Intervention de Alain Vidalies

Séance en hémicycle du 3 février 2016 à 15h00
Économie bleue — Après l'article 18

Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Monsieur Baupin, si votre objectif est de rappeler votre opposition, vous l’avez atteint et nous pouvons en rester là ; s’il est de modifier la loi française aujourd’hui, je pense que votre démarche est dangereuse et compliquée. Nous avons déjà eu ce débat à de nombreuses reprises – chaque fois qu’un texte touche à la mer, de près ou de loin. La ministre de l’écologie a rappelé il y a quelques jours au Sénat quelle était sa position sur cette question.

Il serait très imprudent de prendre cette initiative, qui serait non seulement incomprise, mais aussi dangereuse, car elle pourrait remettre en cause la seule procédure utile en la matière, pour ceux qui veulent effectivement limiter ou interdire la pêche en eaux profondes, à savoir celle qui résultera du processus européen. La France a donné son accord à une proposition qui prévoit l’interdiction du chalutage profond au-delà de 800 mètres, une protection des écosystèmes marins vulnérables, ainsi que des adaptations pour préserver la pêche artisanale qui cible d’autres espèces de fond, comme la langoustine ou la lotte.

Sur cette proposition, qui a été adoptée à l’unanimité en conseil des ministres européens, la France a travaillé et pesé, puisque Ségolène Royal a pris position. Aujourd’hui, vous le savez, la procédure européenne est en cours et des trilogues vont avoir lieu entre le Parlement, le Conseil européen et la Commission. Il y a quelques jours encore, Ségolène Royal a rappelé sa position, en écrivant à la Commission pour demander que cette procédure aboutisse le plus rapidement possible. Telle est la position du Gouvernement.

Imaginez un instant, alors que les parlementaires européens travaillent sur ce sujet depuis des mois, voire des années ; alors que tout le monde convient que cette question relève de la politique commune de la pêche et doit être traitée au niveau européen ; alors que Ségolène Royal a envoyé cette lettre ; imaginez que la Commission apprenne que le Parlement français a décidé de régler le problème de son côté, pour la France.

Je n’imagine pas que vous ne vouliez défendre que la mer française : la défense de l’environnement ne peut être qu’universaliste, sans quoi elle n’aurait pas de sens. En adoptant votre amendement, nous risquerions de faire tomber la procédure européenne dans l’oubli, puisque la France semblerait avoir agi toute seule. Ce ne serait pas une bonne chose, et j’insiste, comme je le faisais tout à l’heure, sur le message que nous voulons adresser aux pêcheurs, à savoir que nous mettons en oeuvre une politique européenne. Chaque fois qu’on leur explique que l’on peut prendre des mesures plus dures ou plus répressives unilatéralement, cela vient nourrir le fonds de commerce de ceux qui luttent contre l’Europe, qui pensent que nous devons nous replier derrière nos frontières. Et cela se retrouve dans les urnes.

Vos intentions sont bonnes, mais notre responsabilité politique, aujourd’hui, compte tenu de l’état de la procédure, c’est de soutenir la démarche engagée par Ségolène Royal. La décision est proche : les pays sont unanimes. Il suffit maintenant que le trilogue aboutisse et c’est pour cela que je vous invite, par cohérence, à retirer ces amendements, pour que nous délivrions un message unanime, celui de la lettre adressée par la ministre, et que la procédure européenne puisse aboutir rapidement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

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