Le groupe SRC, dont je suis la représentante pour ce texte, va exactement dans le même sens que le rapporteur et le garde des sceaux.
Je comprends la demande de l’UDI, qui est pétrie de bonnes intentions à l’égard des victimes. Il n’est toutefois pas possible que quelques affaires que nous connaissons puissent entraîner, par les situations humaines particulièrement douloureuses qu’elles provoquent, une modification radicale de notre droit des prescriptions. Cela reviendrait à créer une nouvelle inégalité entre les victimes majeures et les victimes mineures et, comme l’a fort bien souligné le rapporteur, une inégalité entre les catégories d’infractions – bref, une rupture d’égalité dans notre droit pénal.
Ce serait surtout rendre un très mauvais service aux victimes. Il faut en effet rappeler, comme l’a fait le garde des sceaux, ce qu’est un procès pénal criminel dans ce type d’infraction. Si la victime mineure est devenue majeure, l’auteur, lui, a considérablement vieilli. Il faut rapporter la preuve des faits, trouver des témoins, rappeler à l’envi les faits. En ouvrant la prescription, d’aucuns voudraient faire croire aux victimes qu’elles pourraient ainsi obtenir la mise en jeu de l’action publique, l’engagement de poursuites et la condamnation d’un auteur présumé. Or nous savons à quel point le procès pénal est généralement destructeur pour les victimes, quelle que soit son issue.
Il est également très illusoire de faire croire aux victimes qu’un procès pénal participe à leur reconstruction. C’est heureusement le cas lorsqu’elles ont besoin d’être reconnues comme victimes quand l’auteur conteste les faits, mais pour le reste, il faut rester prudents. Aujourd’hui, il n’est pas question d’ouvrir cette situation. Le délai actuel de vingt ans, et j’ai eu connaissance d’un très grand nombre de dossiers de ce type, laisse dans la pratique très largement le temps à la victime d’entamer une thérapie et de décider d’engager, ou pas, des procédures pénales, avec toutes leurs conséquences éventuelles. Dans la réalité, c’est très rapidement après les dix-huit ans que la plainte est déposée et l’action publique engagée. C’est pourquoi nous sommes opposés à ces amendements et voterons contre.