Intervention de Daniel Goldberg

Réunion du 16 février 2016 à 13h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Goldberg, rapporteur :

Je vous remercie pour les compliments que vous m'avez adressés. Ce sont les discussions que j'ai pu avoir avec les uns et les autres qui ont permis d'aboutir.

Monsieur François Pupponi, il doit en effet y avoir différenciation des règles suivant les territoires. Comme je l'ai dit en introduction, ce rapport se concentre sur les zones tendues, là où il y a un déficit clair entre l'offre et la demande, ce qui n'est pas le cas partout. Nous avons besoin de construire beaucoup de logements : ce discours, qui n'a pas été suffisamment porté lors des précédentes échéances nationales de 2012, sera au coeur de la prochaine campagne présidentielle. Voulons-nous continuer de vivre ensemble, côte à côte, dans le même quartier, avec nos différences sociales et culturelles ? Chacun sait que certaines positions politiques, qui rencontrent du reste un certain succès lors des élections, cassent les relations et la République au sens où nous l'entendons, tous ici, dans cette commission.

Il faut construire beaucoup de logements, parce que la population française va continuer de croître, ce qui est bon pour nos équilibres sociaux et notre dynamisme économique. Les besoins en nombre de mètres carrés de logement par habitant vont sans doute continuer d'augmenter du fait du nombre de célibataires, du vieillissement de la population, de la moindre stabilité des couples – la garde partagée des enfants nécessite deux fois plus de surface qu'à l'origine. C'est pourquoi je propose de garantir, par la loi, la reconnaissance de l'utilité publique à toute opération de construction de logements répondant aux objectifs fixés par les PLH dans les zones tendues, et non plus seulement aux opérations de construction de logements sociaux – c'est la proposition n° 24. Cette utilité publique devrait être davantage reconnue et portée par les différentes formations politiques. Dans mon rapport, je parle du « dernier arrivé qui ferme la porte », c'est-à-dire de la dernière personne arrivée dans un quartier qui ne souhaite pas que d'autres constructions puissent voir le jour. Vous avez raison, madame la présidente, il est parfois difficile pour les élus locaux de résister à une forme de pression. C'est pourquoi je suis favorable à un PLU intercommunal, ce qui permettrait de faire baisser la pression tout en restant dans le champ démocratique. De surcroît, les élus doivent dire clairement quel projet de ville ils proposent. Comme l'a dit M. Jean-Marie Tétart, il faut un socle commun.

Il a dénoncé l'instabilité fiscale, réglementaire et législative. Elle n'est pas propre à cette majorité et chacun a sa part de responsabilité. En ce qui me concerne, je la déplore. Les prochaines élections nationales pourraient être l'occasion de parvenir à un consensus sur la nécessité de construire et sur des règles qui pourraient être pérennes.

Je partage son analyse quant à la nécessité d'un lien entre l'emploi et le logement. J'y ajouterai le transport, puisque c'est ce dont souffre notre pays, peut-être plus que d'autres. Je me suis rendu en Allemagne, à Cologne, pour voir comment était pris en compte ce type de problématique. Évidemment, le dispositif n'est pas exactement le même.

Par ailleurs, il faut accepter une réalité : la ville, en France, ce n'est plus la commune. Ce n'est plus au sein de la seule commune que l'on peut à la fois se loger, aller à l'école, pratiquer des activités culturelles, sportives, et travailler. Aussi nos règles doivent-elles s'adapter.

Monsieur Philippe Bies a rappelé à juste titre ce qui relevait de la loi et des circulaires. J'ajouterai à cela les bonnes habitudes. Notre cadre législatif n'a pas nécessairement besoin d'évoluer sur tous les sujets abordés dans le rapport ; mieux vaut s'inscrire dans un principe de bonnes habitudes. Je me félicite, par exemple, de la décision du préfet de la région Île-de-France, M. Jean-François Carenco, qui a nommé il y a quelques semaines un médiateur pour la construction de logements dans cette région. De telles mesures pourraient voir le jour dans les régions extrêmement tendues en termes de construction de logement, là où l'on rencontre des blocages – je pense à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Je propose de généraliser la création d'observatoires du foncier afin de connaître la réalité du marché. Les livres fonciers qui existent dans l'est de la France, en Alsace et en Moselle, pourraient être étendus à l'ensemble du territoire dans une logique d'open data, c'est-à-dire de connaissance fine et diverse. Il ne s'agit pas de savoir que telle personne a vendu tel terrain à tel prix, mais de connaître de manière anonyme la réalité du marché.

Monsieur Lionel Tardy, vous avez raison, le rapport ne mentionne pas les contraintes environnementales liées à la loi Littoral et la loi Montagne. Les élus que nous avons rencontrés nous ont dit se préoccuper davantage des équipements – crèches, écoles, gymnases – qui sont liés à la création de logements que des règles environnementales. Mais, sur le fond, je partage votre analyse.

Vous souhaitez revoir la liste des zones tendues. Pourquoi pas ? De toute façon, elles sont fixées selon un déséquilibre entre l'offre et la demande. Il existe vingt-huit zones tendues. Mais elles ne sont pas toutes de mêmes importances, à la fois en termes de taille et d'effectivité de la crise du logement. Il faudrait également se diriger vers une forme de remembrement urbain. L'exemple le plus fréquemment cité au moment de la hausse de la taxe foncière sur les terrains non bâtis était celui d'un terrain constructible sur lequel ni le propriétaire, ni le maire de la commune ne veulent construire. La presse avait dévoilé un autre cas, celui d'une allée qui conduisait à trois pavillons, qui avait été qualifiée de terrain constructible parce qu'il s'agissait à l'origine d'un terrain constructible qui avait été divisé en plusieurs parcelles. Il faut sans doute faire évoluer les choses, prévoir une sorte de remembrement urbain pour bien qualifier ce qui est constructible, ce que la collectivité pense pouvoir être construit et ce qui est la résurgence de dispositions passées.

Nous nous sommes aperçus que, si l'augmentation de la taxe foncière sur les terrains non bâtis avait parfois été trop élevée, celle qui s'appliquait avant ne correspondait souvent en rien à la réalité de la valeur du bien. Quand on paie une taxe de quelques centaines d'euros pour un terrain de 30 000 mètres carrés constructible situé en zone tendue, on peut se dire que l'état de la taxation ne correspondait pas à la destination du terrain. C'est pourquoi il faut prendre le temps de réfléchir, revoir les valeurs cadastrales et changer de paradigme entre la taxation du stock et la taxation du flux.

Madame la présidente, vous avez indiqué que l'évolution de l'utilisation du foncier était différente suivant les territoires. Le but de cette mission était essentiellement de proposer des dispositifs nouveaux et des bonnes pratiques nouvelles en matière de foncier dans les zones les plus tendues. Tout le territoire national n'est pas concerné. Néanmoins, les problèmes que peuvent connaître les zones les moins tendues sont parfois la conséquence des difficultés à se loger à un prix abordable dans les territoires les plus tendus. Il faut prendre en compte cet effet domino lorsque l'on réfléchit à ces questions.

J'ai le sentiment que nombre d'acteurs sont aujourd'hui prêts à ces évolutions, considérant que, si nous ne voulons pas avoir la même discussion dans cinq ou dix ans, il faut engager une politique publique active en faveur de la construction de tous types de logements, agir pour les familles qui rencontrent des difficultés à se loger, pour la grande famille du bâtiment et de la construction, mais aussi pour faciliter l'agilité économique. Il faut en finir avec la « crise qui dure ».

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