En vérité, cette loi de 1955, encadrée par le contrôle du Parlement quant à sa durée, par le juge constitutionnel au regard du respect de la Constitution et par le juge administratif quant à sa mise en oeuvre, fonctionne parfaitement. Elle a servi deux républiques, dans des circonstances tout à fait différentes, et est aujourd’hui en action, à la demande du Gouvernement, parce que nous sommes confrontés à des attaques fomentées par des organisations terroristes. Il n’y a aucune raison de constitutionnaliser ce qui fonctionne déjà très bien ainsi, sinon pour faire une opération politique, pour servir d’alibi au fameux serment du Président de la République selon la formule du Premier ministre – bien que je rappelle que ce serment portait sur l’article 2, à savoir la déchéance de la nationalité – ou encore pour servir de base légale au texte que le garde des sceaux va bientôt nous proposer, c’est-à-dire une série de limitations des libertés individuelles au nom de la lutte contre le terrorisme qui trouverait ainsi son fondement dans la Constitution ainsi révisée. Dès lors, cette réforme constitutionnelle, loin d’être une garantie supplémentaire pour nos libertés, marquera un recul parce qu’elle signifiera l’exclusion ad vitam aeternam du juge judiciaire. Si tel est votre objectif, monsieur le garde des sceaux, ayez au moins le courage de le dire.