Intervention de Rémi Delatte

Séance en hémicycle du 27 janvier 2016 à 15h00
Nouveaux droits des personnes en fin de vie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRémi Delatte :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous voici au terme d’un long mais fructueux cheminement, et de nombreuses heures de débat tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale puis en commission mixte paritaire. Nous avons réussi à trouver un accord avec nos collègues sénateurs sur cette proposition de loi traitant d’un sujet sociétal majeur, la fin de vie.

À partir des conclusions du rapport Sicard de décembre 2012 et jusqu’aux préconisations de la mission parlementaire de décembre 2014 de nos collègues Alain Claeys et Jean Leonetti, les professionnels, comme les usagers, attendaient sur quelques points une adaptation de la loi Leonetti relative à la fin de vie.

J’ai le sentiment que le texte issu de la CMP répond aux inquiétudes des uns, comme aux attentes des autres. Vous l’avez d’ailleurs ainsi rappelé, messieurs les rapporteurs.

D’emblée, je me félicite de la nouvelle version de l’article 3 et du retrait de la notion « d’utilité », expression malheureuse et inappropriée s’agissant de la vie. Notre assemblée avait proposé que la sédation profonde et continue soit réalisée afin de « ne pas prolonger inutilement la vie ». Comme j’avais pu le défendre à l’occasion d’un amendement déposé en commission des affaires sociales, je n’imagine pas un instant que l’on ose légiférer sur l’utilité ou l’inutilité de la vie. L’auteur et philosophe Jean-Louis Fetjaine écrivait, dans Le Crépuscule des elfes, que « seule la mort est inutile », replaçant ainsi chacun d’entre nous, mes chers collègues, à sa juste et humble place.

Face à la fin de sa vie, chacun fait appel à sa conscience qui s’exprime selon ses choix intimes, philosophiques, religieux ou son parcours de vie. Nos concitoyens souhaitent pour leurs proches, comme pour eux-mêmes, une fin de vie digne et apaisée, c’est tout naturel ! L’article 4 ouvre un droit nouveau, celui de recevoir des traitements et des soins pour soulager leur souffrance. Celle-ci sera dorénavant en toutes circonstances, prévenue, prise en compte, évaluée et traitée. L’accès aux soins palliatifs pour tous est ainsi consacré. Je regrette seulement que mon amendement, voté par l’Assemblée nationale à l’article 4 bis, n’ait pas été conservé en CMP. Je proposais en effet, à la suite du rapport public annuel 2015 de la Cour des comptes et en complément à loi Leonetti du 22 avril 2005 qu’un bilan de la politique de développement des soins palliatifs soit dressé en région par les agences régionales de santé et présenté annuellement devant les conférences régionales de la santé et de l’autonomie.

Par ailleurs, ce texte lève utilement l’inquiétude exprimée par certains de nos compatriotes sur le risque d’autorisation du suicide assisté ou d’une euthanasie active. La convergence issue de nos travaux en CMP relève d’un juste équilibre, qui éclaire la pratique médicale et encadre la mise en oeuvre des directives anticipées par le recours à la collégialité. De même, il affirme clairement que l’objectif de la lutte contre la douleur est de soulager la souffrance et non d’abréger la vie, quand bien même les traitements administrés pourraient accélérer le décès.

Enfin, la rédaction retenue par la CMP pour l’article 2 et la reconnaissance de la nutrition et de l’hydratation artificielles comme traitements clarifient utilement un sujet de fond. C’est un point essentiel à mon sens, qui, par rapport à la proposition initiale, lève toute ambiguïté sur un risque de recours au suicide médicalement assisté.

Mes chers collègues, de toute évidence, ce nouveau texte Claeys-Leonetti s’inscrit parmi les belles pages qui honorent notre Parlement parce qu’elles laissent la part belle à ce qui nous rassemble tous : l’humain !

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