’était pas en résonance avec l’actualité brûlante. Certes, même si je crois que les principes auxquels il fait référence sont toujours d’application.
Plus récemment, néanmoins, dans une lettre signée le 14 janvier, le défenseur des droits, Jacques Toubon, dans des « recommandations tendant à ne pas maintenir certaines dispositions introduites par le Sénat, contraires au respect des droits fondamentaux », dont l’institution de quotas, écrivait : « Certaines catégories d’étrangers ne peuvent se voir exclues a priori d’un droit au séjour avant tout examen de leur situation. »
« Il en va ainsi principalement des étrangers malades […] Il en va aussi et surtout des conjoints d’étrangers dont le séjour ne saurait être subordonné à la fixation d’un quota dans la mesure où […] ils doivent pouvoir bénéficier du droit de mener une vie familiale normale.
Conclusion, « il en résulte que le défenseur des droits préconise la suppression de l’article 1er A du projet de loi relatif à la détermination par le Parlement du nombre d’étrangers admis à séjourner en France. »
Ce n’est pas notre avis ! Ce n’est pas lui qui fait la loi, c’est le Parlement !
C’est ce que nous avons fait en commission. C’est la raison pour laquelle elle a donné un avis défavorable aux amendements tendant à rétablir cet article.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la réforme de l’État et de la simplification, pour donner l’avis du Gouvernement.
Je crois que presque tout a été dit sur ce sujet. Le ministre de l’intérieur a évoqué la question dans son intervention. Le débat a eu lieu en première lecture comme vous l’avez vous-même indiqué, il a eu lieu au Sénat, et je crois que tous les arguments ont été donnés.
Les quotas que vous proposez aboutiraient à méconnaître les principes fondamentaux de notre droit et nos engagements internationaux.
Il n’est pas utile de prévoir dans la loi qu’un débat sera organisé. Un rapport est remis chaque année par le Gouvernement sur la politique d’immigration. Le Gouvernement se tiendra à la disposition du Parlement pour en débattre.
Je suis donc défavorable à ces amendements.
Je vous annonce d’ores et déjà que, sur l’amendement no 7 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Julien Aubert.
Ces amendements, qui me semblent très légitimes, tendent à faire du Parlement l’instance où l’on décide de la politique migratoire et où l’on décide qui nous accueillons sur ce territoire, surtout à l’aune du contexte international que l’on connaît.
Les arguments que vous avez développés très brièvement pour vous y opposer ne me semblent pas très opérants.
Tout d’abord, un rapport n’est pas un débat. Vous prévoyez déjà un rapport, monsieur le rapporteur, mais un débat permet aussi de s’engager, de voir individuellement les points de vue. On débat de l’immigration partout en France et il m’apparaîtrait assez illusoire qu’on ne puisse pas en débattre dans l’enceinte de la représentation nationale.
Ensuite, vous avez cité des arguments juridiques en parlant de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Vous faites sans doute référence à l’arrêt « Jeunesse contre Pays-Bas » du 3 octobre 2014, qui considère que les quotas ne peuvent pas s’opposer au regroupement familial.
Reste que je suis assez surpris, d’abord parce que le terme de quotas est utilisé dans toute l’Union européenne. Je sais que François Hollande ne veut pas l’utiliser mais, il y a encore quelques semaines, lors d’un sommet franco-allemand, Mme Merkel, avec le Président de la République à ses côtés, expliquait qu’il fallait des mécanismes contraignants. Le terme de quotas est utilisé par la Commission européenne, est utilisé par tous les autres pays de l’Union européenne. La France serait-t-elle donc la seule à voir un problème d’incompatibilité entre ces quotas et la Convention européenne des droits de l’homme – laquelle, je vous le rappelle, concerne également nos voisins ?
À un moment donné, il faudrait arrêter de se retrancher derrière des arguments juridiques parce que les Français qui regardent tous les jours leur poste de télévision se demandent qui exactement, si ce n’est pas le Parlement, va décider de la politique migratoire et où on va en débattre.
J’avoue ne pas comprendre l’argumentation du rapporteur et du Gouvernement. Nous sommes ici pour légiférer. C’est ici qu’on légifère et nulle part ailleurs. Ce n’est pas au défenseur des droits de nous dire ce que nous avons à faire et encore moins de dicter des préconisations pour une assemblée parlementaire, en l’occurrence le Sénat. C’est extrêmement choquant.
Vous évoquez des rapports, très bien. Nous sommes ici pour faire la loi et pour nous attaquer à des problèmes majeurs qui sont en train d’éroder, voire de désintégrer le pacte social. Nous sommes face à un phénomène que vous persistez à ignorer avec un aveuglement dont je salue peut-être la constance mais dont je déplore la dangerosité.
Oui, nous voulons mettre en place ce système des quotas, qui est totalement compatible avec l’article 8 de la CEDH. On peut mettre en place des files d’attente, qui seraient totalement compatibles avec le respect de la continuité de la vie familiale que prévoit l’article 8. C’est une question de volonté.
Nous voulons affirmer cette volonté et nous allons poursuivre dans cette voie jusqu’à ce que l’alternance nous permette de mettre en place cette politique. Il faut que la France reprenne le cours de la maîtrise de ses flux migratoires, et le seul moyen de le faire, dans la transparence, c’est de fixer ici des plafonds annuels d’accueil de catégories de migrants sur le sol national.
Vous nous expliquez au fond, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, que vous revendiquez l’impuissance publique. Pour résumer votre propos, ne faisons rien, écoutons ce que dit telle ou telle autorité administrative indépendante,…
M. Mazeaud !
…ce que dit telle ou telle juridiction, ce que dit tel ou tel rapport, tel ou tel comité, telle ou telle commission.
Il y a plus de 200 000 entrées chaque année en France et 1,8 million d’entrées clandestines en Europe. Au fond, tout cela n’est pas grave, dites-vous ! Continuons ainsi ! Nous disons exactement le contraire. Nous pensons qu’il faut une politique d’immigration, soit des objectifs, des moyens opérationnels, un certain nombre d’actions diplomatiques, des instruments juridiques nouveaux et cela veut dire, madame la secrétaire d’État, même si cela vous surprend, que c’est ici, à l’Assemblée nationale, que les représentants du peuple doivent choisir, au nom du peuple français, si nous souhaitons ou non continuer d’accueillir des dizaines et des dizaines de milliers de migrants supplémentaires, sans aucune perspective d’intégration, ni aucune adéquation avec la réalité et les besoins de notre pays.
Ce débat est intéressant : d’un côté, à gauche, la fausse générosité immigrationniste, de l’autre, à droite, une attitude responsable, raisonnable et pleinement démocratique. Nous voulons que le Parlement décide de la politique d’immigration de la nation.
M. le ministre de l’intérieur nous a dit tout à l’heure, ce qui lui a d’ailleurs valu un rappel au règlement, que l’opposition ne servait à rien et qu’elle n’avait pas droit de cité dans la République.
Nous allons nous efforcer de lui expliquer pourquoi, dans un système démocratique, il n’est parfois pas inutile d’écouter ce que dit l’opposition. Comme beaucoup de peuples européens, les Français n’en peuvent plus de se sentir dépossédés de leur identité nationale. L’année dernière, comme toutes les années précédentes, la France a accueilli entre 270 et 300 000 nouveaux étrangers, dont 212 000 au titre des entrées légales.
Or à peine 10 % vont aller travailler. Tous les autres seront hébergés aux frais de la princesse, si j’ose dire, et du contribuable. Ils feront l’objet de prises en charge, soit pour des raisons médicales, soit au nom du regroupement familial, soit pour leurs études. Moins de 20 000 personnes viennent donc travailler en France sur ces 212 000.
Il faut ajouter à ce nombre les 70 000 demandeurs d’asile, dont 80 % seront déboutés. Il restera donc près de 50 000 clandestins, qui attendront une régularisation par le biais d’un mariage ou de la naissance d’un enfant. Bon an mal an, hors Guerre du Golfe, la France engrange 300 000 étrangers supplémentaires. On nous explique que le nombre des étrangers ne change pas et que l’intégration fonctionne à merveille.
Nous sommes en train de fracturer le corps social de notre pays. Cela donne les résultats que nous voyons aux élections. Je vous mets en garde. Si vous n’écoutez pas ce que nous vous disons, à savoir qu’il faut chaque année un débat sur la politique migratoire et que nous fixions, comme les États démocratiques matures, le Canada, l’Australie ou les États-Unis,…
…des quotas en fonction des besoins de l’économie nationale, nous irons droit au désastre.
Je ne voulais pas m’appesantir sur ce sujet, mais nous ne pouvons pas laisser dire des contre-vérités.
Le chiffre de 212 000 que vous avez cité, monsieur Lellouche, est en effet celui des nouveaux titres établis l’an dernier. Comme je l’ai dit dans ma première intervention, ce chiffre reste à peu près le même au fil des années. Mais il ne se cumule pas avec les régularisations de déboutés du droit d’asile, puisqu’ils sont intégrés. Si un jour un débouté du droit d’asile est régularisé parce qu’il n’a pas été éloigné, ce qui n’est évidemment pas le cas de tous, il entrera dans ce chiffre-là. Vous ne pouvez donc pas cumuler des chiffres qui n’ont absolument rien à voir. En 2015, il y a eu 61 000 demandes d’asile et 19 447, de mémoire, ont été acceptées, ce qui représente, vous avez raison, une augmentation par rapport aux années précédentes, du fait du contexte international.
L’argument le plus important, que j’avais rappelé en première lecture, et qui n’est pas forcément celui de Pierre Mazeaud en 2008 et du défenseur des droits aujourd’hui, c’est que le système des quotas n’est pas opérant. Les pays comme les États-Unis qui fonctionnent par quotas sont confrontés à une immigration illégale considérable. Si demain nous annonçons à la terre entière que la France accueillera 100 000 étrangers, soit la moitié du nombre que nous accueillons chaque année, sachant qu’il y en a qui entrent, puis qui sortent – les étudiants, par exemple, n’ont pas vocation à rester dans notre pays –, nous allons créer des millions de vocations pour venir dans notre pays.
C’est ce qu’il faut éviter avec les quotas ! Les États-Unis se sont trompés et ils en sont aujourd’hui réduits à débattre d’un mur. Nous ne voulons pas en arriver là.
L’amendement no 56 n’est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 24 Nombre de suffrages exprimés: 24 Majorité absolue: 13 Pour l’adoption: 7 contre: 17 (L’amendement no 7 n’est pas adopté.)
C’est le deuxième amendement absolument fondamental que le groupe Les Républicains propose, pour marquer, là encore, une rupture très nette avec la non-politique conduite par le Parti socialiste. Nous pensons que c’est avant la délivrance du visa de long séjour, soit avant qu’une autorité consulaire ne délivre l’autorisation de s’installer en France, que doit être vérifiée la capacité d’intégration à la société française du candidat à l’immigration. Aucun visa ne doit être attribué pour une installation durable en France, sans que ne soit vérifiés la capacité d’intégration, celle à exercer une activité professionnelle ou le respect des lois et des valeurs de la République.
Cet amendement est pleinement cohérent avec la logique des contingents limitatifs que nous soutenons. La France a le droit de choisir qui elle souhaite accueillir, non seulement les volumes, mais également les candidats à l’immigration qui participeront par leur action à leur intégration à la communauté nationale. Nous constatons, mois après mois, que le Parti socialiste refuse cette logique, puisque vous êtes les partisans d’une immigration subie, non régulée, non maîtrisée.
Je suis extrêmement surpris de voir la majorité et le Gouvernement entrer dans cette logique de suppression. Le Sénat avait fait oeuvre utile, en souhaitant qu’un étranger qui désire s’établir en France témoigne préalablement a minima de sa volonté et de son aptitude à épouser les valeurs de la République. Nous demandions qu’il ait une connaissance suffisante de la langue française. Le Sénat avait demandé que nous puissions nous assurer que le candidat à l’immigration adhérait aux valeurs de la République et aux valeurs essentielles de la société française. Nous souhaitons également que l’étranger puisse apporter la preuve de sa capacité à exercer une activité professionnelle. Cela paraît relever du bon sens. S’y opposer montre dans quelle naïveté coupable vous êtes plongés pour les questions migratoires.
Vous demandez en quelque sorte la réintégration du pré-CAI – pré-contrat d’accueil et d’intégration – qui est actuellement en vigueur avec un autre objet. Nous avons repoussé ce même amendement en première lecture, parce que le projet de loi fait un autre choix, celui d’une politique d’intégration qui ne conditionne pas l’entrée sur le territoire à des prérequis, mais qui donne au contraire à l’étranger des moyens de préparer son intégration et d’en faire la preuve sur place. Il est plus facile d’évaluer l’intégration une fois dans la communauté nationale, plutôt que d’évaluer une intégration à la France et à la communauté française, lorsque l’étranger vit dans son pays d’origine.
Les pré-requis n’ont pas fait preuve de leur efficacité. En mars 2013, Manuel Valls, alors ministre de l’intérieur, avait commandé un rapport – un de plus, me direz-vous – à l’Inspection générale de l’administration et à l’Inspection générale des affaires sociales sur l’évaluation des dispositifs d’accueil, lequel a en partie permis au Gouvernement de nous proposer de nouveaux dispositifs pour l’accueil et l’intégration des personnes étrangères. Concernant le pré-CAI, les prestations actuelles sont jugées insuffisantes pour être efficaces, disparates selon les pays, ce qui pose problème, et faisant doublon avec les formations civiques dispensées à l’arrivée sur le territoire. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de ne pas l’inscrire dans la présente réforme. Avis défavorable.
Même avis.
Je suis quelque peu étonné. Vous nous expliquez que nous ne demandons strictement aucune preuve de capacité d’intégration aux personnes qui arrivent sur le territoire, au prétexte que ce n’est qu’une fois en France que nous pourrons juger de leur capacité d’intégration. Mais, comme le système fait qu’une fois qu’elle est sur le territoire, il est très difficile de renvoyer dans son pays d’origine une personne qui ne se serait pas intégrée, vous comprenez tout le caractère contre-productif de votre réflexion.
Puisque vous avez cité un rapport, je vous en cite un autre, publié par France Stratégie, organisme rattaché au Premier ministre : « Jeunes issus de l’immigration : quels obstacles à leur insertion économique ? ». On y découvre que, pour les jeunes descendant d’immigrés africains, la probabilité d’avoir un emploi stable cinq ans après la fin de leurs études est un tiers plus faible que pour les natifs ou pour les autres immigrés. Ils ont également 25 % de chances de moins d’entrer dans la fonction publique d’État, alors que ses concours sont anonymes et qu’il ne peut donc y avoir de sujets de discrimination, relativement à la couleur de peau, par exemple.
L’explication principale se trouve dans le fait que, dans leurs familles, on ne parle pas la langue de l’école, celle de la République, ce qui ne les aide pas à acquérir les diplômes nécessaires par la suite pour s’intégrer de manière économique. C’est pourquoi je pense que le fait de demander une connaissance suffisante de la langue française pour ces immigrés, avant d’arriver sur le territoire, est une condition nécessaire si nous voulons favoriser leur insertion économique.
J’ai du mal, connaissant nos collègues de la majorité et la philosophie de la gauche qui est celle de la Révolution française : liberté, égalité, laïcité…
Fraternité, bien sûr… Nous pouvons nous retrouver dans ces valeurs : liberté, égalité, fraternité auxquelles on a ajouté ces derniers temps laïcité. On parle de « vivre ensemble » toute la journée, de « faire France », de « faire nation ».
Ce sont les termes à la mode dans vos rangs. J’écoute ce que disent vos ministres et votre gouvernement. Nous disons tout simplement que si un étranger est prêt à intégrer la famille républicaine, à apprendre sa langue, à se retrouver dans l’histoire et les valeurs de la France, il est le bienvenu. Mais s’il est là uniquement pour des raisons alimentaires et pour aller pointer aux minima sociaux et passer à la caisse, il s’agit d’autre chose, qui est en train de créer une cassure dans notre pays.
Je vous mets en garde parce que beaucoup de nationaux regardent d’un assez mauvais oeil les nouveaux arrivés qui ont droit à tout alors qu’eux ont le droit de payer pour tout.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur Binet, je sais très bien ce que vous allez me rétorquer : vous allez utiliser le truc habituel du terrorisme intellectuel… Mais cela ne me fait vraiment rien. Vous pouvez me traiter de ce que vous voulez, moi, je vous parle au nom des Français que j’écoute, parfois des gens de gauche, vos électeurs, et qui n’en peuvent plus de passer derrière les nouveaux arrivés qui, eux, ont droit à toute toutes les allocations.
Mêmes mouvements.
Nous demandons que ceux qui veulent entrer en France en connaissent la langue, nos valeurs, trouvent leur place dans la société, fassent l’effort de travailler. Voulez-vous que je vous rappelle ce que disaient les révolutionnaires ? Voulez-vous que je vous parle de Thomas Paine ou de Benjamin Franklin ou encore du baron de Cloots ? Tous parlaient notre langue, se retrouvaient dans la Révolution française, dans ses valeurs, ont été membres de la Convention. Ils étaient aussi français que les Français. Êtes-vous sûr que tous ceux qui aujourd’hui demandent l’AME, l’aide médicale d’État, ou les minima sociaux viennent ici autrement que pour cela, et se retrouvent dans les valeurs de la République et dans ce qui vous tient à coeur ?
En séparant immigration, insécurité et fracture sociale, vous faites une erreur fondamentale qui est lourde de conséquences pour notre pays.
Je serais très heureux que la secrétaire d’État veuille bien s’exprimer pour expliquer aux Français et, si elle y consent, aux députés que nous sommes, pour quelle raison le gouvernement de Manuel Valls s’oppose à ces amendements,…
…refuse de considérer qu’un candidat à l’immigration doit parler la langue française ? Pour quelle raison le gouvernement de Manuel Valls estime-t-il que ce candidat n’a pas obligation de respecter les valeurs de la République française ? Pour quelle raison le gouvernement de Manuel Valls considère-t-il que le candidat à l’immigration n’a pas à faire la preuve de sa capacité à trouver un travail lui permettant d’acquérir une autonomie ? Madame la secrétaire d’État, expliquez pour quelle raison le Président de la République François Hollande, et le gouvernement de Manuel Valls que vous représentez ici ce soir, s’opposent à l’idée que les candidats à l’immigration parlent français, respectent nos lois et aient une activité professionnelle. Acceptez-vous que certains de ces candidats ne connaissent aucun mot de français, ne respectent pas nos lois, n’aient pas d’activité professionnelle et rejoignent les rangs des cinq millions sept cent mille demandeurs d’emploi que votre politique économique et fiscale inefficace a créés ? Répondez, madame la secrétaire d’État, aux Français,
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen
répondez aux députés si vous daignez participer au débat parlementaire !
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Quelle morgue gouvernementale !
Mes chers collègues, ce rappel au règlement porte sur le déroulement de nos débats car si nous comprenons très bien que le ministre de l’intérieur, en charge de l’immigration, soit ce soir à Berlin – la crise migratoire est telle qu’il est bien naturel qu’il s’entretienne avec ses homologues de cette question –, nous trouverions aussi normal que la secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et à ce titre présente au banc du Gouvernement, veuille bien participer à nos débats. Nous avons posé des questions très précises : nous sommes en droit, au nom des Français que nous représentons, d’obtenir de vous, madame la secrétaire d’État, un minimum de réponses.
Ce n’est pas un rappel au règlement !
Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
C’est le Gouvernement qui ne respecte pas la représentation nationale !
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes devant un texte qui va passer en force vu le mutisme du Gouvernement, alors que le sujet est essentiel pour notre pays et nos concitoyens dans cette période de troubles internationaux. Le Gouvernement a imposé la procédure d’urgence alors que son contenu ne le justifie pas. Ce texte avait été considérablement amélioré au Sénat, mais la version qui nous est proposée n’en tient guère compte puisque la commission des lois de l’Assemblée nationale l’a détricoté. On veut nous imposer un droit des étrangers quand les sénateurs, dans leur sagesse, proposaient une maîtrise de l’immigration. C’est ainsi que l’article 1er A instaurait des quotas en matière d’admission des ressortissants étrangers au séjour et que l’article 1er B exigeaient des intéressés de faire la preuve de leur capacité d’intégration avant leur arrivée en France. Au lieu de ces dispositions, vous rétablissez, monsieur le rapporteur, un texte laxiste au moment où la France n’a plus les moyens d’accueillir les migrants en nombre important et alors que huit millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté. Ce texte va faciliter l’immigration en créant un appel d’air dangereux tandis qu’il faut, au contraire, limiter l’immigration. Je doute que le Gouvernement entende les messages que nous envoient nos concitoyens. Notre pays souffre, mais il n’est pas entendu, ce texte en est une nouvelle illustration.
Cet amendement, qui a été déposé par la quasi-intégralité du groupe Les Républicains, vise à responsabiliser et à faire réfléchir sur ce qu’on attend de quelqu’un qui veut s’intégrer à la communauté nationale. Il s’agit de prévoir que les étrangers ayant conclu un contrat d’intégration participent financièrement aux formations civiques et linguistiques en fonction de leurs moyens.
Ce type de propositions vise à clarifier les choses : l’État ayant des problèmes en matière de budget, il est donc utile que les étrangers qui peuvent participer financièrement à leurs formations montrent par leur contribution qu’ils veulent s’intégrer à la communauté nationale et sont prêts à en assumer tous les droits et tous les devoirs.
Mais depuis les débuts des débats, je vois bien que vous ne voulez strictement rien encadrer ni rien demander, monsieur le rapporteur. Je reste pourtant persuadé que dans ce cas comme ailleurs, si on demande à quelqu’un de s’intégrer, il faut lui demander de remplir un certain nombre de conditions. Nous avons tout à l’heure évoqué la maîtrise de la langue française et l’attachement aux valeurs de la République, et je suis déçu que la gauche, attachée aux valeurs de Jaurès,…
…n’ait absolument aucune argumentation pour nous expliquer pourquoi ce ne serait plus nécessaire. Cet amendement aborde, lui, l’aspect matériel du processus d’intégration, mais pour montrer qu’il ne faut pas tomber dans le misérabilisme et que ces étrangers sont parfois en mesure de financer leurs formations et qu’ils démontreront dès lors leur capacité à s’intégrer à la communauté nationale puisque, demain, ils seront amenés à acquitter l’impôt.
Nous sommes d’accord sur un point, mes chers collègues : l’exigence d’intégration des personnes étrangères qui s’installent durablement sur notre sol.
Mais nous n’avons pas la même manière d’opérer à cette fin. Nous, nous pensons que le texte initial du Gouvernement, que nous avons repris en première lecture, que le sénat a détricoté et qui va être rétabli, est plus efficace pour satisfaire à l’exigence d’intégration.
Tout d’abord, vous avez évoqué la langue. Le ministre a annoncé dès le début, et il l’a redit, que nous allons relever l’exigence linguistique au niveau A2. L’exigence sera donc plus forte demain. Il faut bien le reconnaître pour être honnête intellectuellement. Nous allons de surcroît personnaliser les parcours permettant son apprentissage ainsi que l’orientation de ces personnes et leur sensibilisation aux valeurs de la République. C’est extrêmement important car, aujourd’hui, la standardisation du parcours tend à affaiblir l’efficacité de la mesure. C’est pourquoi le dispositif du contrat d’intégration républicaine, le CIR, est bien meilleur que celui du contrat d’accueil et d’intégration. Il est plus personnalisé, plus exigeant et s’applique sur une durée beaucoup plus importante. C’est en grande partie un contrat d’adhésion, la contrepartie apportée par l’État étant qu’il prend en charge les frais de formation. C’est le moins qu’il puisse faire lorsqu’il y a un engagement de part et d’autre. C’est pour cette raison que la commission a émis bien évidemment un avis défavorable sur ces amendements.
Le Gouvernement est absolument attaché au parcours d’intégration, un parcours qui comporte plusieurs étapes. Comme l’a dit à l’instant M. le rapporteur, la première étape repose sur un équilibre entre des droits et des devoirs pour le primo-arrivant. En l’espèce, celui-ci s’engage à suivre une formation linguistique, que l’État finance – ce sera sa part dans cet équilibre. Puis, dans un second temps, pour la délivrance de la carte pluriannuelle, il sera procédé à une vérification et de l’assiduité, et du niveau de langue acquis. Nous souhaitons préserver cet équilibre et c’est pourquoi j’émets un avis défavorable.
Je voudrais réagir à vos propos, monsieur le rapporteur. Déjà, au titre du projet de loi, « Droit des étrangers en France »,…
…il eût mieux valu substituer celui de « Droits et devoirs des étrangers en France » parce que nous insistons sur le fait que l’exercice doit être réciproque. Et puis vous êtes entré sur le terrain de la langue en disant qu’on va passer du niveau A1 au niveau A2. Pour les Français qui ne connaissent pas forcément la typologie des niveaux de langue, je rappelle qu’il y a A1, A2, B1, B2, C1 et C2. On sera donc au deuxième plus bas niveau de langue et que ce niveau correspond, selon le cadre européen de référence, aux utilisateurs débutants, ceux qui « peuvent comprendre des phrases isolées et des expressions fréquemment utilisées en relation avec des domaines immédiats de priorité, et peuvent communiquer lors de tâches simples et habituelles ne demandant qu’un échange d’informations simples et directes sur des sujets familiers et habituels », ou encore « décrire avec des moyens simples sa formation, son environnement immédiat et évoquer des sujets qui correspondent à des besoins immédiats ». Voilà le niveau que nous allons demander à des étrangers. Je ne suis pas certain que ce soit celui qui permette de travailler. Au contraire, il me semble que le niveau B1, « Utilisateur indépendant », voire B2, serait bien nécessaire si on veut qu’ils puissent se débrouiller et communiquer avec leurs enfants. Je veux bien qu’on ne leur demande pas d’avoir une maîtrise en français, mais tout de même… Vous ne demandez qu’un français sous-usuel correspondant seulement à des besoins immédiats. Il y a matière à un vrai débat et nous aurions dû tout à l’heure pouvoir développer ce type de problématique, à la fois très intéressante et très technique.
Je voudrais vous relater, madame la secrétaire d’État, mon expérience. Quand j’étais très jeune, j’ai décidé de faire des études aux États-Unis. Pour y parvenir, il fallait entre autres passer un examen linguistique – le TOEFL, test of english as a foreign language –, à la charge de l’étudiant. J’ai donc financé, étudiant pauvre, mon propre examen. Ce système perdure, ainsi que dans bien d’autres pays. À l’université Galatasaray, où j’ai enseigné, et au lycée Galatasaray, situés à Istanbul, ou aussi dans un certain nombre de lycées français à l’étranger, savez-vous que les formations linguistiques sont en général payantes ? Les Français et les étrangers qui placent leurs enfants dans nos lycées français payent pour l’enseignement de notre langue, sans que ces derniers aient pour autant la garantie de pouvoir entrer en France après. Mais ils font l’effort.
Au fond, il s’agit d’une question de justice. Au nom de quoi le contribuable français prendrait en charge l’enseignement du français pour n’importe qui venant de n’importe où, sans critère d’utilité pour notre société, sans le moindre filtrage ? Qu’on m’explique au nom de quelle justice, au nom de quel concept d’équité, un tel système peut être mis en place. Je verrai d’un tout autre oeil celui ou celle qui fera l’effort de venir vers la France en apprenant sa langue à ses frais plutôt que d’attendre que ça se passe en n’acquérant qu’un niveau minimum.
Ces interventions méritent que quelques éléments soient rappelés. Dans les lycées français à l’étranger – une question que je connais bien –,…
…les Français paient, certes, mais l’État français finance de nombreuses bourses, dont bénéficient un grand nombre de familles. C’est une bataille, monsieur Aubert et monsieur Lellouche, que vos collègues, Thierry Mariani et Frédéric Lefebvre, mènent lors de chaque projet de loi de finances : nous déposons d’ailleurs des amendements ensemble. Vous devriez donc suivre ce que font vos collègues qui s’intéressent à la question des lycées français à l’étranger.
La France ne dispose aujourd’hui d’un réseau mondial scolarisant 300 000 jeunes, dans plus de 450 établissements dépendant de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et de la Mission laïque, que parce que des familles locales paient beaucoup plus cher que des parents français pour en assurer le fonctionnement.
En cette heure tardive, monsieur Aubert et monsieur Lefebvre, je vois que vous utilisez les arguments qui vous passent par l’esprit.
Certes, l’Office français de l’immigration et de l’intégration – OFII – peut octroyer jusqu’à 400 heures de formation en français, mais ce budget provient essentiellement de taxes, que les étrangers acquittent également. Il ne s’agit donc pas, chers collègues, comme vous le dites d’une « prise en charge totale par l’État », qui offrirait « une formation totalement gratuite ». Je vous rappelle que, lors d’une demande de visa pour un long séjour, la formation reste à la charge du demandeur. Ne racontez donc pas n’importe quoi ! L’idée que les formations coûtent cher et ne servent à rien est fausse.
L’actualité récente, notamment les événements survenus ce week-end à Calais, montre le niveau que peuvent atteindre les exactions commises par des personnes en situation irrégulière ou en attente de régularisation sur le territoire national. Depuis des mois, les vingt-deux unités de forces mobiles – CRS ou gendarmes mobiles – déployées à Grande-Synthe ou à Calais,…
C’est votre fonds de commerce, mais vous n’y avez jamais mis les pieds !
…sont harcelées, chaque nuit, par des migrants, dont le comportement est de plus en plus violent.
Aujourd’hui, nous devons lancer un message très clair de fermeté. Nous devons dire, comme dans cet amendement, que tous ceux qui sollicitent, notamment par le biais d’une demande d’asile, d’être accueillis au sein de la République française doivent en respecter les valeurs – vous venez de le refuser.
Dans le même temps, si ces personnes violent les lois de la République, si elles troublent l’ordre public, elles verront leur demande de titre de séjour ou d’asile immédiatement interrompue :…
Ce principe est un principe de lucidité. Je vous vois protester, chers collègues. Vous laissez donc des personnes troubler l’ordre public…
Madame Bourguignon, si vous voulez prendre la parole, demandez-la, on vous la donnera. Pour le moment, nous écoutons M. Ciotti.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Dans le même temps, on continue de leur verser l’allocation temporaire d’attente,…
…on les héberge dans des CADA, des centres d’accueil des demandeurs d’asile, et on laisse ces exactions se poursuivre, même si des condamnations sont prononcées. Après une condamnation pénale, les personnes condamnées doivent être expulsées immédiatement. Ce principe doit être posé aujourd’hui.
Ce qui s’est passé à Cologne a soulevé une émotion immense dans toute l’Union européenne. Ces événements marquent une nouvelle étape vers la lucidité indispensable dont les pays européens, et en premier lieu le nôtre, doivent faire preuve.
En réponse aux propos de M. Lellouche, je préciserai à l’Assemblée un élément qu’elle ignore probablement : Thomas Paine, déclaré citoyen français et élu député du Pas-de-Calais, s’exprimait en anglais au sein de la Convention. Un traducteur lui était fourni par la Convention afin que ses auditeurs le comprennent. Cette précision m’a été suggérée par un historien qui nous regarde, et que je remercie.
Monsieur Ciotti, vous proposez le rejet d’office de toute demande de titre en cours d’instruction pour « toute condamnation pour violation du code pénal », y compris donc, si l’on suit votre logique, pour la plus petite contravention. Cette proposition est évidemment caricaturale : une demande de séjour doit être appréciée de manière globale, en évaluant des critères, de sécurité publique notamment – j’y reviendrai –, mais aussi le contexte familial ou la santé.
En outre, contrairement à ce qu’affirme M. Ciotti, le comportement délictuel et la menace posée à l’ordre public sont déjà très largement pris en compte par le CESEDA, le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. J’appelle d’ailleurs votre attention sur le fait que l’article 8 bis A du projet de loi complète la liste des crimes et des délits pouvant justifier le retrait du titre sur le fondement de l’article L 313-5 du code. Il se réfère notamment à l’ensemble des infractions relatives au trafic de stupéfiants, aux infractions relatives à la prostitution de mineurs et de personnes particulièrement vulnérables, aux infractions relatives à la réduction en servitude et au travail forcé, aux infractions relatives à la réduction en esclavage et à l’exploitation de personnes réduites en esclavage.
Avis défavorable, bien évidemment.
Monsieur le député, je ne peux pas vous laisser dire que le Gouvernement laisse, sans réagir, des personnes agresser des forces de l’ordre. C’est faux, vous le savez bien. Ce n’est pas ce que fait le ministre de l’intérieur.
Par ailleurs, vous le savez aussi, les personnes qui sont sur la lande de Calais n’ont pas demandé l’asile. Ils ne se trouvent donc pas dans la situation que vous décrivez et ne perçoivent pas de prestations de la part de l’État.
En outre, en 2015, le Gouvernement a procédé à 46 expulsions pour des menaces graves à l’ordre public. En ce qui concerne Calais, la préfète a prononcé trois obligations de quitter le territoire français – OQTF – pour atteinte à l’ordre public. Ces éléments apportent un déni clair et ferme aux propos que vous venez de tenir, monsieur le député.
S’agissant de votre amendement, les dispositions législatives actuelles prévoient déjà qu’une carte de séjour peut être refusée sur des motifs d’ordre public. Par ailleurs, en vertu du principe de proportionnalité et parce que l’administration doit se prononcer au cas par cas sur des décisions individuelles, il ne peut y avoir de position automatique sur l’un ou l’autre critère : la justice doit examiner chaque dossier, individuellement. C’est un principe général de fonctionnement, vous le savez.
Telles sont les raisons qui conduisent le Gouvernement à émettre un avis défavorable.
Sur l’amendement no 59 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Julien Aubert.
J’ai bien écouté l’argumentation de Mme la ministre et de M. le rapporteur, expliquant qu’il n’y avait pas grand-chose à modifier à l’état du droit. Si je connaissais les principes généraux du droit, particulièrement importants dans la Constitution, je découvre aujourd’hui le « principe général de fonctionnement ».
En tout état de cause, cette automaticité existe dans d’autres pays européens. Comme d’habitude, notre droit semble un peu à la traîne par rapport à celui de nos voisins. Au Royaume-Uni, la loi sur les frontières – UK Borders Act –, votée en 2007, permet l’expulsion des délinquants de manière automatique, même si des exceptions existent. En Belgique, depuis 1980, le bannissement d’un condamné est prononcé pour dix ans après qu’une peine de prison a été purgée.
L’amendement ne vise pas les peines de prison ! C’est « pour toute condamnation ».
Au Danemark, pays souvent cité en modèle par votre parti politique, madame la secrétaire d’État, le Parlement a approuvé, le 24 juin 2011, l’expulsion de tout étranger condamné à une peine d’emprisonnement à sa sortie de prison. Ce n’est qu’en France, malheureusement, que l’on considère comme normal de garder sur le territoire des étrangers qui ne respectent pas les lois françaises.
Les autres pays ont su trouver des solutions quand nous nous appuyons toujours sur de vagues principes généraux de fonctionnement. Mais ce ne sont pas ces principes qui résoudront les problèmes des Français !
Cet amendement relèverait-il du gag ? M. Ciotti sait parfaitement que l’ordre public peut être opposé, de façon systématique, ou presque. Viser « toute condamnation pour violation du code pénal », c’est inclure des blessures involontaires, aussi peu graves soient-elles,…
Soyons sérieux ! Vous demandez un scrutin public sur cette question, monsieur Ciotti. Je pense que nous sommes là dans le domaine du gag.
