Intervention de Éric Ciotti

Réunion du 10 février 2016 à 11h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti :

Je m'exprimerai au nom du groupe Les Républicains.

Ce projet de loi est le cinquième texte de lutte contre le terrorisme depuis 2012. En 2012, nous avions réclamé un projet de loi d'orientation et de programmation financière destiné à lutter contre le terrorisme. Je regrette que nous n'ayons pas été écoutés.

Dans un contexte de menace extrêmement élevée – le Premier ministre l'a encore rappelé –, le présent texte introduit des dispositions dont une partie nous semble positive. Toutefois, à bien des égards, il nous paraît très largement inachevé. Nous espérons que, grâce au débat parlementaire, et grâce à votre accession à la Chancellerie, monsieur le garde des Sceaux – je vous en félicite à nouveau, mais je forme aussi pour vous des voeux de courage, car vous avez à remédier à une situation passablement dégradée –, ce projet de loi ne restera pas une occasion manquée.

Le dispositif proposé souffre de graves lacunes. C'est un dispositif beaucoup plus large, plus complet, plus élaboré que nous défendrons par voie d'amendement. Car ce texte doit être l'occasion d'une rupture profonde avec la politique pénale portée par Mme Taubira. Ainsi, nous proposerons de rétablir les « peines plancher », qui étaient très efficaces contre la délinquance, et de revenir sur la contrainte pénale. Le texte doit aussi permettre d'instaurer un véritable dispositif de renseignement pénitentiaire – que vous avez défendu dans d'autres fonctions, monsieur le ministre.

Il convient en outre de se prémunir contre le retour des djihadistes. À ce sujet, permettez-moi d'évoquer le témoignage diffusé dans les médias de la personne qui a permis d'arrêter Abaaoud et, ainsi, d'empêcher de terribles attentats. Outre qu'il soulève des questions pertinentes sur la protection des témoins – le sort réservé à cette personne était manifestement inadapté compte tenu du service qu'elle a rendu à la nation –, il nous apprend que, d'après ce qu'Abaaoud a déclaré à Hasna Aït Boulahcen, 90 djihadistes sont rentrés en même temps que lui et se cachent actuellement en Île-de-France. C'est terrifiant ! Cela nous ramène au problème de leur détection et, plus généralement, du traitement des retours – un point essentiel ; nous ne cessons de le répéter depuis la loi présentée par M. Manuel Valls en 2012 et nous y insistons plus encore aujourd'hui. Vous prévoyez un dispositif d'assignation à résidence de quelques heures. Je n'ignore pas les contraintes qu'impose la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais la réforme que vous avez engagée aurait pu être l'occasion d'une disposition fort utile à cet égard. Le problème des retours doit être au coeur de nos débats. Comment protéger notre pays de leurs conséquences ?

En ce qui concerne la protection des forces de l'ordre, le dispositif limité au cas des tueurs de masse n'est absolument pas suffisant. Vous l'avez dit vous-même à mots choisis, monsieur le garde des Sceaux : l'avis du Conseil d'État, particulièrement éclairant sur ce point, signale que le dispositif risque de contraindre davantage les forces de l'ordre lorsqu'elles mobilisent la force armée dont elles ont le monopole. Nous défendrons donc, dans le sillage de la proposition de loi que j'avais déposée avec MM. Guillaume Larrivé, Philippe Goujon et Olivier Marleix, un dispositif beaucoup plus large prenant notamment en considération les notions de danger imminent et de violence grave.

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