Depuis le début de mon engagement parlementaire, j’ai souvent dénoncé le fait qu’on néglige la soutenabilité économique des exigences que l’on impose aux agriculteurs.
Aujourd’hui, notre agriculture traverse une crise majeure : 30 000 exploitations sont au bord du gouffre, 80 000 emplois sont directement menacés et rien n’est réglé sur le fond ! Or, l’avenir de nombreux territoires ruraux est largement dépendant des productions animales. Nos filières demandent légitimement à pouvoir défendre leurs parts de marché dans les mêmes conditions que leurs collègues du reste de l’Europe, pour leurs filières, d’abord, mais aussi pour eux-mêmes. Les trésoreries sont à sec, les traites impossibles à honorer, et cette population continue de travailler encore et encore…
Les règles européennes qui régissent la concurrence ont été pensées pour l’industrie. Elles doivent être adaptées à l’agriculture, dont les marchés sont tellement différenciés. Par exemple, vous nous répétez que la traçabilité des produits transformés est impossible en raison de l’opposition de la Commission européenne. C’est pourtant un enjeu économique et citoyen. C’est le leadership de la France qui est ici directement mis en cause. L’influence de la France dans l’Union européenne s’est affaiblie, ainsi qu’en atteste un récent rapport parlementaire. C’est inquiétant.
On en arrive à des situations ubuesques : des producteurs de porcs ou d’endives ont été condamnés parce qu’ils réclamaient un prix minimum de vente. Que l’on empêche l’entente illicite, c’est normal, mais condamner des petits producteurs qui se battent pour des prix plus justement rémunérateurs, c’est une honte, c’est révoltant.
Nos agriculteurs sont des entrepreneurs et, à ce titre, ils sont aussi victimes des maux qui touchent toutes nos entreprises : des charges trop élevées, des contrôles de plus en plus stricts, des normes excessives. Les filières et les exploitations agricoles sont confrontées à une inflation normative toujours plus importante depuis une trentaine d’années. Cette inflation résulte aussi bien de normes et de réglementations nationales que de la surtransposition de directives européennes par les autorités françaises. La moitié de la production normative européenne se concentre sur le secteur agricole.
De plus, les agriculteurs ont le sentiment d’être stigmatisés. Tout fait polémique à leur détriment : la question des antibiotiques, les produits phytosanitaires, certains élevages, comme celui des porcs, ou encore le statut de l’animal. Or, par des pratiques vertueuses, ils adaptent quotidiennement leur métier aux attentes d’une société plus soucieuse que jamais, comme ils le sont eux-mêmes, du respect de l’environnement.
Chers collègues, il faut dès à présent jeter les bases d’un nouveau système de construction des prix dans les filières les plus exposées, en y associant l’ensemble des acteurs économiques.
Cette proposition de loi est pragmatique. En instituant de meilleures règles du jeu entre acteurs des filières agricoles et alimentaires, en facilitant l’investissement et la gestion des risques dans les exploitations, ou encore à travers l’allégement des contraintes qui pèsent sur nos producteurs, nous voulons permettre à la France de regagner son rang de première puissance agricole en Europe, qu’elle occupait il y a dix ans encore.
Chers collègues, nous avons le devoir de défendre l’agriculture de notre pays et d’encourager et de protéger ceux qui travaillent la terre. C’est fondamental, car il y va de notre autonomie alimentaire. Protéger le producteur, c’est protéger le consommateur.
Chers collègues, nous avons le devoir, pour nos agriculteurs, de voter en faveur de cette proposition de loi.