Monsieur Robiliard, les Français jugeront si nous sommes dans le domaine du gag. Considérez-vous comme un gag de taguer « Nik la France » sur une statue du général de Gaulle ? Nous considérons qu’il s’agit d’une atteinte extrêmement grave aux principes majeurs de la République.
Nous assumons cette différence avec vous. Vous considérez que les violations répétées des principes de notre loi pénale sont un gag.
Exclamations sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Lorsque quelqu’un vient demander à la nation française de l’accueillir, la moindre des choses, c’est qu’il en respecte les principes.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Ma circonscription se trouve de l’autre côté de la Seine, dans le quartier des grands magasins. Sur le trottoir, entre 100 et 200 mendiants roms, de nationalité roumaine ou bulgare, campent en permanence, soit avec des animaux, soit avec des bébés ou des enfants, par tous les temps. Je peux vous y conduire, mes chers collègues : ils y sont au moment où je vous parle.
Il y a donc là occupation du domaine public, mendicité agressive et parfois, voies de fait sur des touristes, en violation du code pénal, sur le territoire de la ville de Paris. Or personne ne fait rien : ni la police nationale, ni la Ville, ni l’État. Ils sont pourtant présents toute l’année !
Imaginons que quelqu’un gare sa voiture, ne serait-ce que pendant quinze minutes, sur les grands boulevards, à côté de l’un de ces campements : le véhicule sera immédiatement enlevé et son conducteur, verbalisé. Au contraire, les Roms, qu’ils soient roumains, bulgares, kosovars ou de tout autre nationalité, peuvent rester là deux ou trois ans, en toute impunité.
Pourtant, on est en pleine violation des règles du code pénal français et des règles de l’hospitalité. C’est ce sentiment d’impunité qui importe. Les Roumains sont certes européens, mais cela ne les empêche pas de se comporter comme des hors-la-loi et de violer en permanence la loi française.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants: 25 Nombre de suffrages exprimés: 25 Majorité absolue: 13 Pour l’adoption: 6 contre: 19 (L’amendement no 59 n’est pas adopté.)
L’article 1er est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 10 .
Nous abordons l’article qui porte sur la délivrance des cartes de résident, c’est-à-dire pour un séjour d’une durée de dix ans. On est donc censé parler de candidats à un séjour durable, à l’intégration à la communauté nationale. Or le texte adopté par la commission des lois, grâce au vote de la majorité des députés socialistes, prévoit qu’avant d’attribuer cette carte de résident, l’administration ne doit tenir aucun compte de l’engagement à l’intégration souscrit par l’étranger. Eh bien, nous, nous pensons – et c’est, mes chers collègues, une nouvelle différence entre le Parti socialiste et les Républicains – qu’avant d’attribuer une carte de résident pour dix ans, il convient de s’assurer de l’intégration de l’étranger en France. Il est donc nécessaire que les préfectures aient non seulement le pouvoir, mais le devoir de vérifier que l’engagement d’intégration est bien respecté. Voilà la raison pour laquelle nous présentons cet amendement.
L’objet de l’alinéa visé par l’amendement est simplement de supprimer des dispositions redondantes. Pour vous rassurer, monsieur Larrivé, et confirmer que nous avons bien la même exigence d’intégration pour l’attribution de la carte de résident, je vais vous lire l’article L. 314-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile tel qu’il sera issu du présent projet de loi : « La délivrance d’une première carte de résident est subordonnée à l’intégration républicaine de l’étranger dans la société française, appréciée en particulier au regard de son engagement personnel à respecter les principes qui régissent la République française, du respect effectif de ces principes et de sa connaissance de la langue française. » Vous m’accorderez que nous disons là la même chose que vous !
Il n’y a donc aucune raison de revenir sur la rédaction actuelle. Avis défavorable.
Oui, monsieur le président.
L’amendement no 10 n’est pas adopté.
Je voudrais faire une déclaration liminaire.
Tout à l’heure, l’opposition avançait qu’il y avait, suivant les années, 200 000 ou 250 000 entrées sur le territoire français. Or le solde migratoire en France est de l’ordre de 50 000. Cela n’a rien à voir avec la situation en Allemagne : on compare des choux et des carottes !
Vous savez pourquoi ? C’est parce que vous naturalisez 50 000 personnes par an !
Ce que vous dites, en faisant croire que les portes seraient ouvertes et qu’il y aurait des appels d’air, est tout simplement faux.
Mais peut-être soutiendrez-vous que les instituts de statistiques publics sont des menteurs ?
Cela ayant été dit, je présente une série d’amendements visant à simplifier les choses – car je juge important de dégager du temps pour les agents –, tout en améliorant la sécurité des étrangers présents régulièrement sur le sol français. Il me semble ainsi qu’une personne résidant en France avec un titre de séjour depuis cinq ans peut être réputée « intégrée ».
Monsieur Robiliard, l’avis de la commission sera le même que celui exprimé en première lecture et lors de l’examen en commission quand, déjà, vous aviez fait cette proposition : on ne peut présumer la bonne intégration d’une personne à partir du simple fait qu’elle séjourne sur notre territoire, fût-ce depuis cinq ans. L’appréciation de la condition d’intégration se fonde en effet sur plusieurs critères, que nous venons d’évoquer – je ne les énumérerai pas à nouveau –, parmi lesquels la maîtrise de la langue française. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Même avis.
L’amendement no 87 n’est pas adopté.
L’article 2 est adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 125 .
L’amendement no 125 est retiré.
L’amendement no 60 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 88 est dans le même esprit que votre amendement précédent, n’est-ce pas, monsieur Robiliard ?
Je souhaiterais toutefois préciser cet esprit, monsieur le président.
Il s’agit de permettre qu’une carte de séjour pluriannuelle soit immédiatement délivrée dans le cadre du regroupement familial. Comme vous le savez, ce dernier donne lieu à un examen effectif ; les dossiers sont très sérieusement traités, de sorte qu’il devrait être inutile de commencer par faire une demande de carte de séjour.
En outre, il serait dommage qu’en cas de changement de statut, la carte obtenue devienne une carte temporaire d’un an, même si la personne concernée avait bénéficié d’une carte pluriannuelle.
Le présent amendement vise à remédier à cette situation.
Je veux apporter une réponse très précise à M. Robiliard – comme je l’ai déjà fait, du reste, en commission.
Sur la forme, votre amendement, monsieur Robiliard, ne marche pas, puisqu’il vise à compléter un article du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’article L. 311-2, qui est abrogé par le présent projet de loi – étant précisé que cet article L. 311-2 se réfère lui-même à l’article L. 311-1, qui est entièrement réécrit par le projet de loi.
Sur le fond, votre amendement tend à faire de la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » une catégorie générique, avec une durée de validité de quatre ans. J’y suis défavorable – et c’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement – pour une double raison. D’abord, cela complexifierait la typologie, déjà extrêmement complexe – nous nous y perdons tous. Ensuite, cela ne respecterait pas le principe de progressivité du parcours de l’étranger.
En outre, vous déplorez qu’en cas de changement de statut la personne ayant obtenu une carte de séjour de deux ans en tant que conjoint de Français doive se contenter de demander une carte de séjour temporaire d’un an, mais tel n’est plus le cas dans la version actuelle du texte, qui fait suite aux travaux de la commission : l’étranger qui sollicitera la délivrance ou le renouvellement d’une carte de séjour pluriannuelle sur un autre fondement que celui au titre duquel avait été délivrée la carte de séjour dont il est titulaire bénéficiera de la carte de séjour demandée, sauf pour les cartes portant mention « salarié » ou « entrepreneurprofession libérale ».
L’amendement no 88 est retiré.
Le présent amendement traite de la situation des conjoints étrangers de Français.
Chaque année, environ 270 000 mariages sont célébrés en France, dont 45 000 dits « mixtes », et 45 000 mariages célébrés à l’étranger, la quasi-totalité entre un ressortissant français et un ressortissant étranger, sont transcrits sur le registre de l’état civil. Or l’accès au séjour des conjoints de Français a été considérablement durci depuis 2003.
La première loi Chevènement de 1998 avait prévu la délivrance de plein droit de la carte « vie privée et familiale » sous la seule condition d’une entrée régulière sur le territoire. La loi Sarkozy de novembre 2003 a ajouté l’exigence de communauté de vie depuis le mariage, puis la deuxième loi Sarkozy, de juillet 2006, est venue exiger la production d’un visa de long séjour. Toutefois, le législateur a précisé que ce visa ne pouvait être refusé qu’en cas de fraude, d’annulation du mariage ou de menace à l’ordre public. Néanmoins, nous le savons, pour le conjoint étranger d’un Français qui demande le visa dans un consulat de son pays d’origine ou de résidence, rejoindre son conjoint en France s’apparente souvent à un véritable parcours du combattant.
Le conjoint étranger d’un ressortissant de nationalité française bénéficie de plein droit de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale », à condition que son entrée en France ait été régulière, que la communauté de vie n’ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, si le mariage a été célébré à l’étranger, qu’il ait été transcrit préalablement sur les registres de l’état civil français. Toutefois, des conjoints se sont vu refuser des titres de séjour car la préfecture leur reprochait leur absence sur le territoire national ; or il ou elle effectuait les démarches nécessaires auprès des représentations consulaires dans leur pays d’origine, à la demande de ces mêmes autorités préfectorales.
Je finis, monsieur le président.
Il semble donc nécessaire de réformer le droit applicable aux conjoints de Français en supprimant l’obligation d’obtenir un visa de long séjour.
J’appelle votre attention, cher collègue, sur le fait qu’à la suite de l’adoption en nouvelle lecture d’un amendement que j’avais déposé, la délivrance d’un visa de long séjour aux conjoints de Français est de plein droit, conformément aux alinéas 17 et 18 de l’article 4 du présent projet de loi. Les seules exceptions prévues sont les cas de fraude, d’annulation du mariage et de menace à l’ordre public.
La commission a donc bien évidemment émis un avis défavorable sur cet amendement – indépendamment du fait que j’ai plaisir, cher Sergio Coronado, à parler de nouveau avec vous dans cet hémicycle du mariage et de ses conséquences !
Même avis.
Monsieur Coronado, dans l’exposé des motifs de votre amendement, vous dites que « de nombreux conjoints de Français ne pouvant justifier d’une entrée régulière ou s’étant vu délivrer un visa court séjour après un mariage en France doivent retourner dans leur pays d’origine demander un visa de long séjour. » Eh bien oui ! Car, comme vous l’avouez, le mariage de complaisance est devenu un des principaux moyens d’accès à la nationalité française.
Vous affirmez, monsieur Robiliard, que nous mélangeons des choux et des carottes. Moi, je maintiens que depuis des années, il entre en France quelque 270 000 à 300 000 personnes par an : 200 000 légaux, plus les demandeurs d’asile, plus les clandestins. Sur ces 300 000 entrées, on compte à peu près 100 000 naturalisations, dont une moitié se fait par décret, l’autre par mariage. C’est pourquoi les conditions d’accès au mariage sont importantes, à moins que l’on n’admette l’idée que l’on peut entrer en fraude : c’est d’ailleurs ce que dit M. Coronado.
On peut entrer en France sans justifier un titre de séjour, demander un visa de court séjour et ensuite se marier. Et après, on aurait un problème pour faire valider son mariage ? Eh bien oui, en effet !
Beaucoup de gens utilisent une telle méthode pour obtenir des papiers en France – et vous le savez !
Franchement, monsieur Lellouche, vous êtes partis, vous et vos collègues, pour nous présenter ce soir le concours international des préjugés, de la démagogie et de la caricature : on va avoir droit à tous les poncifs !
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Tout à l’heure, on a eu les étrangers voleurs, maintenant ce sont les mariages blancs, plus tard ce seront les gens qui abusent des prestations sociales ou qui font des enfants pour obtenir le regroupement familial.
Allez-vous allonger la liste toute la soirée ? À un moment donné, il faut redevenir sérieux, messieurs les députés ! On ne fait pas de la politique avec de la caricature et de la stigmatisation, on fait de la politique avec de la sincérité et des valeurs. Nous, nous assumons pleinement que les valeurs de solidarité et de fraternité font partie de nos politiques publiques en matière d’immigration,…
…et les Français le savent très bien. Vous ne les abuserez pas avec de grosses ficelles visant uniquement à dresser nos concitoyens les uns contre les autres, sur la base de caricatures et de poncifs.
Si vous pouviez éviter de nous infliger cela toute la soirée, ce serait bien !
Je veux bien que dans un débat sur l’immigration vous fassiez feu de tout bois, chers collègues, mais écoutez un peu ce que vous dites et faites attention à ce que vous lisez !
Mon amendement ne concerne pas l’accès au mariage. Je n’évoque que les couples déjà mariés, et des difficultés croissantes qu’ils rencontrent pour venir en France ou pour engager une démarche de naturalisation : à une époque, il fallait un an de mariage, désormais il en faut cinq révolus. C’est ce durcissement de la législation que je dénonce. Il s’agit donc, non pas de l’accès au mariage, mais de la stabilité en termes de séjour pour les couples déjà mariés.
Alors, la prochaine fois que vous voudrez faire une saillie au sujet de l’immigration, ne vous trompez pas d’amendement !
On a bien compris, monsieur Coronado, que vous vouliez revenir sur le dispositif Sarkozy et adoucir les conditions actuelles. Et l’on a bien compris, madame Carrey-Conte, que dès que quelqu’un exprimerait dans cet hémicycle une opinion un peu sensée – du moins, de mon point de vue – et surtout objective sur les conditions d’immigration, vous sortiriez tout de suite les grands mots.
Vous nous avez fait un procès d’intention, avec des propos très durs envers notre collègue Lellouche, et en employant le mot à la mode : « stigmatisation ». Tout est dit ! Voilà comment on tue le débat, au lieu de discuter de manière raisonnable et raisonnée des conditions d’immigration.
En plus, vous racontez n’importe quoi quand vous prétendez que nous montons les citoyens les uns contre les autres. Nous parlons des différences entre les étrangers et les citoyens français : il ne s’agit pas tout à fait de la même question. La ligne que nous suivons depuis le début, c’est de définir à quel moment et sous quelles conditions les étrangers peuvent être admis à entrer sur le territoire français. Et notre collègue Lellouche est parfaitement habilité à souligner qu’il y a beaucoup d’entrées irrégulières sur notre territoire et que l’on utilise le mariage pour se procurer la nationalité française – ce qui choque nombre de nos concitoyens !
L’amendement no 31 n’est pas adopté.
L’article 4 est adopté.
Article 4
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 164 .
Cet amendement vise à préciser l’objet du suivi sanitaire préventif des étudiants étrangers. Vous avez clairement manifesté votre volonté de voir les étudiants étrangers traités sur un pied d’égalité avec les étudiants français. Le Gouvernement partage cette volonté. La disposition que votre commission des lois a adoptée par le vote d’un amendement présenté par Mme Chapdelaine et le groupe socialiste ne dit rien de plus, rien de moins : les étudiants étrangers doivent bénéficier du même suivi médical que les étudiants français.
Vous en déduisez, à juste titre, que les étudiants étrangers doivent être déliés de l’obligation de se présenter à l’Office français de l’immigration et de l’intégration et vous avez raison. Il appartiendra au Gouvernement de tirer les conséquences de ces dispositions sur le plan réglementaire. Tel est l’objet de cet amendement.
La commission n’a pas pu examiner cet amendement ni rendre un avis à son sujet. J’émettrai à titre personnel un avis favorable. Je souhaite néanmoins préciser à Mme la secrétaire d’État l’objet de la discussion qui a conduit au dépôt, en commission, de l’amendement auquel elle fait allusion, sur l’initiative de Mme Marie-Anne Chapdelaine. Il s’agissait d’éviter que les étudiants étrangers soient soumis à une double visite médicale, redondante, à l’OFII et au sein de leur établissement d’enseignement supérieur. La précision que vous apportez est donc utile, madame la secrétaire d’État.
L’amendement no 164 est adopté.
L’article 4 bis, amendé, est adopté.
Nous en venons aux amendements à l’article 5.
La parole est à M. Pierre Lellouche, pour soutenir l’amendement no 132 .
Cet amendement vise à clarifier une question de fond s’agissant des choix de la France en matière de politique d’accueil des étudiants étrangers. M. le ministre a affirmé tout à l’heure, revenant sur la fameuse circulaire Guéant, qu’il fallait leur ouvrir les portes, faire en sorte que la France soit compétitive dans la mondialisation, ce qui se conçoit. Inviter des ingénieurs étrangers à se former en France, à venir créer une entreprise en France ou à travailler en France a du sens s’agissant d’un certain nombre de pays ; je pense par exemple à l’Inde, vivier de talents dans le domaine de l’informatique. C’est tout à fait différent, en revanche, pour les étudiants originaires d’Afrique noire ou d’Afrique sahélienne, qui représentent 50 000 à 60 000 étudiants sur les 212 000 étudiants étrangers dont je parlais tout à l’heure.
Dans un livre remarquable, Serge Michailof, qui a beaucoup travaillé à l’Agence française de développement et à la Banque mondiale, montre que le système des bourses scolaires ou des visas étudiants a pour conséquence l’appauvrissement de ces pays, le problème étant que, bien souvent, les étudiants qui en sont issus ne retournent pas dans leur pays d’origine. Il suffit d’ailleurs de s’entretenir avec les chefs d’État ou les ministres de ces pays pour comprendre à quel point il est délicat d’accueillir ces étudiants puis de les conduire ensuite à rejoindre leur pays d’origine. Je faisais allusion tout à l’heure à ma propre expérience d’études aux États-Unis : à l’époque, quand on signait le visa, on s’engageait à retourner dans notre pays d’origine et on ne restait pas aux États-Unis.
De la même façon, j’aurais aimé qu’une clause de retour soit prévue pour les pays que l’on doit aider, de façon à éviter un brain drain, une fuite des cerveaux organisée vers notre territoire, car c’est précisément ce qui se passe aujourd’hui avec le système des visas.
