Intervention de Chantal Guittet

Réunion du 16 février 2016 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Guittet, rapporteure :

Madame la Présidente, mes chers collègues, le présent projet de loi vise à approuver l'accord relatif aux mesures du ressort de l'État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

La pêche illicite, non déclarée et non réglementée, dite « pêche I.N.N. », est une activité dont les conséquences peuvent être désastreuses, d'abord en matière environnementale, puisqu'elle menace les ressources halieutiques et peut aboutir à la disparition de certaines espèces, mais également sur le plan économique et politique, puisque la pêche illicite prive de ressources des régions côtières et menace ainsi non seulement l'économie de ces régions, mais dans certains cas leur sécurité alimentaire.

De par son caractère clandestin, la pêche « I.N.N. » est difficile à quantifier, même si son chiffre d'affaire global a été récemment estimé entre 10 et 23 milliards de dollars par an.

Mais surtout, la lutte contre la pêche I.N.N. ne peut être efficace que si elle fait l'objet d'une coordination étroite entre l'ensemble des États du pavillon et des États du port. C'est ce que la communauté internationale s'est efforcé de mettre en place progressivement depuis un quart de siècle.

En 1992, à l'occasion de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement de Rio de Janeiro, plusieurs instruments internationaux non contraignants ont été adoptés en matière de protection des ressources halieutiques :

- l'Accord visant à promouvoir le respect par les navires pêchant en haute mer des mesures internationales de conservation et de gestion adopté en 1993 dans le cadre de la FAO ;

- l'Accord sur les stocks chevauchants et les poissons grands migrateurs adopté par les Nations Unies en 1995 ;

- le Code de conduite pour une pêche responsable adopté en 1995 sous l'égide de la FAO.

La lutte contre la pêche « I.N.N. » en tant que telle a fait l'objet d'un « Plan d'action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée », adopté en 2001 dans le cadre de la FAO.

Ce document invitait les États du pavillon à prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que leurs ressortissants ne soutiennent ni ne pratiquent la pêche I.N.N., ce qui impliquait la mise en place d'un système de contrôle et d'une surveillance systématiques et efficaces de la pêche, du commencement des opérations jusqu'à la destination finale.

Il s'agissait cependant d'un document non contraignant reposant sur la mise en oeuvre progressive de plans d'action nationaux.

Le Plan d'action de 2001 traitait par ailleurs principalement des mesures à prendre par l'État du pavillon. Il est rapidement apparu nécessaire de réfléchir également au renforcement du contrôle par l'État du port, c'est-à-dire les États dont les navires doivent utiliser les ports pour se livrer aux activités de pêche illicite.

Le Comité des pêches de la FAO a ainsi approuvé en 2005 un document non contraignant intitulé : « Dispositif type relatif aux mesures du ressort de l'État du port dans le contexte de la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée ». Puis, sur la base d'un projet préparé par un groupe d'experts en septembre 2007, les membres du FAO ont négocié entre juin 2008 et août 2009 le texte final de l'accord que nous examinons aujourd'hui.

Cet accord est composé d'un préambule, de dix parties contenant 37 articles et de cinq annexes. Après les dispositions générales, les parties 2 et 3 traitent de l'usage des ports et précisent dans quelles conditions les Parties ont l'obligation de refuser l'entrée de leurs ports aux navires suspectés de pratiquer la pêche I.N.N., ce refus étant également transmis aux autres Parties où aux États côtiers et aux organisations régionales de gestion des pêches.

La partie 4 oblige les Parties à l'accord à pratiquer des inspections régulières et en nombre suffisant pour atteindre l'objectif de l'accord. Leur conduite fait l'objet d'une procédure décrite à l'article 13 et précisée par les annexes B et C, ainsi que de la transmission à l'État du pavillon et aux autres États et organisations concernées des informations recueillies, ces dernières devant par ailleurs nourrir un système d'échange de données dont la mise en place est encouragée par l'article 16.

Les obligations de l'État du pavillon sont énumérées dans la partie 5. L'État du pavillon doit demander à ses navires de coopérer avec les inspections prévues par la partie 4 et prendre les mesures coercitives prévues par son droit interne lorsqu'un cas de pêche I.N.N. lui est signalé.

La partie 6 de l'accord traite des besoins particuliers des États en développement et encourage les Parties à leur fournir l'assistance dont ils ont besoin pour pouvoir mettre en oeuvre les dispositions de l'accord. Les parties 7 à 10 contiennent des dispositions finales classiques. L'article 29 précise notamment que l'accord entre en vigueur trente jours après la date du dépôt du vingt-cinquième instrument de ratification.

Les conséquences juridiques de l'accord pour la France sont limitées. En effet, le Règlement européen du 29 septembre 2008, dit « règlement I.N.N. », vise les mêmes objectifs mais son niveau d'exigence est équivalent ou supérieur à celui de l'accord. La ratification de cet accord par la France aura toutefois pour effet d'accélérer l'entrée en vigueur de ce texte, puisque sept États seulement l'ont à ce jour ratifié, sur les vingt-cinq requis pour son entrée en vigueur.

Je vous invite par conséquent à adopter le projet de loi qui nous est soumis.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion