Intervention de Manuel Valls

Séance en hémicycle du 9 février 2016 à 21h30
Protection de la nation — Après l'article 2

Manuel Valls, Premier ministre :

Je connais bien ce débat. Nous avons évoqué cette question il y a quelques années à l’Assemblée nationale. Nous étions dans l’opposition et j’avais eu l’occasion de défendre l’idée du vote des résidents étrangers non communautaires. À l’époque, il y a plus d’une dizaine d’années, d’autres, qui se trouvaient dans la majorité même s’ils y étaient minoritaires, s’étaient également exprimés en faveur de cette idée.

Je souhaite le rejet des amendements qui nous sont présentés pour deux raisons. La première tient au contenu de notre texte, de notre réforme constitutionnelle. J’ai entendu les arguments exprimés, mais ces amendements ne sont directement liés au fond de la réforme, c’est-à-dire la constitutionnalisation de l’état d’urgence et de l’extension de la déchéance de nationalité. On voit bien que bien d’autres sujets pourraient être abordés : certains sont complexes, comme celui de la présence du mot « race », certains ne sont pas nouveaux, comme celui sur le droit de vote des résidents étrangers non communautaires, et il y en a beaucoup d’autres… Or nous n’avons pas ouvert cette réforme constitutionnelle pour changer tous les aspects de la Constitution. J’invite chacun à en rester à l’objet annoncé par le Président de la République le 16 novembre dernier.

Ensuite, autre raison, nous savons que sur ce sujet, il ne sera pas possible d’obtenir, avec les députés de l’opposition et les sénateurs, la majorité des trois cinquièmes nécessaire pour le vote de cette mesure. Je ne le crois pas, et vous le savez d’ailleurs parfaitement.

J’ajoute une troisième raison : je ne crois pas que cet élément-là soit aujourd’hui une priorité et une attente, à la différence de ce que nous pouvions penser voilà quelques années. L’appartenance à la nation, qui a été évoquée tout au long des débats, est un sujet majeur. Qu’ont révélé les attentats et la réaction des Français ? Leur adhésion à la République et à la nation, l’amour de la patrie, le rappel des trois couleurs et de la devise, et plus généralement l’adhésion à une communauté de valeurs, au premier rang desquelles la laïcité. Compte tenu donc de la situation que nous connaissons actuellement, il ne me semble pas opportun d’introduire ce débat dans le pays.

Pour toutes ces raisons, en particulier d’opportunité et de capacité à rassembler autour de la réforme constitutionnelle proposée par le Président de la République, le Gouvernement appelle au rejet de ces amendements.

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