Quel parcours long et tortueux pour arriver à cette deuxième lecture ! Et ce n’est pas fini, car on peut en effet douter d’une adoption conforme au Sénat. Mais une loi sur la nature est un événement important : de tels textes sont bien trop rares, le dernier remontant en effet à 1976. Dans son parcours chaotique, ce projet de loi au départ très technique s’est enrichi, grâce à l’apport des amendements parlementaires, et porte à présent des propositions fortes pour la préservation et la reconquête de la biodiversité. Il dépendra de nos votes que ces propositions, en particulier l’interdiction des pesticides ou du chalutage en eaux profondes, deviennent enfin réalité, et que cette loi puisse réellement incarner un projet ambitieux pour l’environnement.
J’ai envie de rêver à ce changement tant attendu, mais je connais la réalité des rapports de force politiques et le poids des lobbies. Dès lors, je doute fort que cette loi devienne « la » grande loi de préservation de la biodiversité. Pourtant, nos concitoyens, qui subissent tous, sans exception, les effets des pollutions diverses et variées, liées au mépris de notre modèle de développement pour la nature et les écosystèmes, attendent de nous des mesures fortes et du courage politique. De fait, la dégradation de notre environnement, l’érosion de la biodiversité s’opèrent à un rythme soutenu. Si une politique ambitieuse n’est pas menée rapidement, c’est près d’un tiers des espèces vivant sur terre qui pourraient avoir disparu d’ici la fin du siècle, et cela entièrement de la faute de l’homme.
Rien, ou quasiment rien, ne va dans le mauvais sens dans ce texte. C’est plutôt un sentiment d’inachevé qui en émane. On aurait dû, on devrait faire plus, aller plus loin. Intégrer l’Office national de la chasse et de la faune sauvage aurait par exemple utilement complété le projet de l’Agence française pour la biodiversité. Mais le lobby de la chasse, bien représenté dans cette assemblée, en a malheureusement décidé autrement.
Dans nos débats, nous avons adopté des dispositifs importants, comme l’interdiction du chalutage en eaux profondes, que j’ai déjà évoquée et qui est essentielle pour la préservation des fonds marins. Nous devons confirmer en séance cette interdiction, comme nous devons confirmer l’interdiction des pesticides néonicotinoïdes. Si cette interdiction est maintenue, ce sera la mesure forte de cette loi, celle dont on se souviendra.