Intervention de Annie Genevard

Séance en hémicycle du 17 février 2016 à 15h00
Débat de contrôle sur la politique nationale en matière d'enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnie Genevard :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le comité indépendant chargé par le Gouvernement d’établir la stratégie nationale de l’enseignement supérieur a rendu ses travaux en septembre 2015. Ses propositions sont devenues la feuille de route du Gouvernement. On y trouve la réponse à une commande gouvernementale caractérisée en particulier par l’objectif de 60 % de diplômés de l’enseignement supérieur dans une classe d’âge. Ce pourcentage n’est pas encore atteint et la situation est déjà très critique. En effet, la rentrée universitaire a vu un afflux massif d’étudiants dont je rappelle que le nombre a été multiplié par huit en un demi-siècle, soit 2,5 millions d’étudiants actuellement.

Cet afflux pose un certain nombre de problèmes, comme le montre la popularité du site Ma salle de cours va craquer. Il mène aussi à de nombreuses absurdités comme celle qui consiste à priver certaines filières d’étudiants motivés auxquels les études seraient profitables pour des étudiants égarés dans des cursus auxquels ils ne sont pas adaptés ou pour lesquels ils n’ont pas atteint le niveau requis. Dès lors, comment résoudre la quadrature du cercle consistant à élargir l’accès à l’université et accueillir de plus en plus d’étudiants dans de bonnes conditions, de bonnes formations et de bonnes universités où les moyens manquent, surtout après la ponction de 100 millions d’euros sur le fonds de roulement des universités les mieux gérées, et où la sélection est impossible comme vient de le décréter le Conseil d’État et refusée par vous comme vous venez de le rappeler en réponse à la question de notre collègue Benoist Apparu ?

J’espère que vous avez bien entendu ma question, monsieur le secrétaire d’État, car je ne vous l’ai pas transmise avant ce débat. Dans ces conditions, l’objectif de 60 % est-il crédible ? La démocratisation ne peut avoir un sens uniquement quantitatif. Encore faut-il assurer à chaque étudiant des conditions d’obtention de diplômes à la qualité reconnue ! Or l’échec des étudiants en licence progresse régulièrement, comme vous le savez. Le taux d’échec dépasse 70 % après trois ans et 60 % après une année de redoublement. L’échec universitaire est donc un sujet essentiel et je m’étonne qu’il n’ait pas encore été véritablement évoqué dans ce débat. Comment atteindre l’objectif de 60 % ? Quelle est votre stratégie pour lutter contre ce gâchis humain et financier ?

1 commentaire :

Le 22/02/2016 à 13:22, laïc a dit :

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Les professeurs sont en général très obéissants. Regardez les scores faramineux de 90 % de réussite au bac : auraient-ils été possibles si ces chers professeurs, paraît-il à la pointe du savoir et de la liberté de penser, n'avaient pas obéi docilement à leur ministre, et donné des bonnes notes à des élèves qui auraient été recalés s'ils avaient passé le bac 20 ou 30 ans plus tôt ?

Donc les données psychologiques sont les mêmes à la fac : ordonnez, et vous serez exaucé. Si madame la ministre veut 60 pour cent de réussite en licence, elle les aura, elle en voudrait 80 % qu'elle les aurait aussi. Mais si elle n'en voulait plus que 20 %, elle les aurait aussi.

Que penser alors de la réelle valeur des étudiants ? On ne fait en fait que mesurer la capacité d'obéissance des professeurs plutôt que la capacité des étudiants à fournir un travail convainquant qui légitimera leur obtention de la licence.

De toute manière, le niveau des professeurs est lui-même sujet à caution. En effet, pour avoir par moi-même expérimenté plusieurs facs à des époques différentes et dans des matières différentes, je me suis rendu compte que le niveau des professeurs et leur compétence pédagogique étaient très disparates, et que certains profs étaient de vraies nullités dont la notation n'avait de toute manière aucune signification puisque leur enseignement, désordonné et mal documenté, ne pouvait servir de support à un examen écrit.

Par ailleurs, si on sélectionne les étudiants, on devrait aussi sélectionner les professeurs. Les étudiants devraient pouvoir noter leurs professeurs, afin que l'administration sache, dans la pratique, ce qu'il en est de leur enseignement réel.

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