Le dispositif de l’article 5 comporte ainsi des éléments contradictoires. Il y est prévu de délivrer une autorisation provisoire de séjour d’une durée de validité de douze mois, non renouvelable, à l’étranger ayant obtenu dans un établissement d’enseignement supérieur un diplôme au moins équivalent à un master. Cette autorisation est toutefois étendue, sans limitation de temps, aux étudiants étrangers souhaitant poursuivre leur formation ou créer une entreprise en France. Se former en France revient donc à rester en France, ce qui ne me gêne pas, tant que cela ne revient pas à appauvrir le pays d’origine des étudiants en question. En d’autres termes, je n’ai rien à objecter s’il s’agit d’un informaticien indien, mais c’est un problème s’il s’agit des élites de pays sahéliens où il n’y a rien. En particulier, on trouve dans les services d’urgence des hôpitaux parisiens des médecins originaires de ces pays qui, au lieu de retourner chez eux, restent en France, car c’est plus confortable.
Laissez-moi terminer, monsieur le président ! C’est une question de fond, il n’y a rien de polémique dans mes propos !
Faites attention à ce que vous envoyez comme signal, chers collègues ! Si je suis d’accord pour ouvrir l’université française aux étudiants étrangers, je vous mets en garde contre le fait d’organiser la fuite des cerveaux.
L’avis est défavorable ; je vais expliquer pourquoi en quelques mots.
Vous relevez dans votre exposé sommaire une prétendue contradiction, monsieur Lellouche, mais je ne saisis pas bien où elle se trouve. L’autorisation provisoire de séjour, l’APS, renvoie à la structure fondamentale issue de la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration : elle vise à accorder à des étrangers particulièrement qualifiés un délai suffisant mais non renouvelable pour trouver un emploi en France. Ce dispositif s’inscrit donc dans une stratégie d’attractivité de notre pays, stratégie qui, vous l’avez rappelé, est utile.
Je vous rappelle que la France accueille 60 000 nouveaux étudiants étrangers chaque année, ce qui la place au cinquième rang mondial. Le projet de loi, d’une part, étend l’APS aux étudiants créant une entreprise dans leur domaine de formation, et, d’autre part, prévoit que les personnes concernées pourront, à l’issue de la période d’un an couverte par l’APS, se voir délivrer non seulement une carte temporaire de séjour d’un an renouvelable, comme c’est le cas aujourd’hui, mais également un « passeport talents » d’une durée de quatre ans, sous réserve bien sûr de remplir les conditions requises.
Le principe fondamental de l’APS, c’est-à-dire une période de recherche d’emploi pour les étudiants qualifiés suivie, le cas échéant, de la délivrance d’une carte de séjour à durée limitée mais renouvelable, demeure. D’ailleurs, le Sénat n’a fait que retoucher cet article sans en modifier le fond, et aucun de nos collègues sénateurs n’y a vu la contradiction que vous relevez.
Même avis.
Nous voterons contre cet amendement. Cependant, M. Lellouche évoque un sujet incontestablement important : la compétition internationale pour attirer des cerveaux. De ce point de vue, la circulaire Guéant a été désastreuse. Cependant, le problème est réel : il faudrait se préoccuper du seuil au-delà duquel la fuite des personnes qualifiées de certains pays handicape les perspectives de développement. Cette question doit toutefois être réglée à l’échelle internationale. Nous avons par exemple proposé de réfléchir à l’instauration d’une contribution de la part des pays développés qui, tous, cherchent à attirer les cerveaux. Vous avez fait référence à nos hôpitaux, monsieur Lellouche, en affirmant que les médecins étrangers y travaillaient parce qu’il était plus confortable pour eux de rester en France, mais la réalité, c’est que la plupart de nos hôpitaux ne pourraient pas fonctionner sans l’apport d’étudiants en médecine et de médecins étrangers.
Une question se pose donc qu’il faudra traiter un jour à l’échelle internationale : en deçà d’un certain seuil, l’expatriation permet le décollement économique d’un pays, mais au-delà de ce seuil, l’effet s’inverse. Quand 80 % des ressortissants qualifiés vivent en dehors du pays, comme c’est le cas pour Haïti, il n’y a pas de perspective de développement viable à court et à moyen terme.
Nous voterons donc contre cet amendement car ce que vous proposez n’est pas la bonne solution.
En aucun cas le texte du Gouvernement amendé par la commission ne comporte de contradiction.
Cela étant dit, le sujet mérite réflexion, en particulier de la part des parlementaires.
Tout d’abord, je remercie ma collègue Mme Mazetier, qui a compris mon argument, lequel n’est nullement polémique.
S’il y a une contradiction dans cet article, monsieur le rapporteur, c’est parce qu’il est question, au deuxième alinéa, d’une autorisation provisoire de douze mois, non renouvelable, tandis que les deux alinéas suivants disposent que, à l’expiration des douze mois, l’étudiant peut rester sur le territoire français pour une première expérience professionnelle ou pour une création d’entreprise.
C’est exactement ce que je veux combattre. Contrairement à ce que vous affirmez, l’article est rédigé pour que les étudiants étrangers restent sur notre territoire. Dès lors que c’est utile à l’économie française et qu’il n’y a pas de conséquence négative pour le pays d’origine, je n’y vois pas d’objection, mais dans le cas contraire, ce n’est pas souhaitable. Or, précisément, beaucoup d’étrangers qui étudient en France viennent d’Afrique de l’Ouest et du Sahel, où les pays ont terriblement besoin de cadres. Je vous renvoie à cet égard aux travaux de M. Michailof de l’AFD et à d’autres études sur le sujet ; si vous vous donnez la peine de les lire, vous verrez qu’il n’y a aucune contradiction dans mes propos.
L’amendement no 132 n’est pas adopté.
À la suite du débat sur l’amendement précédent, j’aimerais préciser préalablement qu’il ne faut pas confondre le fait de donner la possibilité à des étudiants étrangers d’avoir une première expérience professionnelle dans notre pays et le fait de participer à la fuite des cerveaux qui, en effet, handicape les pays concernés.
S’agissant à présent de l’amendement no 117 , il part d’un constat très simple : les salaires d’embauche des jeunes diplômés sont très différents selon les filières professionnelles. Je ne mentionnerai qu’un exemple : en 2014, la rémunération de première embauche pour un étudiant issu d’école de commerce était de 40 791 euros par an, contre 25 839 euros pour un diplômé de droit. Je propose donc que le décret dont il est question dans l’article ajuste les seuils selon la branche professionnelle à partir de l’observation des situations réelles d’embauche.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 147 .
L’amendement no 117 de Mme Corre a pour objet de remplacer le seuil unique de rémunération prévu pour l’étudiant titulaire d’un diplôme au moins équivalent à un master ou d’autres diplômes équivalents par une multiplicité de seuils déterminés par domaine professionnel. L’exigence d’une rémunération conforme au niveau d’étude permet de valoriser le diplôme obtenu et évite le dumping social et salarial.
L’amendement de Mme Corre, qui prévoit de fixer des seuils de rémunération potentiellement différents pour chaque domaine professionnel, se heurte à des difficultés de mise en oeuvre en raison du nombre de ces domaines, de la diversité des emplois et des aléas du marché du travail. Les services du ministère de l’intérieur, en lien avec ceux du ministère du travail, ont recensé plus de 700 branches professionnelles, et ce sont donc plus de 700 seuils différents que le décret devrait déterminer. Cet exercice, vous le voyez bien, compliquerait la lisibilité et le caractère opérationnel des dispositions que vous proposez, madame la députée.
Toutefois, parce que le Gouvernement partage votre souhait d’assurer la prise en compte des spécificités du marché du travail pour les jeunes diplômés, il a déposé un amendement tendant à prévoir que le seuil de rémunération puisse être modulé selon le domaine professionnel dans la mesure nécessaire. Cette disposition permettra, tout en maintenant un seuil de référence, de cibler les domaines pour lesquels une modulation apparaît pertinente, soit au regard des difficultés constatées sur le marché du travail pour cette branche, soit pour apporter le soutien nécessaire à un secteur. Nous donnerons ainsi à la modulation que la commission des affaires culturelles et vous-même aviez appelé de vos voeux toute sa portée et une forte lisibilité. Tel est l’objet de l’amendement que je dépose ; aussi, je vous invite à retirer le vôtre, madame la députée.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?
Je tiens tout d’abord à remercier Mme la secrétaire d’État d’avoir fait écho avec une grande précision aux intentions de la commission des affaires culturelles, qui avait, par votre intermédiaire, madame Corre, proposé d’adopter cette disposition, ce que l’Assemblée a fait en première lecture.
La commission s’est rangée à l’avis du Gouvernement, et a émis un avis favorable sur son amendement. C’est pourquoi je vous suggère de retirer le vôtre au profit de ce dernier, dont la rédaction, plus large, paraît offrir de meilleures garanties pour la prise en compte d’impératifs différents devant néanmoins être conciliés. En particulier, le principe d’égalité doit être pris en considération, ainsi que les spécificités de chaque domaine professionnel, comme vient de le rappeler Mme la secrétaire d’État. À défaut de retrait, l’avis sera défavorable.
Cet amendement, je le rappelle, avait été adopté par la commission des affaires culturelles : je n’étais donc pas seule à le défendre.
Je comprends la difficulté qu’il peut soulever pour le ministère du travail, mais les quelques mots ajoutés par l’amendement gouvernemental ne sauraient dispenser d’appliquer la disposition. Sous cette réserve, je retire mon amendement.
L’amendement no 117 est retiré.
L’amendement no 147 est adopté.
L’article 5, amendé, est adopté.
L’article 7 est adopté.
Nous avons eu le débat en commission, et M. Dolez y reviendra dans un instant. L’article 8 prévoit d’instaurer un contrôle à tout moment des conditions de séjour, de sorte que le titre de séjour pourrait être retiré sur un simple défaut de déferrement au contrôle. Cette mesure apparaît disproportionnée, la loi prévoyant déjà le retrait du titre lorsque les conditions ne sont plus remplies.
De plus, la loi ne précise pas les modalités du contrôle opéré par l’administration : sera-t-il aléatoire ou ciblé ? Sur quels critères reposera-t-il ? Ce flou est quelque peu gênant, et les réponses du rapporteur ne permettent guère d’y voir plus clair.
Dans l’avis qu’elle a rendu, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, « craint que la mise en oeuvre du nouveau texte n’ouvre la voie à des pratiques discriminatoires susceptibles d’être sanctionnées au regard des exigences des articles 8 et 14 de la CESDH », la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. La suppression de cet article nous apparaît donc plus prudente.
L’article, que cet amendement tend à supprimer, soumet les ressortissants étrangers à des contrôles continus et à des convocations inopinées de l’administration, à des fins de vérification, sous peine de retrait du titre ou de refus de son renouvellement. Cette disposition nous paraît disproportionnée.
La rédaction de l’article a évolué de façon à en ôter le caractère un peu soupçonneux – selon les termes employés en juillet dernier – et y introduire une procédure contradictoire, j’en donne acte au rapporteur. Cependant, l’article ne peut se lire qu’en regard du 25, dont nous demanderons également la suppression puisqu’il organise un droit de communication via un accès généralisé des préfectures à toutes sortes d’informations et de fichiers, sans respect du secret professionnel et en dehors de tout contrôle de l’autorité judiciaire, dans le but de détecter d’éventuelles fraudes.
La possibilité de ces contrôles continus et impromptus, combinée à la généralisation de l’accès aux fichiers et de l’échange d’informations, représente une immixtion disproportionnée de l’autorité administrative dans la vie privée des ressortissants étrangers. Cela nous paraît d’ailleurs contraire au principe du respect de la vie privée garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
En effet, monsieur Dolez, nous avons profondément modifié l’article 8 lors de la première lecture, pour les raisons que vous avez rappelées. Nous l’avons notamment expurgé du caractère un peu soupçonneux ou méfiant qui ressortait de sa lecture a priori. Je me rends compte, à vous entendre, que nous avons bien fait. Cet article introduit aussi le principe d’un échange contradictoire avec le ressortissant étranger.
Je ne souscris cependant pas à ces amendements de suppression, car la carte pluriannuelle ne sera une réussite que si l’étranger est en mesure de justifier qu’il répond, pendant toute la durée visée, aux exigences posées lors de l’obtention de cette carte. Je ne pense donc pas que les dispositions de l’article s’appliqueront au détriment des ressortissants étrangers, bien au contraire.
Aujourd’hui, les services préfectoraux jouissent d’une certaine assurance dans le contrôle puisqu’ils accueillent les titulaires d’un titre de séjour à leurs guichets plusieurs fois par an. Le contrôle s’opère ainsi de façon systématique, mais pas forcément de la façon la plus intelligente puisqu’il suffit aux ressortissants étrangers de se présenter au guichet et de compléter un dossier. Le contrôle doit être organisé plus intelligemment, intervenir a posteriori et sur la base, aussi, des dispositions de l’article 25.
C’est donc fort logiquement que la commission a émis un avis défavorable à ces amendements.
Je serai bref, puisque cet amendement s’inscrit dans la même logique que les deux précédents. Il propose néanmoins un mécanisme différent, qui imposerait la saisine de la Commission du titre de séjour lorsqu’il est envisagé de retirer ou de ne pas renouveler le titre de séjour d’une personne en situation irrégulière.
L’amendement no 92 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 8 est adopté.
La parole est à M. Pierre Lellouche, pour soutenir l’amendement no 134 .
L’amendement no 134 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 8 bis A est adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 121 .
Même avis.
L’amendement no 121 est retiré.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 11 .
Cet amendement est le premier d’une série dont je résumerai la teneur en quelques mots.
L’immigration, nous semble-t-il, est affaire de respect, non seulement des droits des personnes immigrées, mais aussi du droit de l’État. La délivrance de plein droit des titres de séjours doit donc être supprimée au bénéfice d’une appréciation concrète de l’autorité préfectorale, donc du Gouvernement, donc de la République, de la nation. La France a le droit de choisir qui elle souhaite accueillir sur son territoire.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’accorder une délivrance de plein droit de la carte de séjour : il faut donner au préfet, c’est-à-dire à l’État, la faculté d’apprécier, donc de refuser – car la France, ayant le droit de choisir, a aussi le droit de refuser certaines personnes sur son territoire.
Défavorable. Le présent article, qui s’inscrit dans une série de quelques autres, fait suite à l’application d’une directive de 2014 du Parlement européen et du Conseil établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers dans le cadre d’un transfert temporaire intragroupe.
Cette directive dispose que, « pour préserver l’unité familiale, les membres de la famille devraient pouvoir rejoindre la personne faisant l’objet d’un transfert temporaire intragroupe dans un autre État membre » ; d’où l’obtention d’un titre de plein droit pour les membres de la famille des stagiaires ICT. Avis défavorable.
L’amendement no 11 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 8 bis est adopté.
Il s’agit d’étendre le dispositif prévu pour les contrats à durée indéterminée – CDI – aux contrats à durée déterminée – CDD – d’une durée égale ou supérieure à douze mois. Les personnes étrangères qui bénéficient d’un tel contrat ont travaillé, donc cotisé : elles doivent avoir droit aux indemnités chômage. La disposition se coordonne avec l’article R. 5221-48 du code du travail.
Je veux répondre précisément à M. Robiliard, qui fait preuve de courage en défendant ses amendements avec le peu de voix qui lui reste…
Sourires.
Mes arguments, toutefois, ne lui feront sans doute pas plaisir ; je les ai d’ailleurs déjà développés en première lecture et en commission.
Le projet de loi change la logique de l’article L. 313-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui opère une distinction en fonction de la durée – plus ou moins un an – du contrat de travail.
La distinction ici proposée entre CDD et CDI n’est pas moins favorable que le droit actuel : elle déplace seulement le curseur. Cette distinction paraît au demeurant plus claire et plus pertinente.
Le CDD, même s’il dépasse un an, est de toute façon bref ; le CDI, lui, offre de toute évidence des perspectives de maintien sur le territoire qui justifient des mesures particulières de prolongement et de renouvellement du titre de séjour. Je ne reviens pas sur d’autres arguments que j’avais développés en première lecture. Avis défavorable.
L’amendement no 93 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 94 est retiré.
L’article 9 est adopté.
Actuellement, une personne étrangère doit démontrer que les soins dont elle a besoin sont complètement absents de son pays d’origine pour bénéficier d’un titre de séjour pour soins. Or, avec les dispositions proposées, cette personne devra simplement démontrer que le système de santé publique de son pays d’origine n’est pas en mesure de lui fournir les soins dont elle a besoin. Cet article est donc, une fois encore, un « aspirateur » à immigration.
Une envolée du nombre de personnes concernées et du coût sont à craindre, à l’image de ce qui s’est produit pour l’aide médicale d’État, avec laquelle on a connu les pires difficultés, si bien qu’elle est devenue un symbole qui divise les Français. Le nombre de ses bénéficiaires n’a cessé d’augmenter, et les dépenses de l’État enregistrent chaque année une forte progression.
Le budget alloué à l’AME, faut-il le rappeler, est ainsi passé de 588 à 744 millions d’euros en un an. De plus, le nombre de bénéficiaires s’accroît puisqu’il est passé de moins de 209 000 en 2011 à plus de 282 000 en 2013, soit une augmentation de 35 % en deux ans. Ces dérives budgétaires ont été pointées par la Cour des comptes qui, dans son rapport sur le budget de l’État de 2013, s’inquiétait d’une « insoutenabilité budgétaire » : nous n’inventons rien, c’est là la conclusion d’une institution parmi laquelle, chers collègues de la majorité, vous avez de nombreux amis. De nombreux professionnels de santé dénoncent aussi la multiplication des fraudes.
