Intervention de Jean-Michel Clément

Séance en hémicycle du 10 février 2016 à 15h00
Réduction du nombre minimal d'actionnaire dans les sociétés anonymes non cotées — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, le 28 mars 2013, le Président de la République a annoncé un choc de simplification en faveur des entreprises, afin de leur permettre de disposer d’un cadre juridique favorable à leur développement économique. À ce jour, 56 % des 320 mesures annoncées touchant à la vie des entreprises sont devenues effectives, dont des mesures en faveur de l’accès aux marchés publics ou des conditions d’embauche dans les PME.

La rapidité dont a fait preuve le Gouvernement pour mettre en oeuvre ces mesures repose sur l’habilitation à procéder par ordonnance que le Parlement lui a accordée par la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises.

Le présent projet de loi poursuit cette démarche en prévoyant la ratification de l’ordonnance du 10 septembre 2015, qui réduit de sept à deux le nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées. En effet, depuis la loi du 24 juillet 1867 – à moins que ce ne soit une loi de 1863, car Mme la ministre vient d’instiller le doute en moi –, le seuil minimal de sept actionnaires devait être atteint pour la constitution d’une société anonyme.

Ce seuil, élevé au regard des règles en vigueur chez l’ensemble de nos partenaires économiques, suscite des critiques récurrentes depuis de nombreuses années et a favorisé le développement de pratiques d’évitement, dont le recours à des actionnaires de complaisance. Ces pratiques ont pu générer, ou génèrent encore, bien des difficultés quant au sort de ces actions détenues par des associés qui en ont parfois même oublié l’existence. L’expérience nous enseigne que de nombreux problèmes apparaissent lors de la cession de l’entreprise ou lorsque celle-ci doit recapitaliser, par exemple en cas de difficultés économiques.

Cette mesure dépasse très largement la simplification que nous évoquons : il s’agit plutôt de donner aux sociétés anonymes le véritable visage qui doit être le leur quant à la composition de l’actionnariat véritable. Le droit des sociétés n’est pas compatible avec des situations de façade. C’est ce qu’illustrent trois situations où le seuil est particulièrement inadapté : les sociétés familiales, les PME et les filiales de groupes de sociétés détenues en totalité par une société mère.

L’ordonnance du 10 septembre 2015 a répondu à ces critiques en réduisant à deux le nombre minimum d’actionnaires d’une société anonyme non cotée, conformément aux recommandations du Conseil de la simplification. Par conséquent, seules les sociétés cotées devront continuer à se conformer au seuil de sept associés. L’ordonnance prévoit également un certain nombre de coordinations, rappelées dans mon rapport.

Le projet de loi initialement présenté par le Gouvernement au Sénat ne contenait qu’un seul article, dont l’objet était de ratifier purement et simplement cette ordonnance. Lors de son examen, les sénateurs l’ont enrichi de deux articles additionnels.

Le premier vise à restreindre encore davantage le maintien du seuil de sept actionnaires, en le limitant aux seules sociétés cotées qui émettent des actions, afin de permettre aux sociétés, qui ont recours, pour leur financement, à des émissions obligataires plutôt qu’à des prêts bancaires de bénéficier de l’abaissement du seuil. C’est une suggestion pertinente.

Le second vise à effectuer un certain nombre de coordinations, notamment afin de préciser le régime applicable aux sociétés détenues par l’État. Le présent projet de loi corrige, à ce titre, une malfaçon de l’ordonnance du 10 septembre 2015 en rétablissant l’article 32 de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, qui avait été abrogé. Cet article permet en effet à l’État d’être actionnaire unique des sociétés qu’il détient, par dérogation aux seuils minima d’actionnaires en vigueur.

Lors de l’examen de ces dispositions, la commission des lois a souligné le consensus qui entourait cette mesure de simplification et a adopté le projet de loi sans modification.

Pour la bonne information de mes collègues, j’ai toutefois indiqué que je souhaitais déposer deux amendements visant à corriger deux scories légistiques portant, pour l’une, sur la date du rétablissement de l’article fixant le régime applicable aux sociétés détenues par l’État et, pour l’autre, sur une coordination.

Ces deux amendements ont vocation à assurer l’effectivité des dispositions qui nous sont proposées.

Pour conclure, vous l’aurez compris, ce projet de loi, tel que modifié et adopté par le Sénat le 28 janvier 2016, ne me semble pas poser de difficultés particulières. Il a d’ailleurs été adopté conforme par la commission des lois et les modifications que je vous propose, aussi nécessaires soient-elles, ne viennent que préciser certaines de ses dispositions. Aussi, mes chers collègues, je vous invite à adopter ce projet de loi, ainsi amendé.

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