Monsieur le Premier ministre, monsieur le garde des Sceaux, chers collègues, j’ai bien compris que cet amendement concernant le vote des étrangers ne fait pas partie des engagements que le Président de la République a pris lors de son discours de Versailles, mais il a été pris devant 46 millions d’inscrits sur les listes électorales et 36 millions de votants au second tour des élections présidentielles, ce qui, pour bon nombre de parlementaires qui ont cosigné cet amendement, justifie que l’on parle du sujet.
« Désespérer, c’est déserter », disait Victor Hugo. Comme les parlementaires qui ont cosigné cet amendement, nous ne désespérons pas qu’un jour la République accorde le droit de vote pour les élections locales aux étrangers résidant légalement sur notre territoire depuis plus de cinq ans.
Nous savons que l’approbation d’une telle idée a sans doute reculé parmi nos concitoyens puisqu’ils étaient une majorité à en approuver le principe en 2013 et qu’ils ne sont plus que 40 % aujourd’hui. Engels disait que la preuve que le pudding existe, c’est que l’on en mange. La preuve que la démocratie existe, c’est l’élection… Sauf que, scrutin après scrutin, la participation est de plus en plus faible et que les électeurs se détournent des urnes. C’est vrai partout en France, mais cela l’est particulièrement dans les quartiers populaires, là où le vote n’est ni un rite, ni une habitude en raison de l’origine étrangère des parents.
Le droit de vote des étrangers aux élections locales est un moyen, pas le seul, de régénérer la démocratie française. Le droit de vote est un élément essentiel d’adhésion au pacte démocratique, la marque d’une appartenance à une même communauté de destin et un pas de plus vers l’intégration républicaine.
Chacun, dans cette Assemblée, connaît les arguments en faveur du droit de vote des étrangers aux élections locales – 63 pays l’appliquent déjà – et les arguments contraires. Nous avons choisi d’insister aujourd’hui sur des mesures de protection de la Nation, ce que je comprends parfaitement dans la période et les épreuves que traverse notre pays. Néanmoins, l’unité nationale n’existera pas sans espérance démocratique, et le droit de vote des étrangers aux élections locales en est une.
Je me tourne vers mes collègues socialistes et vers la gauche qui, historiquement, se sont battus en faveur du droit de vote des étrangers aux élections locales. Une proposition de loi a été adoptée à l’Assemblée nationale et au Sénat. Aujourd’hui, nous sommes le constituant, nous pouvons adresser un signal à la population française et à celles et ceux dont nous souhaitons qu’ils aient le droit de vote.