Intervention de Myriam El Khomri

Séance en hémicycle du 10 février 2016 à 15h00
Expérimentation territoriale visant à faire disparaître le chômage de longue durée — Présentation

Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, chère Catherine Lemorton, monsieur le rapporteur, cher Laurent Grandguillaume, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d’abord de remercier votre rapporteur, pour cette proposition de loi qui a su, au-delà des clivages traditionnels, rassembler largement l’ensemble cet hémicycle.

Je me félicite que le travail entre le Gouvernement et les parlementaires ait porté ses fruits, et que nous ayons pu avancer ensemble sur un sujet qui ne doit pas nous diviser.

Je l’ai déjà rappelé devant vous : un objectif nous réunit toutes et tous, ici, quelles que soient nos sensibilités : l’emploi, et notamment l’emploi de celles et ceux qui en sont les plus éloignés. Nous savons en effet que le chômage de longue durée constitue un fléau et qu’il touche principalement les demandeurs d’emploi pas ou peu qualifiés.

Je sais que nous partageons cette ambition : redonner du travail à chacun ; redonner de la dignité à tous – et avant tout à ceux et celles qui désespèrent, qui doutent, qui hésitent et qui parfois, découragés, renoncent à chercher un emploi. Je rappelle – nous l’avions tous relevé lors de la première lecture – que derrière les chiffres du chômage, que l’on commente souvent ici, se cache le visage de ces hommes et de ces femmes qui ont peur pour leur avenir comme pour celui de leurs enfants et de leurs proches.

Nous portons donc une grande responsabilité. Nous devons renoncer aux postures et aux caricatures ; nous le devons, justement, à ces hommes et à ces femmes.

Nous sommes là pour trouver des solutions : c’est d’ailleurs la raison de la mobilisation engagée le 18 janvier par le Président de la République. Nous devons mieux préparer, mieux accompagner et mieux former les demandeurs d’emplois.

Dans le même temps, nous devons aussi mieux accompagner les entreprises, notamment les TPE et les PME, afin qu’elles retrouvent confiance dans leur capacité à investir et à créer de l’emploi.

Tel est le sens du plan annoncé par le Président de la République : les 500 000 formations supplémentaires permettront de porter à un million le nombre de chômeurs bénéficiant d’une formation au cours des douze prochains mois.

C’est également le sens de l’aide « Embauche PME » qui a rencontré, en quelques semaines seulement, un écho très favorable sur le terrain. J’ai entendu certaines voix s’élever pour dénoncer un plan qui favoriserait l’assistanat. Je m’inscris véritablement en faux contre de tels propos : non, il ne s’agit pas d’assistanat. J’insiste sur ce point : c’est un faux débat, et il faut arrêter de stigmatiser, d’accuser et de vouloir diviser les Français.

Vivre avec les minimas sociaux ou avec le chômage ne peut pas être considéré comme de l’assistanat. Dire cela, c’est ne pas avoir conscience des réalités vécues par ces hommes et par ces femmes dans la précarité ou dans le chômage de longue durée.

Tout le monde veut pouvoir se sentir utile, pour soi d’abord, mais aussi pour les autres et pour la société. Je crois à l’émancipation individuelle et à l’épanouissement par le travail, car ce dernier est avant tout un droit. C’est pour cette raison que notre objectif à tous est bien de ramener l’ensemble des demandeurs d’emploi vers le monde de l’entreprise.

Nous ne devons exclure aucune piste, qu’il s’agisse du plan de 500 000 formations, de l’aide aux TPE et aux PME, de la proposition de loi d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, du pacte de responsabilité et de solidarité ou, enfin, des contrats aidés.

Le débat que nous avons eu autour de la proposition de loi de Laurent Grandguillaume a été particulièrement riche, et, à bien des égards, novateur, tant sur la forme que sur le fond.

Aussi, je veux saluer ici la qualité du travail parlementaire, qui a largement permis d’améliorer le texte d’origine, et remercier l’ensemble des députés présents ce soir pour leur mobilisation et, également, pour leurs échanges constructifs, notamment dans le cadre de la commission mixte paritaire.

Comme exemples des améliorations ainsi apportées, je citerai l’accompagnement des demandeurs d’emploi chaque fois que le besoin en est identifié, la prise en compte de la situation de l’entreprise dans l’ajustement du montant de la subvention accordée par le Fonds, et l’évaluation de l’expérimentation, qui en sera indépendante et distincte.

L’objectif de cette proposition de loi pouvait apparaître ambitieux. C’est ATD Quart-Monde qui en est à l’origine : je tiens à nouveau à saluer devant vous l’action de cette association et l’intuition dont elle a fait preuve, de même que je salue le travail accompli par toutes les associations qui prennent cette problématique à bras-le-corps, souvent dans la proximité, c’est-à-dire au plus près des réalités locales, et avec beaucoup de persévérance. Ces initiatives associatives complètent l’action du service public de la formation et de l’emploi.

J’aimerais revenir un instant sur la philosophie du texte : il part du principe que tous les chômeurs ont des compétences et qu’elles doivent être enrichies et valorisées. Et il convient de rendre utiles à la société l’ensemble de ces compétences, parce que, dans notre pays, certains besoins sociaux ne sont pas satisfaits : je pense notamment aux services à la personne.

La transformation de notre économie et, plus largement, de notre société – avec notamment le développement de ce qu’on appelle le quatrième âge –, est une occasion unique de faire émerger des activités nouvelles, génératrices de richesses, de compétitivité mais aussi d’emplois pour notre pays.

C’est bien un modèle économique et social d’un nouveau genre qui est proposé à travers cette proposition de loi : nous innovons. Et nous n’en sommes qu’au début, car les étapes qui suivront nos débats seront, bien entendu, déterminantes.

Il nous faut désormais mettre en place le Fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée. Comme je m’y étais engagée, la participation de l’État viendra compléter celle des autres partenaires, qu’il s’agisse des collectivités ou des organismes privés et publics. Nous devrons pour cela nouer des partenariats locaux efficaces. Il nous faudra également identifier ensemble les critères de participation à l’expérimentation.

J’ai reçu de très nombreuses demandes et je sais que vous avez, vous aussi, été extrêmement sollicités par certaines collectivités qui souhaitent bénéficier de cette expérimentation. Je serai très attentive, comme je vous l’ai déjà dit, au choix des territoires qui seront retenus, car je souhaite que tous les types de territoires puissent se porter candidats – je pense bien sûr aux territoires de la politique de la ville et aux zones de revitalisation rurales.

Vous le savez, j’aurai évidemment besoin de votre mobilisation à toutes et à tous. J’aurai besoin de votre soutien pour franchir ces prochaines étapes, comme nous avons travaillé, dans la bonne entente, au cours des premières.

Nous avons une occasion unique d’engager, dès le 1er juillet 2016, une expérimentation originale, innovante, ambitieuse, dans une dynamique territoriale qui tient compte des particularités locales. J’y insiste : nous ne devons exclure personne du monde du travail. C’est notre cap, c’est notre devoir. Nous le devons aux Françaises et aux Français. Seule une mobilisation collective pourra nous permettre de réussir cette expérimentation et peut-être, à moyen terme, d’en généraliser le principe à l’échelle de notre pays.

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