Ces chiffres démontrent la nécessité d’encadrer plus strictement un système qui fait l’objet de nombreuses fraudes et qui pourrait conduire la France à devenir un « hôpital international » gratuit et à accueillir un véritable tourisme médical. En effet, s’il faut préserver la double vocation humanitaire et sanitaire du dispositif, il convient de mettre en place des outils de régulation.
Aujourd’hui, tous les actes de médecine de ville et hospitaliers sont pris en charge pour le titulaire de l’AME, sans aucune avance de frais de sa part. Par conséquent, un titulaire de l’AME se trouve dans une situation plus avantageuse qu’un titulaire de la couverture maladie universelle – CMU – ou une personne qui travaille et cotise.
Cette situation conduit à un certain nombre d’abus auxquels il convient de mettre fin ; elle crée de surcroît un sentiment d’injustice très préjudiciable à la bonne intégration des étrangers. L’AME permet aujourd’hui d’obtenir des soins de confort, ce qui n’est pas son objectif puisqu’elle est censée répondre à des situations d’urgence.
Au moment où l’Angleterre et la Hollande, par exemple, restreignent les aides accordées aux étrangers en situation irrégulière, la France, paradoxalement, va à contre-courant en proposant des aides très attractives qui profitent à une immigration, non de réfugiés, mais de personnes arrivées en situation irrégulière. Compte tenu des difficultés que rencontre notre pays, il serait temps de changer de paradigme.
Je suis saisi de deux amendements identiques de suppression de l’article 10, nos 1 et 61.
La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l’amendement no 1 .
Cet amendement vise effectivement à supprimer l’article 10 qui modifie de manière importante la doctrine qui a prévalu jusqu’alors s’agissant de la prise en charge ou non de l’étranger devant se soigner en France.
En effet, auparavant, l’étranger devant être soigné en France devait démontrer que le système public de santé de son pays d’origine ne pouvait lui permettre de recevoir les soins dont il avait besoin car ils n’existaient pas.
Avec l’article 10 du projet de loi, l’étranger devra démontrer que le système de santé publique de son pays d’origine n’est pas en capacité de lui fournir les soins dont il a besoin, même si ceux-ci existent. Autrement dit, il ne suffira dorénavant plus que les soins existent dans son pays d’origine, il faudra qu’ils lui soient accessibles, notamment financièrement.
Mes chers collègues, une telle modification de la loi, qui peut, au premier abord, paraître anodine, est susceptible de créer, pour les filières, un véritable appel d’air et donc, pour l’État, une augmentation des dépenses.
Madame la secrétaire d’État, l’étude d’impact est, sauf erreur de ma part, silencieuse quant au coût de cette mesure. Le premier examen de ce texte ayant eu lieu l’an dernier, avez-vous aujourd’hui la possibilité de nous communiquer les éléments nécessaires à l’évaluation cette mesure ?
C’est important, car le nombre de personnes concernées par cette mesure, comme son coût, risquent de s’envoler, à l’image de ce qu’il s’est produit pour l’AME et que Valérie Boyer vient de rappeler : plus 35 % de bénéficiaires en deux ans, pour un coût avoisinant le milliard d’euros. On annonce même une dépense de 1,1 milliard d’euros pour l’année prochaine. Aussi, mes chers collègues, je vous propose de supprimer cet article.
Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.
Je veux ajouter à l’argumentation pertinente développée par Patrice Verchère que nous constatons souvent, notamment dans le cas des demandeurs d’asile dont la demande se voit rejetée par l’OFPRA, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, en première instance, puis par la Cour nationale du droit d’asile, la CNDA, en dernier ressort, et qui, ensuite, contestent l’OQTF – obligation de quitter le territoire français – qui a été prononcée à leur encontre par l’autorité administrative devant le tribunal administratif puis, en appel, devant le Conseil d’État, que quatre instances de contestation leur sont accessibles en vue de faire durer leur procédure.
Après que le Conseil d’État se soit prononcé sur leur OQTF, eh bien de façon récurrente ils peuvent suivre, à des fins dilatoires, et tout simplement pour faire durer le traitement de leur dossier, une nouvelle procédure au titre des étrangers malades.
Désormais, on va donc leur offrir encore une faculté supplémentaire pour poursuivre des voies de droit et compliquer l’action de l’administration lorsqu’elle doit les expulser, car elles n’ont aucune raison légitime de rester dans notre pays. En effet, désormais, l’étranger qui va solliciter un titre de séjour d’étranger malade ne devra plus simplement démontrer l’absence dans son pays d’origine des soins dont il a besoin, mais il devra également prouver que ces soins lui sont difficilement accessibles, y compris compte tenu de ses ressources.
Cela signifie que, ce faisant, nous ouvrons une boîte de Pandore. De ce fait, les procédures vont être, pour l’État, encore plus longues et encore plus difficiles.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements de suppression ?
Cet article 8 introduit deux changements fondamentaux – effectivement, vous avez raison de le souligner – dans les conditions d’attribution du titre de séjour « vie privée et familiale - mention étranger malade ». Dans un souci de coordination et d’unification de la doctrine, le premier de ces changements concerne l’avis donné par l’administration sur le dossier médical du requérant. Cet avis est communiqué au préfet qui décide ou non d’attribuer un tel titre.
Aujourd’hui, c’est le médecin de l’Agence régionale de santé – l’ARS – qui établit cet avis : demain, lorsque le texte sera en vigueur, cette mission incombera à un collège de médecins de l’OFII, l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Nous avons largement débattu de ce point en première lecture.
Le deuxième changement important, qui est celui sur lequel vous concentrez vos critiques, concerne la modification des dispositions qui permettent aujourd’hui à l’étranger d’être pris en charge sous réserve – c’est le droit actuel – de l’absence d’un traitement approprié dans son pays d’origine.
Effectivement, nous changeons cette disposition : un traitement peut en effet être dispensé dans un pays sans pour autant y être accessible à l’immense majorité de la population. J’ajoute, par ailleurs, que cette disposition concerne un nombre limité de titres de séjour. L’avis de la commission est donc bien évidemment défavorable sur ces deux amendements.
L’avis du Gouvernement est également défavorable car, à travers ces amendements, messieurs les députés, vous voulez revenir sur la réforme de la procédure « étranger-malade » qui a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale et qui a été rétablie par votre commission des lois.
La rédaction adoptée par la commission a pour ambition de répondre à deux difficultés. La première résulte de la définition légale du droit au séjour issue de la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité. Du point de vue du Gouvernement, la rédaction adoptée par la commission semble y répondre puisque des éléments de fait sont vérifiés : on vérifie notamment si l’étranger peut effectivement bénéficier ou non, dans son pays d’origine, du traitement concerné. Il s’agit donc d’une appréciation objective.
La deuxième difficulté vient d’être soulignée par le rapporteur : la pratique des ARS est hétérogène. Par conséquent, le dispositif qui est bâti va permettre, sous le contrôle du juge, d’avoir une pratique harmonisée de la délivrance des titres de séjour. Pour ces deux raisons, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements de suppression.
Je voudrais d’abord que nous examinions ensemble la rédaction actuelle du projet de loi, puis vous faire part de quelques observations tirée de l’expérience vécue de quelqu’un qui passe beaucoup de temps à l’international, qui parle aux ambassadeurs, qui parle aux consuls et nos consuls et qui sait donc, je crois, ce qui se passe.
S’agissant de la rédaction, l’alinéa 5 dispose : « si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié ». Prenons, un exemple, également tiré de mon vécu, celui d’un jeune français qui se rend au Canada ou aux États-Unis, pour y suivre des études. Eu égard aux caractéristiques du système de santé dans ces pays, si ce jeune est victime d’un accident dans la rue, il ne peut pas, parce que les soins sont beaucoup trop chers, bénéficier du traitement qu’on lui dispenserait ici. Donc, à cause des caractéristiques du système de santé, même aux États-Unis ou en Angleterre, il vaut mieux se faire soigner en France.
Autrement dit, vous êtes en train de créer une pompe aspirante non seulement à l’égard des pays pauvres, mais également à l’égard de pays riches où les conditions d’accès aux soins, qui sont chers, sont beaucoup plus réglementées. C’est une réalité.
Je vous renvoie, s’agissant d’affaires sérieuses, au quai d’Orsay : essayez de passer un moment, par exemple, avec nos consuls. Ils vous expliqueront les contrôles qu’ils ont effectués dans les hôpitaux, notamment de la région parisienne. On y découvre, en permanence, les abus de personnes qui réussissent à obtenir des papiers pour se faire soigner gratuitement en France.
Des soins existent dans leur pays d’origine, mais c’est tellement mieux – et tellement plus confortable – en France ! En outre cela ne coûte rien. Il y a donc énormément de fraudes et d’ardoises dans tous les hôpitaux.
Tout cela, mes chers collègues, doit être mis en rapport – nous sommes des responsables politiques – avec ce que nos concitoyens nous disent. Un retraité qui ne dispose que de toutes petites ressources, de l’ordre de 400 euros ou de 500 euros par mois, paye plein pot ! En outre, il ne dispose pas de mutuelle.
Il est, quoi qu’il en soit, rarement couvert à 100 % : beaucoup de gens n’ont pas accès à la gratuité des soins dont bénéficient un certain nombre d’étrangers. Et j’invite ceux qui voudront à m’accompagner derrière la gare Saint-Lazare : des centres de dialyse, qui offrent, deux ou trois fois par semaine, des séances à 350 euros, sont entièrement occupés par des étrangers financés par le contribuable français. Telle est la situation de notre pays.
Ne vous étonnez pas, ensuite, si le Front national réunit huit millions de voix.
Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Et vous ne vous étonnez pas si les Français préfèrent l’original à la copie…
Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.
Continuez donc comme cela ! Vous êtes en train de préparer une explosion dans tout le pays.
Ce que nous entendons dans l’hémicycle est très fin. Franchement, je suis atterrée.
Sourires.
…je voulais dire Pierre Lellouche, qu’il m’excuse de ce lapsus dû à l’heure tardive.
Je ne comprends pas plus que lui comment il ne vous saute pas yeux que vous êtes en train de monter les Français les uns contre les autres.
Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Vous aggravez le système d’injustice sociale : comment arrivez-vous aujourd’hui à expliquer aux Français que vous rencontrez, qui n’arrivent pas à payer leurs soins alors qu’ils ont cotisé pendant toute leur vie et qui ont des reste-à-charge…
Quand on vous le disait lors de l’examen de la loi santé, vous disiez que ce n’était pas vrai !
…que ces personnes qui arrivent clandestinement dans notre pays, pour des raisons économiques, ou de confort, car il est certes plus confortable de venir se faire soigner dans notre pays car il existe – vous le savez – des filières, vont, elles, bénéficier d’une prise en charge totale ?
Par ailleurs, je n’arrive pas à comprendre comment vous ne pouvez pas vous organiser avec les pays d’origine, qui ont souvent des moyens ainsi que des ressources naturelles, afin qu’ils payent les ardoises laissées dans les hôpitaux français, dont vient de parler mon collègue à l’instant.
Cette double injustice du déficit des établissements publics et de cette prise en charge totalement disproportionnée par rapport à celle des nationaux qui cotisent n’est plus possible aujourd’hui.
Enfin, la différence entre la France et les pays européens saute aux yeux : alors qu’ils restreignent les aides aux personnes étrangères, et notamment celles dont le séjour est irrégulier, nous rouvrons des vannes, au moment où nous devrions envoyer d’autres signaux !
Ce que vous nous proposez est absolument délétère.
Je voulais réagir à trois éléments.
Tout d’abord, j’ai entendu dire, tout à l’heure, que nous avions des copains à la Cour des comptes. Or, ses membres sont des magistrats, et on ne copine pas. Je ne pense pas que la Cour soit une institution qui copine : je trouve que le propos tenu à son égard est insultant pour elle.
Deuxième chose : nous ne traitons pas de l’aide médicale d’État qui, je vous le rappelle, constitue pour notre pays un rempart contre une source de maladies contagieuses et un problème de santé publique potentiels.
Troisième chose : de quoi parle-t-on ? Lisez l’alinéa 5 de l’article 10 : n’est concerné que l’étranger « résidant habituellement en France » et dont « l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité ». Et cela est vérifié puisque, actuellement, le médecin s’assure, dans un premier temps, de l’exceptionnelle gravité de ces conséquences puis de l’état du système de santé dans le pays d’origine.
Ce que vous nous dites, bien que nous sachions que, si nous renvoyons les personnes concernées dans leur pays, elles ne seront pas soignées alors que leur pronostic vital est engagé, c’est : tant pis pour elles !
Eh bien ce n’est pas la conception que j’ai de la France.
Bientôt ils vont nous dire que les centres de dialyse sont monnaie courante dans le Sahel !
Les amendements identiques de suppression nos 1 et 61, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Monsieur le rapporteur, je sais que vous allez me dire que ce n’est pas la première fois que vous donnez un avis défavorable à cet amendement. Cependant, jusqu’en 2006, lorsqu’une personne justifiait de dix ans – ou de quinze ans si elle avait été étudiante – de séjour en France, elle avait droit à un titre de séjour.
Au regard de cette durée, si notre administration a laissé cette situation s’installer, il faut que nous en tirions les conséquences et que nous acceptions une régularisation. Tel est le sens de cet amendement.
Je comprends bien, monsieur Robiliard, mais la commission a, sur ce sujet, emboîté le pas du Gouvernement et de son texte initial : elle ne souhaite en effet pas envoyer le signal d’une régularisation de plein droit après dix ans de séjour.
Au demeurant, en pratique, les ressortissants étrangers résidant en France depuis plus de dix ans obtiennent, très généralement, une carte de séjour temporaire sur l’un ou l’autre fondement du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, au titre des liens personnels et familiaux, de conjoint de Français, ou en raison d’une paternité.
Plus généralement d’ailleurs, la situation de ces personnes est déjà prise en compte par le dispositif de l’admission exceptionnelle au séjour. Il permet une telle admission soit au titre des liens privés et familiaux, soit au titre du travail, ainsi que le rappelle la circulaire du 28 novembre 2012.
En pratique donc, votre amendement est donc quasi-satisfait. Je confirme donc l’avis défavorable de la commission.
L’amendement no 95 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
Il s’agit de la suppression de l’exigence d’un visa de long séjour pour les conjoints de Français.
On nous a accusés de vivre dans un autre monde et de faire preuve d’angélisme face à la situation de notre pays. Quelqu’un que vous connaissez bien, cher collègue Lellouche, pour l’avoir fréquenté dans une vie militante et quand il était aux responsabilités, le Défenseur des droits a préconisé de supprimer, pour les conjoints de Français, l’obligation de production d’un visa de long séjour pour l’obtention d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale ». Il a considéré que cette obligation était contraire au droit européen et constituait une discrimination à rebours fondée sur la nationalité. En effet, les conjoints étrangers de citoyens européens résidant en France ne sont pas soumis à cette exigence.
Ce sont des préoccupations que nous partageons, et c’est la raison pour laquelle nous avons établi une délivrance de plein droit d’un visa de long séjour aux conjoints de Français. L’avis est donc défavorable.
L’amendement no 33 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 96 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 12 .
Madame la secrétaire d’État chargée la réforme de l’État et de la simplification, ma question touche au coeur de votre domaine de compétence ministérielle, puisque vous êtes chargée, si j’ai bien compris, de rationaliser la dépense publique pour faire des économies.
J’aimerais donc savoir quelle est l’évaluation par le Gouvernement de cette réforme des conditions d’admission au séjour des étrangers malades. Concrètement combien ça coûte au budget de l’État ou à celui de la Sécurité sociale ? Quel est le volume budgétaire que vous avez décidé d’y consacrer ? Quel est le montant de l’enveloppe budgétaire que vous allez demander aux Français de financer par l’impôt ou par des cotisations sociales supplémentaires pour cet élargissement des conditions d’admission au séjour des étrangers malades ?
Vous n’avez pas vraiment défendu votre amendement, monsieur Larrivé…
Il tend à supprimer la notion d’effectivité du bénéfice du traitement dans le pays d’origine. La commission lui a évidemment réservé un avis défavorable.
Avis défavorable.
Je ne pense pas, monsieur le député, que le type d’évaluation que vous me demandez ressortisse de mes attributions ministérielles, mais je crois en l’espèce que nous sommes sur plusieurs milliers de titres, sans que je puisse vous indiquer en cet instant le chiffre exact.
Je vous remercie de votre réponse, madame, mais je me permets une question complémentaire : pouvez-vous vous engager à ce que dans l’année suivant le vote – probable – de cette loi, un rapport conjoint des inspections générales de l’administration, des affaires sociales et peut-être aussi des finances nous dise très précisément quel sera l’impact budgétaire de la réforme que vous vous apprêtez à faire voter par l’Assemblée nationale ?
L’amendement no 12 n’est pas adopté.
Dans son cinquième alinéa, l’article 10 confie l’évaluation médicale aux médecins de l’OFII, désormais compétents pour accorder le droit au séjour pour raisons médicales. Un tel transfert de compétence nous paraît à la fois attester du désengagement du ministère de la santé et comporter le risque que l’OFII s’éloigne de l’objectif de protection et de prévention en matière de santé pour privilégier un objectif de gestion des flux migratoires et de contrôle des étrangers.
Je veux rappeler ici que le rapport de mars 2013 de l’inspection générale de l’administration et de l’inspection générale des affaires sociales sur l’admission au séjour des étrangers malades pointait la disparité des avis des médecins des agences régionales de santé et que ce rapport ne préconisait pas un tel transfert de compétence à l’OFII mais un travail plus collégial des médecins.
De même, la circulaire interministérielle du 10 mars 2014 encourageait une telle approche.
Je donne encore une fois acte à notre rapporteur que ces dispositions ont évolué puisqu’elles prévoient désormais que les médecins de l’OFII accompliront cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre de la santé. Cependant cette modification ne nous paraît pas suffisante pour garantir que l’évaluation médicale prendra en compte le strict intérêt de la protection de la santé et de la prévention.
