Les propositions successives sur la déchéance de nationalité témoignent d’une impréparation sidérante pour qui considère simplement l’importance que revêt normalement une révision constitutionnelle. Car c’est bien à un changement de notre Constitution qu’a appelé le Président de la République pour traiter à la fois de ce sujet et de l’état d’urgence, alors que rien ne l’y obligeait.
La déchéance de nationalité soulève au moins trois séries de questions.
La première interroge le fondement même de la nationalité attachée au droit du sol. L’immense majorité de nos concitoyens, nés sur le territoire national, est française sans l’avoir choisi ni demandé : c’est une donnée et non un acquis. Ainsi Brutus lui-même, bien que patricide, n’a pas cessé d’être reconnu par César comme son fils, qui lui a dit en mourant : « Toi aussi, mon fils »… Voilà pourquoi, si retirer à un citoyen un droit acquis, la naturalisation, est une chose, lui dénier l’inné, la nationalité, en est une autre qui, même prononcée, demeure l’habit juridique d’une absurdité philosophique.
L’indignité nationale et la perte de droits qu’elle entraîne constituent des réponses infiniment mieux accordées aux principes fondamentaux de notre droit comme à son rapport au droit international.