Intervention de Dino Cinieri

Séance en hémicycle du 15 mars 2016 à 15h00
Biodiversité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDino Cinieri :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous sommes tous d’accord sur ces bancs pour dire que la préservation de la biodiversité est un enjeu capital pour la survie de l’homme et celle de notre planète. Au-delà de son apport fondamental à l’environnement, la biodiversité contribue à l’économie, à l’attractivité du territoire, et elle offre une matière première essentielle pour l’innovation, notamment dans le domaine agricole.

Néanmoins, ce texte que nous travaillons depuis deux ans ne doit pas opposer nos concitoyens, car l’ensemble des acteurs économiques – les agriculteurs, les pêcheurs, les forestiers, les chasseurs – sont des acteurs majeurs de la biodiversité. Le monde agricole exaspéré, fragilisé par les crises, découragé par les contraintes toujours plus nombreuses ne doit pas non plus être la cible de ce projet de loi car les agriculteurs, notamment les éleveurs, sont indispensables pour administrer, dans la confiance et la responsabilité, la biodiversité.

Ce que nous souhaitons, c’est que ce projet de loi aboutisse à une véritable démarche partenariale et non à une écologie punitive. La préservation de la biodiversité peut ne pas être un obstacle au développement économique. C’est cet équilibre qu’il nous faut trouver.

En commission, pour cette deuxième lecture, nous avons examiné 999 amendements et 341 ont été adoptés, dont quatorze que j’ai présentés.

Ce texte tend à compléter les lois « Grenelle 1 » et « Grenelle 2 », mais il risque de perdre sa force en s’éparpillant. Je pense notamment à la taxe « Nutella » créée à l’article 27 A.

Plusieurs inquiétudes persistent après l’examen en commission. J’en évoquerai quelques-unes, avant d’y revenir tout au long des débats lorsque je défendrai mes amendements.

La principale inquiétude des maires concerne l’article 51 terdecies, qui prévoit la modulation de la dotation de solidarité rurale en fonction de l’éclairage nocturne du domaine public des communes. Cette mesure, outre qu’elle n’est pas pertinente, revient à sanctionner soit les communes les plus modestes, qui ont encore des installations anciennes, soit les plus vertueuses, car la modulation s’appuie sur une diminution en pourcentage de l’éclairage, sans prendre en compte la performance initiale. J’espère donc que vous aurez la sagesse, chers collègues, d’accepter les amendements tendant à supprimer l’article.

Par ailleurs, nos agriculteurs espèrent que les obligations réelles environnementales prévues à l’article 33 constitueront un vrai contrat entre deux parties, avec des engagements réciproques. Ils soulignent également que l’interdiction du broyage des jachères et des bordures de champs est superflue, puisqu’un arrêté préfectoral dans chaque département prévoit d’ores et déjà des dates d’interdiction de broyage pour ces espaces.

Nous avons reçu ces derniers jours des centaines de mails émanant d’associations et lobbies écolos – et même un pot de miel hier ! – pour nous inciter à voter l’interdiction des néonicotinoïdes à l’article 51 quaterdecies. Pour une fois, je suis d’accord avec le ministre Stéphane Le Foll, qui s’y oppose. C’est pourquoi je défendrai un amendement prévoyant l’encadrement de leur utilisation par un arrêté ministériel, prenant en compte l’avis de l’ANSES.

La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a rendu obligatoire une compensation forestière pour les demandes d’autorisation de défrichement. Cette disposition s’applique aujourd’hui lorsqu’un agriculteur souhaite défricher pour mettre en culture. Pour remplir l’obligation de compensation forestière, le porteur de projet doit reboiser des parcelles selon un coefficient multiplicateur.

À titre d’exemple, dans mon département de la Loire, régulièrement concerné par des défrichages en vue d’implanter de la vigne, l’obligation de compensation peut aller jusqu’à cinq fois la surface défrichée, et s’y ajoute une taxe qui varie entre 2 000 et 10 000 euros par hectare. Pour un viticulteur, une telle charge est insupportable : elle le conduit à abandonner son projet.

La mesure s’applique également lorsque la terre, qui avait une vocation agricole, a été abandonnée et, de ce fait, est aujourd’hui boisée. Or, depuis plus de trente ans, en France la forêt gagne plus de 90 000 hectares par an sur l’agriculture. C’est pourquoi je défendrai à l’article 68 sexies un amendement tendant à exclure les projets agricoles du coefficient multiplicateur de reboisement comme de la taxe additionnelle.

Les agriculteurs s’inquiètent également de la disposition introduite par le Sénat à l’article 51 decies A visant à élaborer un arrêté ministériel pour encadrer la tenue des registres sur les produits phytosanitaires et à définir les données qui peuvent être exigées par l’administration, ainsi que celles qui seront rendues publiques.

Alors que le Gouvernement prône la simplification administrative et que les agriculteurs doivent déjà tenir un registre qui peut être contrôlé à tout moment par l’administration, cette mesure paraît inutilement vexatoire. Les produits phytosanitaires coûtent très cher et aucun agriculteur n’y recourt à la légère.

Rendre publiques les données serait stigmatisant et très préjudiciable pour le climat dans nos campagnes. Le sujet des produits phytosanitaires est suffisamment anxiogène. Il n’est pas nécessaire d’en rajouter. C’est pourquoi je défendrai la suppression de l’article.

N’ayant que cinq minutes, je ne peux évoquer tous les points qui posent problème.

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