Le rapport de la mission d'information sur la mobilisation du foncier privé en faveur du logement a été présenté à la commission (M. Daniel Goldberg, rapporteur).
C'est le 24 juin 2015 que la mission d'information sur la mobilisation du foncier privé en faveur du logement a été créée par la Commission des affaires économiques. Je remercie notre rapporteur, Daniel Goldberg, pour le travail qu'il a effectué depuis – avec Mmes Brigitte Allain et Audrey Linkenheld et MM. Hervé Pellois et Jean-Marie Tétart – et qui a déjà débouché sur le bilan d'étape qu'il a présenté le 6 octobre 2015 devant notre commission.
L'objectif de la mission était d'identifier les causes de la hausse des prix du foncier dans les zones tendues et de formuler des propositions relevant à la fois des règles fiscales et d'urbanisme, pour permettre aux acteurs publics de mobiliser plus efficacement les terrains constructibles et faciliter ainsi la construction de logements abordables.
La question de la mobilisation du foncier privé constructible en zone tendue a été discutée à plusieurs reprises dans le cadre de notre commission. Nous sommes, depuis des années, dans une situation paradoxale, puisque, alors que, par définition, une crise est transitoire, nous connaissons une crise du logement qui dure. Elle a des conséquences sociales pour ceux qui ont des difficultés à se loger, qu'ils soient issus de milieux défavorisés ou des classes moyennes, en Île-de-France ou dans de nombreuses régions. Il s'agit d'un enjeu économique pour toute la filière du bâtiment, mais aussi d'un enjeu de compétitivité pour notre pays, car les difficultés à se loger entraînent une agilité moindre du point de vue économique, lors de mutations professionnelles, par exemple.
Pour construire, il faut des terrains : il est donc indispensable que nous nous intéressions à la question foncière. Notre assemblée a d'ailleurs délibéré sur la mobilisation du foncier public à l'occasion de l'examen d'un projet de loi adopté en janvier 2013. M. Thierry Repentin, délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat, travaille sur la question, dans le dessein de libérer du foncier propriété de l'État ou de différentes entreprises publiques. Mais la majeure partie du foncier disponible concerne sans doute des territoires privés et situés, de surcroît, dans le « diffus » : ce qui signifie qu'il ne s'agit pas de grandes parcelles pouvant permettre des opérations d'importance.
Notre mission a donc essayé de comprendre comment mobiliser au mieux, dans le « diffus », ce que je qualifie de foncier « d'occasion » : des terrains déjà utilisés, où se dresse, par exemple, un entrepôt désaffecté ou un pavillon délabré non habité, et pour lesquels propriétaires et acquéreurs ne se sont pas rencontrés.
À l'issue d'une trentaine d'auditions et de déplacements en région, nous avons dressé un premier constat concernant l'état du marché du foncier. En ce qui concerne les terrains nus ou potentiellement mutables, le foncier est peu ou mal mobilisé et le marché est peu ou mal connu. Il est relativement opaque, tant du point de vue de l'équilibre des prix que de la connaissance fine des parcelles et des servitudes qui peuvent peser sur un certain nombre d'entre elles. Il est donc nécessaire de mieux identifier ce foncier.
Nous proposons d'aller vers une logique d'open data concernant la connaissance technique des terrains, leur existence, les éventuelles servitudes et l'identification de leur propriétaire. Dans le cas d'une transmission avec plusieurs héritiers, tous les propriétaires ne sont pas forcément identifiés : les promoteurs potentiels doivent alors les rechercher pour leur demander s'ils veulent bien vendre. Les prix sur le marché du logement sont relativement connus, grâce à des échelles assez fines de prix au mètre carré, mais ce n'est pas le cas pour le foncier.
Le rapport formule donc des propositions destinées à favoriser une plus grande transparence du marché. C'est d'autant plus important que, ces dernières années, la part du foncier dans une opération de construction a beaucoup augmenté : elle est de 45 % en Île-de-France, de 37 % en Rhône-Alpes et de 39 % en Languedoc-Roussillon, suivant l'ancien découpage des régions. Le marché suit une logique de compte à rebours : ce n'est pas le prix du foncier qui détermine le prix des logements, mais le prix auquel on peut vendre les biens bâtis qui fixe le prix du foncier. Aussi la part du foncier dans la richesse nationale, qui a beaucoup crû dans les années 2000, est-elle aujourd'hui considérable.
