Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur, mais également au ministre de la justice, dont je souhaiterais en effet connaître l’avis quant à l’intervention du procureur de la République en tant qu’organe de contrôle judiciaire de cette mesure de retenue, qui est certes attentatoire à une liberté individuelle. Elle est nécessaire, et c’est pourquoi nous l’avons votée dans le cadre de ce projet de loi, mais reste à savoir de quelles garanties vous l’assortissez pour le respect des libertés individuelles.
Pourquoi avoir choisi le procureur de la République, et non pas le juge des libertés et de la détention – JLD ? Vous connaissez en effet la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme sur le statut du parquet. De fait, jusqu’à preuve du contraire, le parquet n’est pas encore indépendant dans notre pays. Peut-être le deviendra-t-il – c’est en tout cas ce que je souhaite, à titre personnel –, mais cela suppose une révision de la Constitution puisque cela suppose une réforme du Conseil supérieur de la magistrature. J’ignore si vous la ferez.
Vous introduisez à maintes reprises dans ce projet de loi le juge des libertés et de la détention, ce qui est normal. Ainsi, lorsque le procureur de la République procède à des perquisitions de nuit, il le fait, si j’ai bien compris, sur autorisation du JLD. Se pose donc la question du statut de ce juge, qui n’existe pas encore dans l’organisation judiciaire actuelle – il est en effet désigné par le président du tribunal, et non pas nommé par décret, comme les juges d’instruction ou les juges des enfants. Le JLD dispose de pouvoirs accrus, très importants, ce qui pose la question de son statut et suppose aussi une réforme par loi organique.
Dans cette histoire, on a un peu mis la charrue avant les boeufs, car il aurait d’abord fallu définir un statut reconnu et particulier du JLD. Je crains donc que ces dispositions et les garanties apportées ne soient pas suffisantes au regard des règles imposées par l’Union européenne.