Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous achevons l’examen d’un texte controversé puisqu’il a été rejeté hier dans son intégralité par le Sénat.
La navette parlementaire a révélé de nombreuses divergences et des points de vue inconciliables, en particulier sur les modalités d’accès à la carte de séjour pluriannuelle ou aux titres de séjour réservés aux étrangers malades. La mesure la plus caractéristique de ce désaccord a d’ailleurs été l’instauration par le Sénat d’un quota triennal d’étrangers autorisés à s’installer en France, rejetée ensuite par l’Assemblée nationale.
L’échec de la CMP et le rejet du texte par le Sénat nous amènent donc à examiner le texte adopté par notre assemblée lors de la précédente lecture.
Sans nier les difficultés qui entourent la politique d’immigration, cette dernière ne doit pas être uniquement perçue comme une contrainte à juguler. Elle peut aussi être une chance. Pour autant, elle doit aussi rimer avec intégration – dont les composantes sont l’apprentissage de la langue, l’appropriation des valeurs de la République et l’accès à l’emploi.
Dans ce même esprit, le projet de loi a l’avantage de rénover le contrat d’accueil et d’intégration, reconnu, notamment par l’Inspection générale des affaires sociales, comme un dispositif coûteux et présentant certaines faiblesses.
Nous souscrivons donc à votre volonté de mettre en oeuvre une logique personnalisée. Pour autant, une simple information sur la vie en France et les droits et devoirs qui y sont liés est loin d’être à la mesure de l’enjeu. L’étranger qui souhaite s’installer durablement sur le territoire français doit, avant son entrée en France, apporter la preuve de sa capacité d’intégration à la société française.
Pour ce qui est des conditions de connaissance de la langue française pour la délivrance de la carte de résident, l’intention est louable. Nous regrettons néanmoins que l’exigence d’un niveau suffisant ne figure plus dans le texte actuel.
Quant à la carte de séjour pluriannuelle, nous craignons l’aspect quasi automatique de la délivrance que prévoit le projet de loi. En outre, les conditions de délivrance du titre de séjour pluriannuel ont été, à notre sens, excessivement assouplies.
Un autre des objectifs affichés de ce texte est celui de « contribuer à l’attractivité de la France ». Dans un contexte de mondialisation, nous devons faire en sorte d’attirer les meilleurs talents, les étudiants et les artistes prometteurs qui représentent de véritables atouts pour un pays. Mais, là encore, la navette parlementaire n’a pas permis d’encadrer davantage les dispositions dans ce domaine. Pour le passeport talent, par exemple, les termes demeurent trop incertains.
En outre, certaines dispositions de ce texte pourraient avoir pour effet néfaste de favoriser la fraude ou, du moins, d’y contribuer – je pense notamment à l’élargissement de l’accès à la procédure de séjour pour les étrangers malades et de l’autorisation de séjour de plein droit pour le parent d’un enfant malade.
Enfin, vous souhaitez privilégier l’assignation à résidence et faire du placement en rétention une exception, ce qui ne permet en rien d’améliorer la lutte contre l’immigration irrégulière.
J’ajouterai, à titre plus personnel, qu’il importe d’aborder ces questions de la manière la plus dépassionnée possible. Il s’agit en effet de ne pas faire de cette question importante, à propos de laquelle une bonne partie de notre pays nous regarde et à laquelle la jeunesse française est particulièrement sensible, un enjeu trop partisan ou trop clivant. En effet la France est belle et grande lorsqu’elle est ouverte et accueillante, mais aussi lorsqu’elle se montre responsable. Nous devons accueillir celles et ceux qui doivent légitimement pouvoir venir dans notre pays parce qu’ils sont pourchassés dans leur pays d’origine, mais nous ne pouvons pas – si je puis paraphraser un ancien Premier ministre – accueillir toute la misère du monde.
Ce projet de loi, s’il est ambitieux sur le plan de l’intégration, de la clarification des procédures et de la simplification des parcours, l’est beaucoup moins sur le plan de la maîtrise des flux et de la lutte contre l’immigration irrégulière.
Avec regret, le groupe UDI votera donc, comme lors des précédentes lectures, contre ce texte.