En outre, le prix du foncier d'un terrain non construit ou non utilisé augmente mécaniquement dès lors qu'il se trouve à proximité d'équipements construits ou faisant l'objet d'un projet de construction – gares du réseau de transports du Grand Paris en Île-de-France, équipements publics, comme les collèges, voire investissements privés, comme le siège social d'une entreprise. Ainsi, la puissance publique est parfois très généreuse : en finançant un équipement public, elle fait mécaniquement augmenter le prix du foncier aux alentours et doit ensuite elle-même payer plus cher lorsqu'elle veut se lancer dans la construction de logements ou dans l'investissement locatif à cet endroit. Il y a là une forme de captation sans cause de la richesse produite.
Une meilleure utilisation du foncier constructible se heurte souvent à des recours contentieux, qui grèvent les opérations de construction. Notre assemblée et le Gouvernement ont beaucoup travaillé sur la question. Une ordonnance a été prise en juillet 2013, suivie de décrets en octobre 2013. Mais les acteurs du logement que nous avons rencontrés considèrent qu'il faudrait aller plus loin. Des propositions sont faites dans le rapport pour limiter la durée des procédures contentieuses, car, lorsqu'il s'agit de construction de logements, le temps, c'est de l'argent, et le temps passé peut grever la réalisation de l'opération.
La première partie de notre rapport concerne donc la nécessité d'identifier le foncier disponible et d'en finir avec un marché opaque.
Dans la deuxième partie, nous avons essayé de réfléchir à ce qui contribuerait à une plus grande stabilité des décisions publiques et à une meilleure efficacité de chacun des acteurs. Il nous semble aujourd'hui nécessaire d'allier urbanisme opérationnel et fiscalité durable, au sens de la pérennité des décisions fiscales, pour mobiliser le foncier constructible.
Chaque fois que nous en avons débattu, nous avons regretté, sur tous les bancs, que les règles fiscales changent sans cesse. Depuis six ans, les règles d'imposition des plus-values immobilières ont été modifiées chaque année ou presque : les particuliers propriétaires de terrains ne savent plus ce qui les attend s'ils se décident à vendre, et les acteurs professionnels, eux aussi, ont du mal à s'y retrouver. Aujourd'hui, on taxe beaucoup plus ceux qui vendent un terrain que ceux qui le détiennent pendant de longues années. Au lieu de proposer une mesure de portée annuelle, nous sommes donc favorables, dans un objectif d'intérêt général, à l'instauration d'une fiscalité plus incitative, claire dans ses objectifs et pérenne pour tous les acteurs. Ainsi le rapport propose-t-il que soit débattue une loi de programmation fiscale, par nature pluriannuelle, plutôt que d'en rester à une logique de « choc d'offre » sur une année ou sur quelques mois, qui a prévalu dans certains exercices budgétaires récents et a donné très peu de résultats.
Nous recommandons un changement de logiciel fiscal, afin de taxer davantage la détention d'un terrain qui n'est pas utilisé et beaucoup moins le fait de le vendre. Cette logique fiscale a montré son efficacité dans d'autres pays. Les bases de notre imposition cadastrale, qui datent de 1961, ne correspondent plus à la réalité du marché. L'évolution de la fiscalité prendra du temps et devrait être un projet pour la prochaine majorité de l'Assemblée nationale, quelle qu'elle soit. La prochaine législature devrait s'emparer du projet, mener des expérimentations sur les territoires et prendre en compte les évolutions de la valeur vénale des terrains, ce qui n'a pas été fait depuis plus de cinquante ans.
