Intervention de Philippe Goujon

Séance en hémicycle du 9 mars 2016 à 15h00
Transports collectifs de voyageurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, dans la guerre qui nous oppose au terrorisme, notre rôle est de forger un véritable « bouclier de sécurité » pour protéger nos concitoyens.

Les transports en commun sont utilisés chaque jour par 10 millions de personnes en France, dont plus de 7 millions en Île-de-France. Pas moins de 14 000 trains circulent chaque jour pour transporter 2,5 milliards de voyageurs chaque année.

Pour faire face à cette menace, la police des transports compte 2 000 agents, le service de sécurité de la SNCF 2 800 et celui de la RATP 1 250.

Si ces effectifs peuvent assurer la sécurité du quotidien des transports, ils ne sont pas en mesure d’affronter la menace terroriste, que vous venez de qualifier de prioritaire, monsieur le secrétaire d’État. Celle-ci, d’ailleurs, ne se dément pas. J’en veux pour preuve cet individu radicalisé, assigné à résidence pendant trois mois, qui a pu prendre dimanche, sans entrave, un avion à Nantes et placer en soute des couteaux ainsi qu’une bombonne de gaz, avant d’être arrêté à son arrivée au Maroc.

La loi doit donc donner à ces forces de sécurité davantage de moyens. Tel est l’objectif de ce texte, et nous y souscrivons.

Oui, il est utile d’accorder à ces agents le droit de procéder à des inspections visuelles, à la fouille de bagages, à des palpations de sécurité, à l’instar des agents qui sécurisent les établissements accueillant du public.

Oui, il est utile de leur permettre de patrouiller en civil et de disposer de caméras-piétons pour sécuriser leurs interventions.

Oui, il est utile de les autoriser à constater directement certaines infractions, comme les ventes à la sauvette dans les gares.

Oui, la police municipale doit contribuer à cette mission, et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je demande à la maire de Paris de doter la capitale d’une police municipale, comme cela existe dans de nombreuses villes françaises et européennes.

Oui, les forces de l’ordre doivent pouvoir accéder en temps réel aux images de vidéoprotection des réseaux de transports publics, le parcours des terroristes du Bataclan nous ayant prouvé une fois de plus que ceux-ci se déplacent aussi en transports en commun.

Oui, les personnes qui occupent des fonctions sensibles dans les entreprises de transports en commun doivent faire l’objet d’une enquête administrative, et il est heureux que le Sénat, rejoignant les propositions que j’avais portées en première lecture, ait étendu ce « criblage » aux personnels déjà en poste, comme le demandent d’ailleurs les entreprises de transport confrontées au phénomène de radicalisation.

Je regrette d’ailleurs que la CMP, qui a maintenu une demande de rapport sur le financement de la sécurisation des transports, n’ait pas réintroduit l’article 6 bis A inséré à mon initiative et relatif à la sécurisation des cabines de conducteurs de trains et de métros, ainsi qu’aux dispositifs permettant d’arrêter les trains à distance.

Parce que tout doit être mis en oeuvre pour sécuriser les transports, je regrette que ce texte, faute d’avoir retenu les améliorations proposées par l’opposition, notamment celles de M. Ciotti ou M. Darmanin, s’arrête au milieu du gué.

Il aurait fallu, comme nous le proposions, permettre aux agents de sécurité des transports habilités à porter une arme, de la porter hors service, comme c’est déjà le cas pour les policiers et policiers municipaux, afin de sécuriser tous les transports et lieux publics et éviter que des attentats comme celui qui a failli frapper le Thalys le 21 août dernier ne se reproduisent.

Il aurait fallu lever la condition de consentement préalable à la fouille de bagages ou à la palpation de sécurité, ne pas les conditionner à l’autorisation du Procureur, au risque de surcharger ce magistrat au-delà du fait que le délai d’immobilisation de trente minutes pourrait ne pas être suffisant pour le contacter, et poser clairement dans la loi le principe que tout refus de se plier à ces contrôles entraîne refoulement et interdiction d’accéder au réseau de transports.

Il aurait fallu rendre obligatoire la justification de l’identité dans les transports pour tous les passagers, et permettre aux agents de sécurité ferroviaire de procéder à des vérifications d’identité dans ces lieux.

La limitation de la justification de l’identité aux seuls passagers qui n’ont pas de titre de transport risque d’être inopérante, puisque les fraudeurs se garderont de présenter leurs papiers !

Si la pénalisation des mutuelles de fraudeurs était indispensable, il est dommage d’avoir limité à cinq au lieu de trois le nombre de fraudes caractérisant le délit d’habitude.

L’adoption d’un de nos amendements permettra néanmoins de centraliser le signalement de l’usurpation d’identité révélée par les croisements de fichiers administratifs dans le cadre du recouvrement des amendes par les opérateurs de transports.

En conclusion, le groupe Les Républicains votera ce texte, fidèle à son engagement dans la guerre contre le terrorisme. Mais nous espérons que vous ne serez pas obligé, monsieur le secrétaire d’État, d’adapter de nouveau dans quelques mois notre droit en réaction aux événements, alors que l’opposition ne cesse de vous proposer d’anticiper la menace. Vous auriez tort de ne pas en profiter.

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