Je rappelle également que, dans un avis du 15 janvier dernier, le Défenseur des droits a émis un certain nombre de doutes sur cette question. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui vise à maintenir l’évaluation médicale en vue de l’obtention d’un droit au séjour pour raisons médicales par les médecins des agences régionales de santé, sous la tutelle du ministère de la santé.
C’est un avis défavorable. Nous avons en première lecture été soucieux des remarques qui avaient été faites par certaines associations et par certains collègues qui laissaient penser que les médecins de l’OFII pouvaient se montrer un peu moins indépendants dans leurs avis que ceux de l’agence régionale de santé.
Je considère pour ma part qu’un médecin reste un médecin et qu’en face d’un patient ou d’un dossier médical il agit en professionnel de la médecine et non selon des prescriptions en matière de quotas de titres de séjour, par exemple.
Nous avons quand même, avec le soutien du Gouvernement, non seulement dans nos explications ici dans l’hémicycle comme en commission, mais aussi dans la lettre du texte, précisé que ces médecins accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. On ne saurait être plus clair, et c’est la raison pour laquelle j’ai le regret de donner un avis défavorable à votre amendement, tout en partageant, comme beaucoup d’entre nous, les arguments que vous avez développés.
L’amendement no 137 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
J’ai un peu de mal à comprendre que l’avis conforme des médecins puisse ne pas être une condition obligatoire.
Cette fois-ci c’est un collège de médecins qui va statuer et une circulaire du ministre encadrera leur mission. Je rappelle que l’administration préfectorale n’a pas accès aux documents médicaux, qui restent couverts par le secret médical, et que ce qui est communiqué aux médecins de l’OFII ne l’est pas à l’administration préfectorale.
Dès lors sur quelle base, à partir de quels éléments l’administration préfectorale pourrait-elle ne pas suivre un avis médical, alors qu’elle ne dispose d’aucun élément qui lui permettrait de le contredire ? Elle ne sait pas sur quelle maladie il porte. En toute rigueur intellectuelle, l’avis doit nécessairement être conforme.
L’avis conforme ne doit pas être une condition nécessaire, d’abord parce qu’il ne faut pas écarter la possibilité que le préfet puisse attribuer un titre de séjour alors que l’avis du collège des médecins de l’OFII est défavorable dans la mesure précisément où le préfet examine la demande de titre de séjour selon d’autres critères.
Par ailleurs, votre argumentation est réversible, mon cher collègue : il est possible aussi que le préfet ait accès à des informations auxquelles les médecins de l’OFII n’ont pas accès, par exemple l’existence de fraudes. Cela existe s’agissant de tels titres. Ne serait-ce que pour cette raison, et il y en a évidemment d’autres, il faut laisser au préfet la possibilité de refuser un titre de séjour et donc ne pas lier sa décision à l’avis du collège de médecins de l’OFII.
L’avis est donc défavorable, comme en première lecture.
L’amendement no 97 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 142 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 10 est adopté.
Article 10
C’est un débat que nous avons déjà eu en première lecture et en commission : il s’agit de la situation des parents d’un enfant gravement malade.
La loi prévoit qu’une autorisation provisoire de séjour, ou APS, est délivrée à la discrétion du préfet, à l’un des parents de l’enfant. Il est donc parfois obligatoire de choisir entre l’un des deux parents, qui se voit alors délivrer des autorisations provisoires de séjour tous les six mois, sans droit au travail. L’attribution de ces autorisations provisoires de séjour est le plus souvent réservée aux mères, ce qui constitue une forme de discrimination.
En commission, il a été prévu que l’un des deux parents recevrait cette APS et qu’elle ouvrirait droit à l’exercice d’une activité professionnelle. Cela ne règle pas la question du droit de vivre en famille, notamment en cas de maladie grave de l’enfant.
Je rappelle que dans son avis le Défenseur des droits recommande que le CESEDA soit réformé afin de contraindre le préfet à délivrer une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » sur le fondement de l’article L. 313-11 lorsque, après le premier renouvellement de l’autorisation provisoire de séjour, il s’avère que l’état de santé de l’enfant nécessite des soins de longue durée en France.
C’est pourquoi cet amendement propose une modification des textes permettant la délivrance d’un titre de séjour aux deux parents et une attribution des titres fondée sur l’égalité entre les membres du couple dans le soin apporté aux enfants.
C’est un avis défavorable. Votre amendement, qui a été rejeté par la commission des lois en première et en nouvelle lecture, vise à abroger l’article L. 311-2, qui permet la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour aux parents d’enfants malades, pour remplacer ce dispositif par la délivrance d’une véritable carte de séjour temporaire de plein droit aux deux parents ou aux titulaires de l’autorité parentale de l’enfant.
Il n’a pas semblé souhaitable à la commission d’aller jusqu’à la délivrance d’une carte de séjour dans le cas que vous visez, dans la mesure où le séjour des parents est lié au traitement et à la situation de santé de l’enfant, qui est évidemment variable. Donc avis défavorable.
L’amendement no 34 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 10 bis est adopté.
Article 10
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 13 tendant à la suppression de l’article.
L’amendement no 13 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 10 ter est adopté.
Article 10
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 14 tendant à la suppression de l’article 10 quater.
L’amendement no 14 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 10 quater est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 15 .
Je défends cet amendement car je souhaite que mes propos figurent au compte rendu.
Contrairement à ce que le ministre de l’intérieur a prétendu tout à l’heure, les députés du groupe Les Républicains ne se sont aucunement ralliés à la réforme proposée par le Gouvernement qui crée ces cartes de séjour pluriannuelles. Nous en tenons bien au contraire pour la position défendue par la majorité sénatoriale, et c’est la raison pour laquelle nous soutenons cet amendement.
L’amendement no 15 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 62 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 122 .
Défavorable.
L’amendement no 122 est retiré.
La parole est à M. Erwann Binet, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 84 .
L’amendement no 84 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Erwann Binet, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 161 , deuxième rectification.
Favorable à l’amendement no 161 , deuxième rectification.
L’amendement no 124 est retiré.
L’amendement no 161 , deuxième rectification, est adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 120 .
Défavorable.
L’amendement no 120 est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 16 .
L’amendement no 16 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 123 .
Même avis.
L’amendement no 123 est retiré.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 157 .
Il est défendu.
L’amendement no 157 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 17 .
L’amendement no 17 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 159 .
Il est défendu.
L’amendement no 159 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 11, amendé, est adopté.
Article 11
Il s’agit de donner à un salarié étranger employé sans titre de travail et donc en fraude par l’employeur tous les droits qui auraient été les siens.
Il convient d’être plus complet que ce que prévoit le projet en l’état. Tel est le sens de cet amendement.
L’amendement no 98 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Pourquoi, dans le cadre d’un travail dissimulé, donne-t-on à l’employeur un délai pour s’acquitter de ses obligations envers son salarié ? C’est proprement incompréhensible ! L’employeur est en infraction et le texte prévoit une mansuétude particulière à son égard !
Je trouve que mes collègues de l’opposition devraient se formaliser d’une telle situation...
L’amendement no 99 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 11 bis est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 18 visant à supprimer cet article.
Le Gouvernement souhaite dispenser d’autorisation de travail les étrangers qui viennent travailler en France pour moins de trois mois, ce à quoi nous sommes hostiles.
Nous proposons donc la suppression de cet article pour une raison très simple : la France compte, hélas, 5,7 millions de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle Emploi.
Nous considérons – singulièrement dans le secteur du BTP – qu’il faut prendre garde à la multiplication de séjours consécutifs de moins de trois mois dans le but de s’exonérer de la demande d’autorisation de travail.
L’adoption de l’article que vous proposez, madame la secrétaire d’État, encouragerait immanquablement une telle fraude à la loi.
Nous souhaitons maintenir le principe, la règle de l’autorisation de travail pour les ressortissants étrangers qui viennent travailler en France pour des durées certes très courtes, mais il s’agit d’une question de principe absolument majeure : la situation de l’emploi ne permet pas l’ouverture que vous proposez contre tout bon sens.
Vous l’avez dit, monsieur Larrivé, l’article 12 prévoit de supprimer l’autorisation de travail pour les séjours inférieurs à trois mois.
Je souhaite être précis s’agissant des missions et des profils de ces salariés. Cela concerne un public qui séjourne sur le territoire pour de très courtes périodes et pour des missions particulières : des chercheurs, des artistes, des mannequins. Leurs prestations sont très courtes et ils n’ont pas vocation à rester au-delà de trois mois.
Quelques chiffres : 43 323 demandes ont été formulées à ce titre en 2013 – je ne dispose pas de chiffres plus récents – le taux de refus s’élevant à 3 % seulement.
Ce sont ces chiffres qui justifient pour l’essentiel la suppression de cette autorisation. Il s’agit d’une mesure de simplification bien évidemment utile, madame la secrétaire d’État ne me démentira pas à ce propos me semble-t-il.
Avis défavorable de la commission à l’adoption de cet amendement.
Afin de compléter les propos de M. le rapporteur, je me propose de vous donner les chiffres de 2014 : 33 926 demandes d’autorisation ont été formulées, le taux de refus s’élevant à 2,5 %.
Comme l’a dit M. le rapporteur, la mesure que nous proposons est tout à fait justifiée dès lors qu’un dispositif existe afin d’éviter tout risque de détournement, la liste des domaines d’activité qui peuvent être concernés – la mode, la culture, la recherche, l’audit, le conseil juridique… – ayant été fixée par décret.
Cet encadrement permet à la fois d’avoir un dispositif simple répondant aux besoins de notre économie pour une période courte et, en même temps, la mesure que nous proposons ne dispense pas les services de contrôle de faire leur travail et de sanctionner les employeurs qui détourneraient la loi.
L’encadrement qui a été mis en place nous semblant répondre aux besoins et à la situation, nous sommes défavorables à l’adoption de votre amendement.
Je n’ai pas bien compris l’intérêt de la mesure du Gouvernement et des explications de Mme la secrétaire d’État.
Je constate que la situation de l’emploi, en France, est tout de même dramatique avec 7,7 millions de chômeurs.
Dispenser d’autorisation de travail des étrangers qui viennent travailler en France même pour une courte durée ne me semble pas être une mesure particulièrement favorable.
Ne voyant pas son intérêt, je suis favorable à l’adoption de l’amendement de mon collègue Larrivé.
Nous, nous ne voyons pas en quoi le fait de demander des autorisations de travail en plus du visa de court séjour pour exercer une activité professionnelle en France résoudrait d’une manière ou d’une autre la question du chômage de centaines de milliers de nos concitoyens.
Il s’agit de surcroît d’une charge extrêmement lourde.
Nous pensons en revanche que l’administration a beaucoup à faire afin de contrôler les abus de travail précaire, que cela concerne des travailleurs nationaux, internationaux ou étrangers.
Ce Gouvernement a mené une action résolue pour que, à l’échelle européenne, l’on mette fin au détournement de la directive sur les travailleurs détachés. Il combat donc les abus de droit et la multiplication de ces courts séjours qui s’enchaînent et qui concernent les mêmes travailleurs non régis par le droit national.
Cela, nous le faisons, mais nous ne comprenons pas en quoi l’ajout d’une demande d’autorisation de séjour au visa de travail et de séjour temporaire afin d’exercer une activité salariée répondrait aux questions qui se posent.
L’opposition se trompe d’outil, sans doute volontairement, pour lutter contre un fléau auquel ce Gouvernement s’est attaqué.
L’amendement no 18 n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 116 .
Même avis.
Pour les raisons que je viens d’indiquer, je ne vois pas très bien pourquoi – le Gouvernement pourra peut-être l’expliquer – on limiterait le bénéfice de cette mesure aux mannequins ou aux chercheurs. Des travailleurs qui viennent ponctuellement travailler moins de trois mois et qui repartent, on en compte en effet dans tous les secteurs !
Les mesures de lutte contre le travail dissimulé et contre le détournement de la directive sur les travailleurs détachés ne relèvent pas de l’exigence d’autorisation de travail associée à celle de l’obtention d’un visa.
Je ne vois donc pas pourquoi on complexifierait quelque chose qui est simple : quelqu’un vient travailler en France pour moins de trois mois, une autorisation de séjour est demandée pour ce motif-là et si on ne la respecte pas, non plus que la durée du visa obtenu, alors une sanction est possible.
Je ne vois pas pourquoi cela se limiterait aux mannequins et aux professions mentionnées dans une liste. Tel est le sens de cet amendement.
Où nos entreprises ont absolument besoin de simplicité, je ne vois pas la nécessité de complexifier. Je sais, madame la secrétaire d’État, que vous êtes sensible à cette dimension-là.
L’amendement no 116 est retiré.
L’article 12 est adopté.
Vous l’avez compris, je m’inspire beaucoup du Défenseur des droits, sans doute pour faire plaisir aux membres de l’opposition ici présents.
Le Défenseur des droits recommande ainsi d’inclure à l’article L. 311-3 du CESEDA « le fait que la carte d’un an délivrée de plein droit à l’étranger âgé de 16 à 18 ans déclarant vouloir exercer une activité professionnelle inclut bien les contrats d’apprentissage et de professionnalisation. »
Tel est le sens de cet amendement.
Il est déjà satisfait, monsieur Coronado puisque les contrats de professionnalisation et d’apprentissage sont considérés par le code du travail comme des contrats de travail au titre des articles L. 6221-1 et L. 6325-3 du code du travail.
Avis par conséquent défavorable.
Même avis.
L’amendement no 35 est retiré.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 101 .
Au début de la mandature et à l’initiative du président Bartolone, une mission d’information a été réunie autour de la question des chibanis, personnes âgées qui ont travaillé en France et qui ont vécu dans des foyers SONACOTRA, pour reprendre le terme d’alors.
Toute une ribambelle de recommandations avait été faite. Ce genre de rapport est d’autant moins fait pour rester dans les tiroirs qu’il a été très largement approuvé sur l’ensemble des bancs de cette Assemblée.
En l’occurrence, il s’agit qu’un chibani ne se voie pas opposer ses conditions de logement en foyer lorsqu’il veut engager une procédure de regroupement familial.
Qu’est-ce qui empêche de faire droit à cette demande alors que le consensus était très fort sur l’ensemble des mesures préconisées par ce rapport ?
Votre amendement, monsieur Robiliard, repose sur l’idée qu’après 25 ans de résidence en France, la condition de ressources devrait disparaître en matière de droit au regroupement familial.
Votre amendement se heurte évidemment à deux risques.
Le premier – clairement perceptible – est de faire venir des familles qui n’arriveront pas à subvenir à leurs besoins avec tout ce que cela suppose en termes de détresse matérielle, comme nous pouvons l’imaginer.
Je crois que l’on ne peut pas non plus écarter le risque d’être confrontés à des détournements et à l’établissement de liens conjugaux de complaisance concernant les chibanis.
Nous avons avancé sur cette question-là en première lecture et nous y reviendrons je crois un peu plus tard.
Avis défavorable.
Même avis.
L’amendement no 101 n’est pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 148 .
Par cet amendement, le Gouvernement souhaite reprendre à son compte un amendement présenté en commission par Mme Marie-Anne Chapdelaine et le groupe socialiste, républicain et citoyen, et qui a été déclaré irrecevable par la commission des finances, au titre de l’article 40.
Cet amendement visait à élargir l’accès au service civique des étrangers en situation régulière sur notre territoire et à permettre aux ressortissants de pays tiers titulaires d’une carte de séjour pluriannuelle, obtenue après au moins un an de résidence régulière, et ayant fait la preuve de leur intégration, d’accéder au service civique. Cette disposition permettra aux étudiants étrangers de s’engager, conformément aux objectifs du plan national de la vie étudiante. Tel est le sens de cet amendement, que je vous invite à voter.
L’amendement no 148 est adopté.
L’article 13, amendé, est adopté.
L’article 13 bis A est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 19 .
L’amendement no 19 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 118 .
Défavorable.
L’amendement no 118 est retiré.
L’article 13 bis est adopté.
Article 13
L’amendement no 113 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 103 .
L’amendement no 103 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 13 ter, amendé, est adopté.
Article 13
L’article 13 quater est adopté.
Article 13
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 21 .
L’amendement no 21 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 13 quinquies est adopté.
Article 13
L’article 13 sexies est adopté.
Article 13
Il s’agit de l’un des amendements que nous présentons pour restreindre les conditions d’accès au regroupement familial en France.
La proposition que nous faisons a été évoquée lors d’amendements précédents : c’est celle d’un contingentement. Si le Parlement définissait des contingents limitatifs d’immigration, ceux-ci s’appliqueraient au regroupement familial et, par hypothèse, le nombre d’étrangers admis à s’installer en France sur le fondement du regroupement familial diminuerait.
À défaut d’un contingentement impératif, que vous avez refusé, nous proposons de restreindre les conditions d’accès au regroupement familial en portant notamment à vingt-quatre mois la durée minimale à partir de laquelle ces demandes peuvent être formulées.
Nous constatons aujourd’hui que les titres délivrés pour l’accueil d’étrangers en situation régulière dans notre pays concernent massivement l’immigration familiale, qu’il s’agisse de regroupement ou de rapprochement familial, au détriment, d’ailleurs, d’une immigration de travail. Cette immigration familiale est de moins en moins maîtrisée et il convient aujourd’hui, compte tenu de nos capacités d’accueil, d’en limiter l’amplitude.
C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, que le délai à l’issue duquel un étranger pourra présenter une demande de regroupement familial soit porté de 18 à 24 mois, conformément aux jurisprudences en cours et conformément à ce qui s’applique par exemple en Allemagne, où la durée de séjour minimale est de deux ans.
Article 13
Le modèle social français, qui est très – voire trop – généreux, ne doit pas être, en lui-même, attractif pour les étrangers et les filières d’immigration illégale. C’est la raison pour laquelle il convient de revenir sur le système actuel de l’aide médicale d’État.