Au-delà de l'évolution de la fiscalité, il faut que les outils de l'urbanisme opérationnel, les plans locaux d'urbanisme (PLU) et les programmes locaux de l'habitat (PLH) correspondent beaucoup plus à ce que souhaitent les élus qui les mettent en place. Aujourd'hui, ces documents sont essentiellement déclaratifs. Dans un PLU, on déclare par exemple qu'on ne veut pas construire plus d'un certain nombre d'étages. Les PLH sont aussi très déclaratifs en termes de nombre de logements construits, mais ils n'indiquent pas forcément les moyens qui permettront de construire ces logements dans un certain délai. Le rapport propose de rendre ces documents plus exécutoires, sans toutefois exiger qu'ils soient respectés à la ligne près. Ainsi, les PLH devraient pouvoir fixer des plafonds de charges foncières ou imposer des servitudes de mixité sociale dans les différents PLU. De même, lorsqu'une commune programme la construction de plusieurs centaines de logements en cinq ou six ans, le PLH devrait comporter la description précise de la partie du territoire communal sur laquelle ces logements seront construits.
Les terrains qui nous intéressent sont relativement nombreux, qu'ils soient situés dans le diffus ou qu'ils soient des terrains d'occasion : il est donc nécessaire de proposer aux communes de mettre en place des « zones de mobilisation foncière », à l'intérieur desquelles sont recherchés les terrains constructibles non habités, insuffisamment construits et insuffisamment utilisés dans les zones les plus tendues. Il faut permettre aux villes d'engager alors un processus de mobilisation effective de ces terrains, faute de quoi ils seront laissés au plus offrant, en dehors de toute organisation publique.
Enfin, il semble nécessaire de réfléchir à une évolution du droit et des pratiques, en inscrivant le droit au logement dans la Constitution – ce qui avait déjà été évoqué lors de l'examen de la loi instituant le droit au logement opposable –, afin que la puissance publique définisse clairement les objectifs qu'elle se fixe en termes de construction de logements, comme le réclamait le chercheur récemment décédé M. Jean-Philippe Brouant.
Nous avons réfléchi à cette question avec plusieurs collègues issus de tous les bancs de notre assemblée. Le Gouvernement a missionné M. Dominique Figeat pour travailler sur ce sujet : celui-ci rendra son rapport le mois prochain au ministre concerné.
Dans les années soixante-dix, M. Edgard Pisani a publié Utopie foncière : partant de sa double expérience de ministre du général de Gaulle – d'abord à l'agriculture, puis à l'équipement et au logement –, il y établit un parallèle entre deux impératifs, celui de nourrir les habitants de notre pays et celui de les loger. Plusieurs des propositions contenues dans ce rapport s'inspirent des réflexions d'Edgard Pisani et font le parallèle entre la crise du logement que nous connaissons aujourd'hui et les moyens mis en oeuvre à la Libération pour mobiliser le foncier agricole non utilisé. Devant un logement rare et cher, il faut peut-être, en effet, que les villes s'inspirent des campagnes. Cela ne sera possible que si les règles du jeu sont fixées de manière pluriannuelle et si chaque acteur assume ses responsabilités. Ce cadre, stable et connu de tous, permettra enfin de mobiliser le foncier privé en faveur du logement.
Ce rapport devrait faire date. Voilà des années que les acteurs du secteur de l'immobilier dénoncent des problèmes en matière de foncier. Nous avons essayé de résoudre ceux du foncier public, mais nous n'avons jamais réussi à régler ceux du foncier privé. Je suis donc très intéressé par les propositions contenues dans ce rapport.
Cependant, ne faudrait-il pas prévoir des modulations en fonction des territoires ? Il y a des endroits où il faut favoriser l'utilisation du foncier privé pour la construction de logements sociaux ; d'autres, au contraire, où il ne faut pas le faire, parce qu'il y en a déjà beaucoup. Sans doute faut-il mieux déterminer les zones, mais ne convient-il pas aussi de réfléchir à des fiscalités ou à des mesures différentes selon les territoires, la typologie et la forme de logements que l'on veut construire ?
Je tiens à féliciter monsieur Daniel Goldberg pour le travail très sérieux qu'il a effectué. Il dresse le constat de l'instabilité fiscale, réglementaire et législative qui, depuis quelques années, conduit à une crise de confiance et pousse les propriétaires fonciers à l'immobilisme. Je suis très heureux que ce soit un député de la majorité qui présente ces conclusions et non l'opposition qui, si elle l'avait fait, n'aurait pas eu le même impact !
