Intervention de Brigitte Allain

Séance en hémicycle du 10 février 2016 à 15h00
Protection de la nation — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, chers collègues, l’Assemblée nationale est appelée aujourd’hui à voter un projet de loi de réforme constitutionnelle. Elle a ouvert des débats sur la conception que nous avons de la République et de notre mission de représentants du peuple. Par son vote, chacun de nous s’engage, de façon responsable et en conscience.

À la suite des attentats à Paris, le Président de la République a annoncé en Congrès à Versailles une série de mesures pour lutter contre le terrorisme effroyable auquel nous devons désormais faire face. Parmi elles, le projet de loi constitutionnelle mérite qu’on lui porte un regard particulier puisqu’il n’a selon le Gouvernement qu’une portée symbolique. Quel symbole, quel message, souhaitons-nous alors transmettre aux Français et au monde ?

La Constitution française établit la règle que se donne le peuple sur le fonctionnement des institutions et les règles relatives aux droits des individus. Elle énonce dans le préambule de 1946 des principes économiques et sociaux nécessaires à notre temps, ajoutés à la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Depuis 2004, la Charte pour l’environnement intègre la dimension écologique dans notre engagement commun pour le bien de l’humanité.

Aussi, modifier la Constitution, l’acte solennel par lequel la société civile déclare les principes qui la fondent, la rassemblent, l’organisent, est lourd de conséquences.

L’article 1er du texte inscrit l’état d’urgence dans la Constitution. Pour une partie d’entre nous, dont je suis, il y a risque, en agissant ainsi, de faire de l’exception la norme, d’engager un processus d’affaiblissement démocratique, bref, de contribuer à réduire les libertés publiques, au prétexte d’obtenir une très hypothétique sécurité des personnes.

Au contraire, pour certains de mes collègues, faire figurer l’état d’urgence dans la Constitution, au même titre que les deux autres états d’exception prévus par notre droit – les pleins pouvoirs et l’état de siège –, c’est être cohérent et adapter notre législation à un risque de terrorisme de guerre devenu quasi permanent. Les débats parlementaires ont permis de préciser que l’état d’urgence sera subordonné à un vote du Parlement, qu’il sera limité à quatre mois et que son contrôle parlementaire sera assuré.

Par contre, l’article 2 du projet de loi, qui intègre la déchéance de nationalité dans notre Constitution, rencontre l’opposition d’une nette majorité des députés écologistes. Cette initiative a déplacé le débat, de fait, du terrorisme vers la nationalité. Par leur histoire, certains Français seraient-ils plus menaçants pour la sécurité du pays que les autres ?

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