Jusqu’en 1993, il n’existait aucune condition de régularité de séjour pour accéder tant à l’assurance maladie qu’à l’aide médicale départementale, réservée aux plus pauvres. C’est la loi du 24 août 1993, relative à la maîtrise de l’immigration, qui a instauré une condition de régularité de séjour pour bénéficier de l’assurance maladie.
La loi du 27 juillet 1999, qui a créé, quant à elle, la couverture maladie universelle a conservé la distinction entre les personnes en situation régulière et celles en situation irrégulière de séjour sur le territoire. Elle a donc créé de manière complémentaire un dispositif dévolu à ces personnes, et financé sur crédits budgétaires : l’aide médicale d’État. Financée sur les crédits de la mission « Santé », le coût de l’AME pour le budget de l’État est passé de 75 millions d’euros en 2000 à près d’un milliard en 2015, soit une multiplication par 13 de son coût en 15 ans.
Comme un tel dispositif est très difficile à contrôler et qu’il n’existe nulle part ailleurs chez nos voisins européens, il est proposé de transformer l’AME en une aide médicale d’urgence – AMU –, comme l’avaient du reste voté nos collègues du Sénat.
Cet amendement vise à proposer, comme c’est le cas chez nos voisins allemands, de limiter la prise en charge par la solidarité nationale au traitement des maladies graves et des douleurs aiguës, aux soins liés à la grossesse et ses suites, aux vaccinations réglementaires et aux examens de médecine préventive.
Tel est l’objet de cet amendement. Vous constaterez que nous ne demandons pas la suppression de l’AME, mais une réforme profonde de celle-ci. Seule une refonte d’ampleur de l’AME permettra de réduire la dépense qu’elle induit, de sortir de la spirale haussière et de faire mieux accepter ce dispositif à nos compatriotes.
Je souscris bien évidemment à ce qui vient d’être dit par mon collègue Patrice Verchère. Je voudrais à mon tour défendre cet amendement, proposé par Guillaume Larrivé et le groupe Les Républicains, qui vise à remplacer l’AME par une aide médicale d’urgence, comme le Sénat l’avait voté, et comme l’Allemagne le fait, autour d’un panier de soins limité. Ce dispositif serait mieux accepté par la population.
Je rappelle que l’AMU est attribuée, non seulement sous conditions de résidence stable et de ressources, mais également sous réserve que la personne, si elle est majeure, se soit acquittée, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge, d’un droit annuel dont le montant est fixé par décret. Je rappelle aussi que nous avions fixé, pour l’AME, un ticket à 35 euros, ce qui me semblait tout à fait normal pour que ces étrangers puissent bénéficier de soins.
Nous proposons aussi que la prise en charge, assortie d’une dispense d’avance des frais, soit limitée à la prophylaxie et au traitement des maladies graves et des douleurs aiguës, aux soins liés à la grossesse et à ses suites, aux vaccinations réglementaires, ainsi qu’aux examens de médecine préventive. Il est vrai que vous voulez supprimer la vaccination obligatoire – c’est tout à fait catastrophique, mais c’est un autre sujet.
Cette mesure serait à mon sens une mesure d’égalité et de justice. Centrée sur un panier de soins bien défini, elle permettrait d’écarter tout problème de santé publique, tout en évitant de créer un aspirateur social en direction de notre pays, et surtout une inégalité entre des Français qui cotisent et des étrangers en situation irrégulière, qui bénéficient parfois d’une meilleure prise en charge qu’eux, ou même que nos retraités.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement no 66 . Il me semble que tout a été dit…
Certes, mais il est nécessaire que ce débat ait lieu aujourd’hui. Non seulement l’explosion des coûts liés à l’AME devient insupportable pour nos finances publiques, mais, surtout, ce système a démontré son incapacité à remplir la mission pour laquelle il a été créé. Ses dérives sont de plus en plus manifestes et l’on sait que ce système entretient des filières de fraude organisée par des passeurs.
Nous proposons donc de supprimer cette aide médicale d’État, qui a montré ses limites et qui n’est plus acceptée par nos concitoyens. Ceux-ci voient bien les déséquilibres qui se créent, avec des étrangers en situation irrégulière qui ont davantage de droits que les étrangers en situation régulière, ou même que les Français.
Nous proposons de substituer à l’AME une aide médicale d’urgence qui serait réservée, par définition, aux personnes en situation d’urgence, ainsi qu’aux cas de vaccinations réglementaires, aux examens de médecine préventive, aux soins liés à la grossesse et à ses suites, ainsi qu’au traitement des maladies graves et des douleurs aiguës.
Même avis.
Madame la secrétaire d’État, cette erreur de votre gouvernement sur l’aide médicale d’État restera comme l’un des marqueurs du quinquennat de François Hollande. Dès juillet 2012, à peine installée, la nouvelle majorité socialiste a pris deux décisions. La première, ce fut de supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires, ce qui revenait à refuser à 9 millions de salariés la possibilité de travailler plus, avec un résultat au bas de leur fiche de paie…
Dans le même temps, dès juillet 2012, vous avez choisi, mesdames et messieurs les députés socialistes, de généraliser l’aide médicale d’État, c’est-à-dire d’instaurer la gratuité totale des soins pour les étrangers clandestins. C’est votre choix ; c’est le choix assumé et répété du parti socialiste ; c’est un choix radicalement contraire à ce que nous proposons pour la France.
Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 5, qui permet de remettre en cause le droit au séjour d’un étranger en situation régulière dès lors que celui-ci a travaillé sans l’autorisation prévue à l’article L. 5221-5 du code du travail. Cette disposition est d’autant plus paradoxale que la circulaire publiée le 28 novembre 2012 par Manuel Valls, alors ministre de l’intérieur, prévoit une régularisation par le travail des étrangers en situation irrégulière.
Le travailleur étranger en situation irrégulière peut obtenir, au titre de l’admission exceptionnelle au séjour, une carte de séjour salarié ou travailleur temporaire : il s’agit de régularisations au cas par cas. L’étranger doit donc remplir des conditions d’ancienneté de séjour et de travail en France et doit déposer sa demande en préfecture.
Ce qui est paradoxal, c’est que cet alinéa donne le sentiment qu’un étranger qui travaille en situation irrégulière a volontairement fait ce choix. Or c’est bien souvent le contraire : le travailleur est soumis à de fortes pressions de la part des employeurs. Je ne comprends donc pas pourquoi le Gouvernement a décidé d’introduire cette disposition dans le projet de loi.
L’amendement no 36 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Nous abordons ici la question essentielle de l’éloignement, de la capacité de notre pays à éloigner les étrangers en situation irrégulière, ceux qui ont fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français.
La directive retour de 2008 prévoit une durée minimale de sept jours pour un départ volontaire. En première lecture, l’Assemblée nationale avait prévu la possibilité de prolonger ce délai de départ à trente jours. Nous proposons, comme le Sénat l’avait opportunément décidé, de ramener ce délai de trente à sept jours, comme c’est le cas dans d’autres pays.
L’amendement no 69 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 24 .
L’amendement no 24 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Erwann Binet, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 50 .
L’amendement no 50 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’amendement no 68 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 37 , repoussé par la commission et le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.
L’amendement no 38 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 104 .
L’amendement no 104 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 39 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Comme nous l’avons déjà souligné, l’expulsion est une mesure administrative prononcée à l’encontre d’un étranger dont la présence sur le sol français constitue une « menace grave pour l’ordre public ». Le présent amendement propose d’en élargir le champ en prévoyant que l’existence d’une menace pour l’ordre public est suffisante, sans que celle-ci soit nécessairement grave. Parallèlement – c’est un point essentiel de l’amendement –, celui-ci prévoit que, désormais, toute mesure d’expulsion à l’encontre d’un étranger emporte immédiatement et automatiquement le rejet de toute demande de titre en cours d’instruction. La personne qui fait l’objet d’une décision d’expulsion ne peut de façon incidente demander un autre titre de séjour sur un autre critère.
Je tiens à répondre rapidement à cette question qui a déjà été évoquée.
S’agissant du passage d’une menace grave à une simple menace, j’ai déjà expliqué mon refus en commission à l’occasion d’un précédent amendement. Ce serait contraire à la directive « retour ».
En ce qui concerne le rejet de toutes les demandes de titre en cours d’instruction, le droit actuel prévoit que toutes les délivrances de plein droit sont écartées en cas de menace à l’ordre public. Votre préoccupation est donc satisfaite.
Vous suggérez que la mesure puisse concerner également les demandeurs d’asile : or nous devons de toute façon instruire leur dossier jusqu’à leur terme, pour déterminer si l’étranger peut ou ne peut pas être renvoyé dans son pays d’origine sans être condamné à mort ou exposé à des faits de torture ou des actes de barbarie. La qualité de réfugié, en revanche, peut être refusée en cas de raison sérieuse de considérer que la présence en France de la personne concernée constitue une menace grave pour la sûreté de l’État. Votre amendement est donc selon moi satisfait. Avis défavorable.
Même avis.
Madame la secrétaire d’État, quelle est la différence entre une menace grave pour l’ordre public et une menace pour l’ordre public ? En réalité, si vous pensez comme nous qu’un étranger qui menace l’ordre public ne doit pas rester en France, et si, d’autre part, la directive « retour » interdit d’expulser cet étranger qui représente une menace insuffisamment grave pour l’ordre public au titre de la directive mais suffisamment grave, hélas, pour nos concitoyens, alors, la logique voudrait que vous engagiez à Bruxelles des modifications de cette fameuse directive.
L’argument, qui nous est souvent opposé, de la directive « retour » ne nous paraît devoir l’être éternellement. Cette directive est un texte européen qui a été négocié et qui peut être amendé, si les États en ont la volonté, pour tenir compte des réalités de notre époque.
Si le motif est l’ordre public, monsieur le député, l’obligation de quitter le territoire est d’exécution immédiate. Je ne comprends donc pas l’intérêt de votre question, si ce n’est d’ajouter un élément supplémentaire au débat.
L’amendement no 67 n’est pas adopté.
L’article 14, amendé, est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 160 .
Amendement rédactionnel.
L’amendement no 160 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 15, amendé, est adopté.
L’amendement no 40 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 105 .
L’amendement no 105 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 106 .
L’amendement no 106 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 16 est adopté.
L’article 17 bis A est adopté.
La parole est à M. Erwann Binet, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 143 .
L’amendement no 143 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement vise à interdire sans exception la rétention administrative de tous les mineurs, comme nous le recommande le Défenseur des droits dans son avis 15-17.
En encadrant la rétention des mineurs, cet article permet en fait sa légalisation, contestable à mes yeux, comme c’est le cas pour les centres de placement familial socio-éducatif – CFPSE – dans le projet de loi sur la protection de l’enfance, dont nous débattrons demain soir si nous achevons ce soir l’examen du présent projet. Cet enfermement d’enfant en centre de rétention a déjà été plusieurs fois considéré par la Cour européenne des droits de l’homme comme un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. En 2014, 5 692 enfants ont été ainsi enfermés, 110 en métropole et 5 582 à Mayotte. C’est aussi une recommandation du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, qu’il a exprimée le 20 janvier dernier.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 107 .
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 156 .
Amendement de précision.
L’amendement no 156 , accepté par la commission, est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 151 .
Sans entrer dans les détails, cet amendement garantit l’articulation entre les dispositions de l’article 18 A avec celles issues de la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile.
L’amendement no 151 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 18 A, amendé, est adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 25 , qui tend à supprimer l’article.
Nous soutenons que les centres de rétention administrative doivent être pleinement utilisés. La préférence donnée par le Gouvernement à l’assignation à résidence sur la rétention administrative n’est pas de bonne méthode si on veut accentuer l’effort de lutte contre l’immigration illégale.
Que faites-vous des condamnations de la Cour européenne des droits de l’homme ?
L’amendement no 25 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Erwann Binet, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 52 .
L’amendement no 52 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 149 .
Cet amendement a pour objet d’adapter le dispositif d’escorte devant les autorités consulaires, prévu à l’article 18, aux étrangers faisant l’objet d’un arrêté d’expulsion, d’une interdiction administrative du territoire ou d’une interdiction judiciaire du territoire.
L’amendement no 149 est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 150 .
Cet amendement vise à étendre le dispositif prévu à l’article 18 aux étrangers assignés à résidence, sur le fondement de l’article L. 742-2, pour la durée nécessaire à la détermination de l’État responsable du traitement de la demande d’asile.
L’amendement no 150 est adopté.
L’article 18, amendé, est adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 108 .
Cet amendement repose sur la même argumentation que celle de l’amendement de M. Coronado sur le même sujet : les mineurs n’ont rien à faire en centre de rétention.
L’exposé sommaire développe la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, à laquelle, me semble-t-il, il faudrait que nous finissions par répondre.
L’amendement no 108 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 26 .
Quelques mots, pour le compte rendu.
La loi de 2011 avait prévu que le juge des libertés et de la détention ne puisse, le cas échéant, intervenir que cinq jours après le placement en rétention de l’étranger en situation irrégulière.
Vous proposez de revenir à un délai de quarante-huit heures : ce faisant, vous compliquerez singulièrement les procédures d’éloignement et diminuerez, nous en sommes convaincus, le nombre des étrangers en situation illégale que les préfectures parviendront à raccompagner dans leur pays d’origine.
Cet article d’apparence technique contredit directement les allégations du ministre de l’intérieur lorsqu’il nous affirme qu’il veut lutter fermement contre l’immigration clandestine. Je le répète : en compliquant les procédures d’éloignement, vous affaiblirez nécessairement l’effort national de lutte contre l’immigration clandestine.
L’amendement no 26 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 109 .
L’amendement no 109 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 110 .
L’article 19 est adopté.
Cet amendement vise à améliorer les conditions d’éloignement en portant le délai de rétention de quarante-huit heures à vingt jours pour favoriser les mesures d’expulsion du territoire.
L’amendement no 70 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 19 bis A est adopté.
J’ai déjà abordé ce sujet dans la discussion générale. Cet amendement vise à ce que l’assignation à résidence soit une réelle alternative à la rétention et non pas une mesure de contrainte supplémentaire.
L’amendement no 140 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 20 est adopté.
L’amendement no 43 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’amendement no 141 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 158 .
Amendement de cohérence.
L’amendement no 158 , accepté par la commission, est adopté.
L’amendement no 44 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 22, amendé, est adopté.
Les articles 22 bis A, 22 bis et 22 ter sont successivement adoptés.
La commission a supprimé l’article 22 quater.
La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement no 28 , visant à le rétablir.
L’amendement no 28 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
Les articles 23 et 23 bis A sont successivement adoptés.
L’article 25 créé pour les préfets un droit de communication d’informations privées, de la part d’une longue liste d’administrations ou entreprises publiques et privées, à l’exception du secret médical. M. Dolez a évoqué le sujet dans le débat. Cette disposition, qui est fortement attentatoire à la protection des libertés individuelles et des données personnelles, inquiète les associations et la CNCDH qui, dans son avis sur le présent texte, « y voit une atteinte disproportionnée aux droits garantis à l’article 8 de la CESDH ».
Il est d’ailleurs regrettable que l’avis de la CNIL sur cet article n’ait pas été publié et que l’étude d’impact soit lacunaire sur ce même article, les moyens de lutte contre la fraude étant déjà suffisants.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article qui représente à nos yeux une dérive dangereuse.
Cet amendement est défendu, avec la même argumentation que celle de mon collègue Sergio Coronado.
Défavorable.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 111 .
Le dispositif mis en place par l’article 25 est extrêmement intrusif. On peut se demander si les étrangers ont droit au respect de leur vie privée !
C’est pourquoi je propose une autre rédaction de l’alinéa 2. D’une part, la communication de documents d’ordre privé par différentes administrations ou organismes ne doit pouvoir être demandée qu’en cas de suspicion de fraude. D’autre part, s’agissant d’une atteinte aux libertés individuelles, il convient de mettre en place un contrôle a priori par le juge des libertés et de la détention.
L’amendement no 111 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à M. Denys Robiliard, pour soutenir l’amendement no 112 .
Il s’agit d’un amendement de repli. Il ne reprend que la première disposition de l’amendement no 111 , à savoir l’exigence de la suspicion de fraude : on ne doit pas pouvoir demander sans raison à des administrations ou à des personnes des documents qui concernent un étranger. Pour le faire, l’administration doit, a minima, suspecter une fraude.
L’amendement no 112 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour soutenir l’amendement no 115 .
Cet amendement vise à exclure de façon expresse les données de connexion du champ du droit de communication. En effet, l’accès à de telles informations, sensibles au regard du respect du droit à la vie privée, ne peut intervenir que dans un cadre judiciaire ou pour le recueil des renseignements relatifs à la défense et à la promotion des intérêts fondamentaux de la nation.
Cette garantie ne concerne que les données de connexion ! Toutes les autres informations sont communicables !
L’amendement no 115 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.
L’article 25, amendé, est adopté.
Les articles 26, 26 bis, 27 et 28 sont successivement adoptés.
Cet amendement vise à supprimer l’article 28 bis A, introduit par le Sénat, qui crée une nouvelle infraction en cas d’usurpation d’un document d’identité ou de voyage. L’usurpation d’identité est déjà punie par la loi : cet article ne vise donc en réalité que les seuls étrangers, particulièrement les jeunes étrangers isolés.
Dans son avis no 16-02, le Défenseur des droits recommande la suppression de l’article et note qu’« à ce jour, lorsque les autorités judiciaires écartent un document attestant de la minorité d’un jeune au vu de résultats de tests osseux concluant à sa majorité, ce jeune se voit refuser une prise en charge par les services d’aide sociale à l’enfance, ce qui est déjà en soi une conséquence lourde. Avec cette nouvelle disposition, le refus de l’administration de considérer que l’acte est celui de l’intéressé pourra être interprété comme le fait pour le jeune d’avoir usurpé ce document. Ceci aura désormais une nouvelle conséquence, cumulative à la première : celle de commettre un délit. » Cette conséquence semble disproportionnée, compte tenu de l’absence de fiabilité des tests osseux et de la lourdeur de la peine – cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende – qui paraissait déjà bien excessive.
