Intervention de William Dumas

Séance en hémicycle du 4 février 2016 à 9h30
Compétitivité de l'agriculture et de la filière agroalimentaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaWilliam Dumas :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, la compétitivité de notre agriculture et de la filière agroalimentaire est un enjeu important. Comme vous le savez tous, la France fait toujours partie des puissances agricoles de la planète – premier producteur et deuxième exportateur agricole de l’Union européenne, huitième producteur et quatrième exportateur agricole du monde –, en dépit d’une concurrence européenne et internationale qui s’accroît.

Il est donc important de légiférer en conservant, comme le disent certains, l’or que nous avons dans les mains : c’est un enjeu crucial pour préserver le dynamisme et la compétitivité de notre agriculture. En effet, fragilisée face à l’ambition de pays comme les États-Unis ou le Brésil et les difficultés avec la Russie dans un environnement non régulé, la compétitivité doit être au coeur des priorités nationales et guider nos choix politiques à venir.

Au-delà de nos atouts géographiques et fonciers, la force de notre agriculture repose sur nos politiques qui favorisent l’innovation, la recherche agronomique et la stabilité des prix, qui sont le socle de la puissance agricole française. C’est tout le sens des engagements du Président de la République, qui sont aussi les vôtres, monsieur le ministre. Aujourd’hui, conscients comme nous le sommes des difficultés rencontrées par ce secteur, nous savons qu’il est urgent de le soutenir et de faire des propositions. Mais attention, pas à n’importe quel prix !

Or ce texte, rédigé en quelques semaines entre les élections départementales et régionales, propose des réformes pour régler des problèmes de fond dont les causes sont structurelles, et non pas conjoncturelles. Rappelez-vous la crise de 2009 : vous étiez au pouvoir. À l’époque, vous n’avez réalisé aucune réforme en la matière ! Faire miroiter des mesures difficilement réalisables malgré de bonnes intentions n’est pas acceptable ! Il en est ainsi de la question du prix. Les libéraux que vous êtes semblent découvrir qu’il faudrait que la loi fixe le prix : via ce texte, vous essayez de modifier un état de fait par des propositions artificielles, qui vous donnent bonne conscience alors que le prix dépend, nous le savons tous, de l’économie de marché, du libre-échange et d’une concurrence non faussée.

Nous le savons tous : depuis longtemps, sur l’ensemble de la chaîne, c’est toujours le producteur qui, in fine, souffre le plus des stratégies de la grande distribution et des transformateurs pour une course aux prix les plus bas. Toutes les propositions tendant à améliorer le secteur d’activité agricole sont évidemment importantes, et je sais que des tables rondes organisées dans certaines circonscriptions, est ressortie la même problématique majeure : la compétitivité de notre agriculture. Ce n’est pas, à mon sens, cette proposition de loi, qui n’apporte aucune innovation sérieuse permettant de répondre à la crise traversée par le monde agricole, qui résoudra ce problème.

Je voudrais également relever les incohérences de votre proposition, comme le dispositif visant à permettre des allégements de charges sur le travail permanent agricole prévu à l’article 9. Vous le savez, la précédente majorité, « la vôtre », l’avait déjà adopté sans jamais le mettre en oeuvre, car ce dispositif n’est pas conforme au droit européen et n’a donc jamais été appliqué.

En revanche, les choix du Gouvernement en direction des filières agricoles et agroalimentaires et les efforts qui ont été réalisés en leur faveur, dans le cadre du Pacte de responsabilité, du CICE et des allégements supplémentaires consacrés depuis 2012 au secteur de la production agricole, ont bien visé à améliorer la compétitivité.

Toutefois, comme tout modèle, celui de l’agriculture s’essouffle, en raison notamment de la segmentation de son marché. Il faut donc répondre à la multiplicité des demandes des consommateurs et valoriser notre agriculture. C’est le cas notamment avec les labellisations, qui renvoient une image très positive de chaque filière aux consommateurs et permettent à nos producteurs de revaloriser leurs prix.

Je déplore également que la proposition de loi n’évoque pas le plan de soutien à l’élevage proposé par le ministre.

Chers collègues, sans parler du contexte dans lequel cette proposition de loi a été préparée, comment ne pas voir que ce texte, que vous nous présentez comme la solution à tous les problèmes, ne fait que remettre en cause certaines des mesures prises depuis 2012, tout en faisant dans la surenchère s’agissant des dispositifs que nous avons adoptés dans les lois de finances 2015 ? C’est pourquoi, vous l’aurez compris, je voterai contre ce texte.

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