La plupart des propositions contenues dans ce rapport sont bonnes, notamment celles qui concernent la fiscalité et le renforcement du caractère opérationnel des documents d'urbanisme. Comme M. François Pupponi, je considère qu'il faut peut-être des étapes intermédiaires. En tout état de cause, ces propositions, qui constituent un socle commun, devront être mises en oeuvre dans une prochaine législature.
Nous constatons, depuis trois ou quatre ans, un déficit en matière de construction de logements. Compte tenu de la pression, un rattrapage serait nécessaire. Mais il faudrait prévoir de construire bien plus que 500 000 logements par an.
Si, dans ma région – qui n'est pas une zone tendue –, on compare le nombre de terrains constructibles inscrits dans les PLU, dont la révision sera achevée avant la fin 2017, au nombre d'emplois qu'il faudrait pour répondre aux besoins des actifs nouveaux, on se rend compte que l'on va être confronté à un grave problème. Lors de la prochaine législature, il faudra que le rattrapage de la production de logements s'accompagne de la certitude que nous créons bien des emplois au même endroit, pour que les actifs puissent y travailler, sinon nous irons vers de nouvelles zones ANRU, où les lettres « RU » signifieront cette fois « rural ».
Il manquait un plan d'action sur la mobilisation du foncier privé. Les trente propositions formulées par M. Daniel Goldberg nous donnent un plan de travail pour les prochains mois. J'espère seulement que l'inscription du droit au logement dans la Constitution ne sera pas l'arbre qui cache la richesse de la forêt que constitue ce rapport.
Effectivement, la crise dure. Il y a urgence. Ne serait-il pas intéressant de distinguer les propositions qui relèvent de la loi de celles qui relèvent du pouvoir réglementaire et d'une simple circulaire ? Ne pourrait-on pas transmettre aux préfets certaines de ces mesures en les ajustant aux territoires et à leurs particularités, afin qu'elles puissent être opérationnelles sans tarder ?
Monsieur le rapporteur, je tiens à vous remercier pour le travail que vous avez effectué. Je salue votre proposition concernant l'application « Géoportail de l'urbanisme » qui s'inscrit dans une démarche générale de dématérialisation et d'open data lancée par les collectivités publiques. Il est urgent d'accélérer le développement de cette application afin de rattraper le retard pris dans ce domaine.
Vous parlez d'un discours hostile aux nouvelles constructions dans certains territoires. Il faut rappeler que ce discours n'exprime pas toujours une hostilité de principe, et qu'il peut répondre à des préoccupations environnementales. En Haute-Savoie, par exemple, certaines contraintes que vous ne mentionnez pas doivent être prises en compte, telles que la loi Littoral ou la loi Montagne.
Vous évoquez à juste titre la majoration absurde de la taxe sur le foncier non bâti, décidée en 2012. Au-delà de l'assiette que vous qualifiez de dépassée, cette majoration a montré qu'il fallait revoir la liste des zones tendues. Cette liste n'est pas très lisible pour les propriétaires, potentiels contribuables. De surcroît, elle devrait faire l'objet d'une révision régulière. En Haute-Savoie, certaines communes rurales ont été classées en zone tendue simplement parce qu'elles étaient situées à proximité d'une agglomération.
Monsieur Daniel Goldberg, votre rapport constituera une base solide pour nos travaux futurs. La rationalisation de l'utilisation du foncier doit être une préoccupation dans tous les territoires. Il serait nécessaire de définir un cadre fondateur, avec des règles différentes selon les zones. Comme vous l'avez dit, peut-être faudrait-il que les villes s'inspirent des campagnes. Cela dit, la pression exercée sur les terrains agricoles mérite qu'une réflexion d'ensemble soit engagée sur le foncier. J'ajoute que les pressions énormes auxquelles sont soumis les élus locaux lors de la révision des PLU et qui constituent un enjeu lors des élections municipales font que la réflexion sur la rationalisation du foncier est rarement dépassionnée.
Je vous remercie pour les compliments que vous m'avez adressés. Ce sont les discussions que j'ai pu avoir avec les uns et les autres qui ont permis d'aboutir.
Monsieur François Pupponi, il doit en effet y avoir différenciation des règles suivant les territoires. Comme je l'ai dit en introduction, ce rapport se concentre sur les zones tendues, là où il y a un déficit clair entre l'offre et la demande, ce qui n'est pas le cas partout. Nous avons besoin de construire beaucoup de logements : ce discours, qui n'a pas été suffisamment porté lors des précédentes échéances nationales de 2012, sera au coeur de la prochaine campagne présidentielle. Voulons-nous continuer de vivre ensemble, côte à côte, dans le même quartier, avec nos différences sociales et culturelles ? Chacun sait que certaines positions politiques, qui rencontrent du reste un certain succès lors des élections, cassent les relations et la République au sens où nous l'entendons, tous ici, dans cette commission.
Il faut construire beaucoup de logements, parce que la population française va continuer de croître, ce qui est bon pour nos équilibres sociaux et notre dynamisme économique. Les besoins en nombre de mètres carrés de logement par habitant vont sans doute continuer d'augmenter du fait du nombre de célibataires, du vieillissement de la population, de la moindre stabilité des couples – la garde partagée des enfants nécessite deux fois plus de surface qu'à l'origine. C'est pourquoi je propose de garantir, par la loi, la reconnaissance de l'utilité publique à toute opération de construction de logements répondant aux objectifs fixés par les PLH dans les zones tendues, et non plus seulement aux opérations de construction de logements sociaux – c'est la proposition n° 24. Cette utilité publique devrait être davantage reconnue et portée par les différentes formations politiques. Dans mon rapport, je parle du « dernier arrivé qui ferme la porte », c'est-à-dire de la dernière personne arrivée dans un quartier qui ne souhaite pas que d'autres constructions puissent voir le jour. Vous avez raison, madame la présidente, il est parfois difficile pour les élus locaux de résister à une forme de pression. C'est pourquoi je suis favorable à un PLU intercommunal, ce qui permettrait de faire baisser la pression tout en restant dans le champ démocratique. De surcroît, les élus doivent dire clairement quel projet de ville ils proposent. Comme l'a dit M. Jean-Marie Tétart, il faut un socle commun.
Il a dénoncé l'instabilité fiscale, réglementaire et législative. Elle n'est pas propre à cette majorité et chacun a sa part de responsabilité. En ce qui me concerne, je la déplore. Les prochaines élections nationales pourraient être l'occasion de parvenir à un consensus sur la nécessité de construire et sur des règles qui pourraient être pérennes.
Je partage son analyse quant à la nécessité d'un lien entre l'emploi et le logement. J'y ajouterai le transport, puisque c'est ce dont souffre notre pays, peut-être plus que d'autres. Je me suis rendu en Allemagne, à Cologne, pour voir comment était pris en compte ce type de problématique. Évidemment, le dispositif n'est pas exactement le même.
Par ailleurs, il faut accepter une réalité : la ville, en France, ce n'est plus la commune. Ce n'est plus au sein de la seule commune que l'on peut à la fois se loger, aller à l'école, pratiquer des activités culturelles, sportives, et travailler. Aussi nos règles doivent-elles s'adapter.
Monsieur Philippe Bies a rappelé à juste titre ce qui relevait de la loi et des circulaires. J'ajouterai à cela les bonnes habitudes. Notre cadre législatif n'a pas nécessairement besoin d'évoluer sur tous les sujets abordés dans le rapport ; mieux vaut s'inscrire dans un principe de bonnes habitudes. Je me félicite, par exemple, de la décision du préfet de la région Île-de-France, M. Jean-François Carenco, qui a nommé il y a quelques semaines un médiateur pour la construction de logements dans cette région. De telles mesures pourraient voir le jour dans les régions extrêmement tendues en termes de construction de logement, là où l'on rencontre des blocages – je pense à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Je propose de généraliser la création d'observatoires du foncier afin de connaître la réalité du marché. Les livres fonciers qui existent dans l'est de la France, en Alsace et en Moselle, pourraient être étendus à l'ensemble du territoire dans une logique d'open data, c'est-à-dire de connaissance fine et diverse. Il ne s'agit pas de savoir que telle personne a vendu tel terrain à tel prix, mais de connaître de manière anonyme la réalité du marché.
Monsieur Lionel Tardy, vous avez raison, le rapport ne mentionne pas les contraintes environnementales liées à la loi Littoral et la loi Montagne. Les élus que nous avons rencontrés nous ont dit se préoccuper davantage des équipements – crèches, écoles, gymnases – qui sont liés à la création de logements que des règles environnementales. Mais, sur le fond, je partage votre analyse.
Vous souhaitez revoir la liste des zones tendues. Pourquoi pas ? De toute façon, elles sont fixées selon un déséquilibre entre l'offre et la demande. Il existe vingt-huit zones tendues. Mais elles ne sont pas toutes de mêmes importances, à la fois en termes de taille et d'effectivité de la crise du logement. Il faudrait également se diriger vers une forme de remembrement urbain. L'exemple le plus fréquemment cité au moment de la hausse de la taxe foncière sur les terrains non bâtis était celui d'un terrain constructible sur lequel ni le propriétaire, ni le maire de la commune ne veulent construire. La presse avait dévoilé un autre cas, celui d'une allée qui conduisait à trois pavillons, qui avait été qualifiée de terrain constructible parce qu'il s'agissait à l'origine d'un terrain constructible qui avait été divisé en plusieurs parcelles. Il faut sans doute faire évoluer les choses, prévoir une sorte de remembrement urbain pour bien qualifier ce qui est constructible, ce que la collectivité pense pouvoir être construit et ce qui est la résurgence de dispositions passées.
Nous nous sommes aperçus que, si l'augmentation de la taxe foncière sur les terrains non bâtis avait parfois été trop élevée, celle qui s'appliquait avant ne correspondait souvent en rien à la réalité de la valeur du bien. Quand on paie une taxe de quelques centaines d'euros pour un terrain de 30 000 mètres carrés constructible situé en zone tendue, on peut se dire que l'état de la taxation ne correspondait pas à la destination du terrain. C'est pourquoi il faut prendre le temps de réfléchir, revoir les valeurs cadastrales et changer de paradigme entre la taxation du stock et la taxation du flux.
Madame la présidente, vous avez indiqué que l'évolution de l'utilisation du foncier était différente suivant les territoires. Le but de cette mission était essentiellement de proposer des dispositifs nouveaux et des bonnes pratiques nouvelles en matière de foncier dans les zones les plus tendues. Tout le territoire national n'est pas concerné. Néanmoins, les problèmes que peuvent connaître les zones les moins tendues sont parfois la conséquence des difficultés à se loger à un prix abordable dans les territoires les plus tendus. Il faut prendre en compte cet effet domino lorsque l'on réfléchit à ces questions.
J'ai le sentiment que nombre d'acteurs sont aujourd'hui prêts à ces évolutions, considérant que, si nous ne voulons pas avoir la même discussion dans cinq ou dix ans, il faut engager une politique publique active en faveur de la construction de tous types de logements, agir pour les familles qui rencontrent des difficultés à se loger, pour la grande famille du bâtiment et de la construction, mais aussi pour faciliter l'agilité économique. Il faut en finir avec la « crise qui dure ».
Je vous remercie pour cet important travail. La ministre du logement, Mme Emmanuelle Cosse, devant être auditionnée par notre commission au mois de mars, nous serons amenés à aborder à nouveau tous ces sujets.
La Commission autorise la publication du rapport d'information.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mardi 16 février 2016 à 13 h 45
Présents. – Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Philippe Bies, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, M. Henri Jibrayel, M. Jean-Luc Laurent, Mme Frédérique Massat, M. François Pupponi, Mme Béatrice Santais, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tétart
Excusés. – M. Thierry Benoit, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Jeanine Dubié, M. Thierry Lazaro, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Charles Taugourdeau