L’amendement no 46 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 28 bis A est adopté.
Je prendrai quelques minutes pour développer cet amendement, avec une argumentation très précise.
La loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d’asile a renforcé les garanties des personnes maintenues en rétention qui entendent présenter une demande d’asile, en inscrivant à l’article L. 551-3 du CESEDA les garanties prévues par la directive « procédure » du 26 juin 2013 et les jurisprudences européennes du Conseil d’État.
La Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt I.M. contre France du 2 février 2012, et le Conseil d’État, dans une décision du 30 juillet 2014, n’ont pas contesté le principe du délai de cinq jours, prévu par l’article L. 551-3 du CESEDA, pendant lequel un étranger retenu en centre de rétention administrative peut déposer une demande d’asile. Le Conseil d’État a cependant précisé les conditions dans lesquelles l’irrecevabilité d’une demande présentée postérieurement à ce délai pouvait être opposée, en excluant les cas dans lesquels la demande d’asile repose sur des faits nouveaux postérieurs à l’expiration du délai de cinq jours.
La rédaction actuelle de l’article L. 551-3 du CESEDA, issue de la loi du 29 juillet 2015, répond à l’ensemble de ces exigences. D’abord, la jurisprudence du Conseil d’État sur les demandes déposées au-delà du cinquième jour est inscrite dans la loi. Ensuite, l’article L. 551-3 du CESEDA prévoit que tout retenu doit pouvoir bénéficier d’une assistance juridique et linguistique. Je rappelle que tout retenu reçoit également, dès son placement en rétention, une information sur les droits qu’il est susceptible d’exercer en matière de demande d’asile.
En revanche, cette disposition ne règle pas explicitement les cas de demandes d’asile présentées au dernier moment, dans le seul but de faire échec à la mise en oeuvre effective et imminente de la mesure d’éloignement. Cette situation recouvre le cas d’étrangers, après le cinquième jour de la rétention, pour lesquels l’administration dispose de tous les éléments utiles permettant de mettre en oeuvre l’éloignement et de programmer un départ devant intervenir rapidement.
Face à des demandes d’asile ne reposant sur aucun fait nouveau et déposées dans le seul but de faire échec à cet éloignement, l’autorité administrative doit pouvoir opposer elle-même l’irrecevabilité. On ne peut en effet contraindre l’administration à annuler en toutes circonstances l’éloignement programmé, sauf à rendre le dispositif vulnérable à des manoeuvres dilatoires tendant à instrumentaliser la procédure d’asile en vue de faire échec à ces mesures d’éloignement.
Aussi, l’amendement no 152 vise non seulement à limiter ces cas d’abus de procédure, mais aussi à circonscrire clairement le champ de cette appréciation administrative. C’est l’autorité administrative qui, dans ce cas, doit apprécier en urgence le caractère dilatoire de la demande, en considérant l’ensemble des éléments de contexte extérieurs au fond de la demande. Je vous demande de bien vouloir adopter le présent amendement, qui apporte cette précision.
L’amendement du Gouvernement vise à répondre à une véritable difficulté. Les dernières semaines ont montré une multiplication des demandes d’asile que l’on peut sans trop hésiter qualifier de « manifestement dilatoires ». Comme vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, la possibilité d’une requête en ce sens est préalablement signifiée à l’étranger. Il arrive qu’elle soit d’abord refusée par ce dernier, pour être finalement formulée au tout dernier moment de manière à faire échec à un éloignement déjà organisé. Or la demande d’asile doit pouvoir être présentée à tout moment – c’est une exigence de notre droit sur laquelle personne ne souhaite revenir.
L’amendement prévoit d’opposer une irrecevabilité aux demandes d’asile manifestement dilatoires.
Cette décision pourrait évidemment être contestée par les voies de recours habituel, y compris dans le cadre d’un référé-liberté jugé en quarante-huit heures par la juridiction administrative. Il s’agit d’une première garantie.
Par ailleurs, la demande formulée dans les cinq premiers jours de la rétention ne pourra être écartée de la sorte. C’est une deuxième garantie au profit des personnes effectivement persécutées dans leur pays.
Le sous-amendement no 162 , que Mme Mazetier et moi-même avons déposé, prévoit une troisième garantie : l’irrecevabilité manifeste ne pourra être opposée qu’à l’encontre des étrangers provenant des pays considérés comme sûrs par l’OFPRA, de façon à empêcher strictement les éloignements préjudiciables à un demandeur d’asile fondé à solliciter la protection de la France, même si l’on pourrait alors s’interroger sur les raisons qui l’avaient conduit à refuser de solliciter une protection à son arrivée sur le territoire ou au début de sa rétention.
Vous l’avez compris, nous souhaitons encadrer le dispositif au maximum afin d’éviter toute atteinte au droit d’asile, même dans des situations objectivement théoriques.
La commission n’a pas examiné ce sous-amendement no 162 . À titre personnel, j’y suis évidemment favorable, puisque c’est moi qui l’ai déposé avec Mme Mazetier. Sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, je suis favorable à l’amendement no 152 du Gouvernement.
Je m’interroge sur la compatibilité de l’amendement no 152 , modifié par le sous-amendement no 162 , avec le droit européen tel qu’il a été interprété par le Conseil d’État dans son arrêt du 30 juillet 2014, auquel vous vous êtes vous-même référée, madame la secrétaire d’État. Cet arrêt exigeait un examen des demandes d’asile au cas par cas. Or la reconnaissance de la qualité de réfugié et l’octroi de la protection subsidiaire ne relèvent pas de l’administration préfectorale, mais de l’OFPRA. Cet office répond dans des délais extrêmement brefs – normalement en quatre-vingt-seize heures, mais on sait qu’il peut aussi répondre beaucoup plus rapidement. La procédure intègre d’ailleurs la notion de pays sûr : dans ce cas, le traitement du dossier est plus rapide.
Il me semble important que ce soit toujours l’OFPRA, et non l’administration préfectorale, qui statue sur les demandes. Or l’amendement no 152 opère de façon assez claire le transfert à l’administration préfectorale d’une compétence qui devrait relever de l’OFPRA. Je ne nie pas l’existence de fraudes, mais je crois qu’il faut les combattre autrement, en préservant les droits de l’OFPRA.
Je me souviens qu’en début de séance, certains membres de l’opposition évoquaient les chiffres de l’asile, notamment les demandes frauduleuses. Sollicitée par M. Larrivé, Mme la secrétaire d’État a alors répondu de façon très ferme et très claire – pour une fois ! – qu’il fallait s’en tenir au texte et qu’il était scandaleux de mélanger l’asile et l’immigration, qui faisaient l’objet de deux textes séparés. D’ailleurs, nous avons déjà voté une loi relative à la réforme du droit d’asile, dont la rapporteure est ici présente. Avec cet amendement, madame la secrétaire d’État, vous ne vous privez pas de faire allègrement, et surtout en fin de séance, ce que vous interdisez aux autres.
Cet amendement me paraît pour le moins problématique. Notre collègue Robiliard vient de rappeler qu’il déplaçait le centre de décision ; or je suis moi aussi favorable à ce que l’OFPRA continue à traiter ces dossiers, et à ce que des garanties soient maintenues au bénéfice des demandeurs d’asile.
Même si la liste des pays sûrs fait débat – nous l’avons déjà eu, et nous n’allons pas le refaire à cette heure tardive –, le sous-amendement no 162 encadre la procédure. Cela étant, je m’étonne qu’au détour d’un amendement du Gouvernement, qui n’a même pas été discuté en commission, on essaie de limiter de manière aussi drastique la possibilité de déposer une demande d’asile.
Sagesse, monsieur le président.
Le sous-amendement no 162 est adopté.
L’amendement no 152 , sous-amendé, est adopté.
L’amendement no 51 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L’article 29, amendé, est adopté.
L’article 30 est adopté.
Mes chers collègues, vous souhaitez créer, assez bizarrement, une nouvelle procédure d’accès à la nationalité française, non par naturalisation, c’est-à-dire par décision explicite de l’autorité publique, mais par déclaration. Il s’agit en réalité d’une procédure automatique, qu’on pourrait qualifier de « droit du sol hors sol », puisqu’elle consiste à donner automatiquement la nationalité française à des personnes arrivées en France et qui ont la particularité d’être frères ou soeurs d’un étranger ayant acquis la nationalité française en vertu du droit du sol.
Cette procédure supplémentaire ne nous paraît aucunement justifiée. Nous nous en tenons à l’idée que la République a le droit de choisir qui elle souhaite voir rejoindre la communauté nationale, via la procédure de naturalisation, sans qu’il soit opportun de créer cette voie supplémentaire du « droit du sol hors sol ».
C’est encore une différence entre la majorité socialiste et l’opposition républicaine qui s’exprime sur ce texte. On voit là deux approches très différentes de l’immigration et de l’accès à la communauté nationale.
La parole est à M. Éric Ciotti, pour soutenir l’amendement identique no 72 .
Faisons remarquer que Mme Maréchal-Le Pen avait déposé le même amendement !
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l’amendement no 144 .
Avis également défavorable.
L’amendement no 144 est retiré.
La procédure d’obtention de la nationalité française relève d’une législation hybride qui procède à la fois du droit du sol et du droit du sang. Nous devrons – peut-être pas ce soir – poser la question de l’évolution de cette procédure d’acquisition de la nationalité.
Par cet amendement, je propose que la nationalité française acquise au travers du droit du sol ne demeure en vigueur que pour les enfants nés en France de parents de ressortissants d’un des vingt-huit pays de l’Union européenne.
Les enfants nés de parents extracommunautaires n’obtiendraient plus automatiquement la nationalité française à leur majorité, mais ils pourraient bien entendu l’obtenir en passant par la procédure classique de naturalisation.
Cet amendement restreint l’acquisition automatique de la nationalité française à l’âge de la majorité pour les enfants nés en France de parents étrangers aux seuls ressortissants de l’Union européenne, comme vous venez de le rappeler.
Deux questions se posent. Premièrement, pourquoi privilégier les Européens qui n’ont pratiquement rien à gagner d’une naturalisation puisque la citoyenneté européenne leur donne pratiquement tous les droits dont disposent les Français jusqu’au vote et à l’éligibilité dans les scrutins locaux ?
Deuxièmement, pourquoi exclure les enfants qui ont passé toute leur vie en France au seul motif qu’ils ne viennent pas de l’Union européenne ? Pourquoi considérer qu’un Suisse, un Laotien, un Québécois, un Libanais, un Marocain, qui parle français, provenant de pays qui ont une histoire commune avec la France, serait plus éloignés de la nation française qu’un ressortissant d’Europe septentrionale ou orientale ?
Cet amendement crée une inégalité de fait entre les enfants qui ont reçu la même éducation, celle que dispense l’école de la République. Il n’y a pas à établir de hiérarchie entre eux.
Avis très défavorable, donc.
L’amendement no 73 , repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.
L’article 30 bis est adopté.
Article 30
L’article 30 ter est adopté.
Nous examinons en nouvelle lecture le texte relatif au droit des étrangers. Nous en connaissons les trois priorités, elles ont été rappelées. Ce texte s’applique naturellement à l’ensemble du territoire national ou presque et contient quelques dispositions propres à l’outre-mer. Parmi ces dispositions, il convient de relever celles attachées à la situation spécifique que trois territoires d’outre-mer connaissent en matière d’immigration : la Guyane, Saint-Martin et Mayotte.
Pour nous en tenir à ce dernier territoire, que je connais le mieux, le CESEDA y a été étendu par ordonnance du 7 mai 2014 prise à l’occasion de sa « rupéisation » le 1er janvier 2014. Cette ordonnance contient donc un certain nombre de dérogations compatibles avec le droit européen et qui tiennent compte de la réalité locale.
Cette réalité locale, la Cour des comptes l’a encore rappelé dans son récent rapport thématique sur la départementalisation de Mayotte que j’ai évoqué cet après-midi en séance. L’Observatoire départemental de l’immigration a précisé la semaine dernière quelques données : une proportion indéterminée de personnes en situation irrégulière, plus de 18 000 reconduites à la frontière annuelles, une activité de la préfecture de Mayotte trois fois supérieure à celle de la Seine-Saint-Denis et dix fois supérieure à celle des Bouches-du-Rhône.
Le présent article comme d’autres dispositions dans le texte participe de cette démarche d’adaptation. Je sais qu’elles surprennent parfois ou choquent certains. Mais quiconque connaît l’ampleur de l’immigration clandestine dans ces territoires, son impact sur les politiques publiques comprend la nécessité de préserver des outils permettant aux services de conduire une difficile lutte contre ce phénomène à la hauteur des enjeux auxquels font face ces territoires.
C’est au vu de ce qui précède que j’ai été vigilant à tous les amendements qui auraient pu venir perturber le fragile équilibre bâti par l’ordonnance précitée. Et il est important que ces réalités souvent traitées par voie d’ordonnance soient dites de temps en temps devant la représentation nationale.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 165 .
Amendement rédactionnel.
L’amendement no 165 , accepté par la commission, est adopté.
L’article 31, amendé, est adopté.
L’article 32 est adopté.
L’article 34 bis A est adopté.
La commission a maintenu la suppression par le Sénat de l’article 34 bis.
L’article 35 est adopté.
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 155 rectifié , portant article additionnel après l’article 35.
C’est le dernier amendement, mais il est important. Il s’agit de préciser les conditions d’entrée en vigueur des dispositions du projet de loi et de traiter de la période transitoire. L’amendement organise l’entrée en vigueur ; il sécurise la période transitoire en prévoyant le plus souvent que les nouvelles normes ne s’appliqueront pas aux procédures en cours, mais seulement à celles initiées après leur entrée en vigueur.
On peut distinguer plusieurs cas. Tout d’abord, certaines dispositions entrent en vigueur immédiatement. Il s’agit en particulier de celles améliorant la protection des droits, c’est-à-dire la dispense de la condition de ressources pour solliciter le regroupement familial au bénéfice des étrangers titulaires de l’allocation adulte handicapée et la réforme du recours contre les OQTF outre-mer qui assure la possibilité de bénéficier d’une suspension d’éloignement.
Deuxièmement, le contrat d’intégration républicaine, qui est à part, est reporté au plus tard au 1er juillet 2016 pour tenir compte des délais de mise en place réduits au minimum compte tenu de la priorité accordée par le Gouvernement à ce sujet.
Troisièmement, certaines dispositions, du fait de la complexité des normes réglementaires nécessaires à leur applicabilité et des délais à prévoir pour la saisine du Conseil d’État, voire de la CNIL, sont reportées à une date fixée par décret au plus tard au 1er novembre. Il s’agit en particulier de la carte pluriannuelle et du « passeport talent », de la réforme du contentieux de la rétention.
Quatrièmement, d’autres dispositions sont reportées à un délai plus lointain car elles nécessitent un temps d’adaptation particulier pour les services ; au 1er janvier 2017, le transfert à l’OFII de la procédure relative aux étrangers sollicitant leur admission au séjour pour soins, et au 1er janvier 2018, pour les dispositions relatives à la mise en place du contrat d’intégration républicaine à Mayotte et en conséquence de la carte pluriannuelle générale dans ce département.
L’amendement no 155 rectifié , accepté par la commission, est adopté.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Guillaume Larrivé, pour le groupe Les Républicains.
Mes chers collègues, avec Éric Ciotti, au nom des députés du groupe les Républicains, nous voulons dire très directement que votre loi est une loi d’augmentation de l’immigration, une loi de facilitation de l’immigration légale et une loi de complication de la lutte contre l’immigration illégale.
Notre conviction, c’est que la France a besoin d’une réduction de l’immigration pour sortir du chaos migratoire. Notre conviction, c’est que pour défendre l’intérêt de la France et des Français, il faut procéder à des ruptures juridiques majeures, aux plans européen et national.
Nous vous avons fait des propositions, nous avons présenté des amendements de rupture avec l’état du droit existant : vous les avez toutes rejetées. C’est bien la preuve de choix très différents. Le parti socialiste, le Président de la République et le Gouvernement de Manuel Valls favorisent l’augmentation de l’immigration au moment même où la France et les Français ont besoin d’une tout autre politique de réduction active de l’immigration.
Si en 2017, les Français nous font confiance et inversent dans cet hémicycle la majorité, nous aurons la responsabilité d’abroger cette loi d’augmentation de l’immigration que vous aurez eu le grand tort de faire voter.
La parole est à Mme Marie-Anne Chapdelaine, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Je ne vous étonnerai pas en disant que pour notre part, nous allons voter cette loi, une loi juste et équilibrée. Nous avons effectivement accordé des droits à des étrangers régulièrement installés en France. S’agissant de la partie relative à la lutte contre l’immigration irrégulière, nous n’avons fait que rendre justice : permettre aux parents d’un enfant malade d’être présents à ses côtés n’est que de la justice et de l’humanisme.
Cette loi est aussi une loi de compromis, qui va dans le sens du progrès et qui reflète ce qu’est le parti socialiste, puisque c’est en ces termes que vous avez parlé de nous.
Nous discutons, nous n’avons pas à stigmatiser toujours les mêmes, l’étranger, l’étranger malade. Oui, vous avez raison, nous ne partageons pas le même paradigme. Pour nous, un étranger n’est pas forcément un voleur, quelqu’un qui vient illégalement en France pour se faire soigner. Non, cela peut être notre voisin, quelqu’un qui a des droits et des devoirs. C’est bien ce qui a été affirmé dans ce texte.
Nous voterons donc en conscience cette loi, qui est une bonne loi.
Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.
Le projet de loi est adopté.
Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion sur le rapport de la commission mixte paritaire de la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les personnes malades en fin de vie ;
Discussion en deuxième lecture de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant.
La séance est levée.
La séance est levée mercredi 27 janvier 2016 à zéro heure cinquante-cinq.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly