Intervention de Chantal Berthelot

Séance en hémicycle du 15 mars 2016 à 15h00
Biodiversité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Berthelot :

Nous examinons, en deuxième lecture, le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Lors de la première lecture, nous avions pu l’enrichir et le préciser, mais également trouver des points d’équilibre. Les travaux réalisés par nos collègues sénateurs, et ceux menés par la commission du développement durable au cours des deux dernières semaines, nous ont permis, une fois encore, de gagner en efficacité pour nous rapprocher de la réalité de notre biodiversité et des territoires qui l’abritent.

Avec l’article 18, consacré à l’accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages – APA – nous avons su, non sans difficultés, nous réconcilier – encore un peu plus – avec la lettre et avec l’esprit du protocole de Nagoya.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il ne suffit pas de proclamer que notre nation est immensément riche de la biodiversité de ses territoires ultramarins, ni de reconnaître, à la tribune, que la France, grâce à ses outre-mer, abrite sur plusieurs continents et dans plusieurs zones bioclimatiques un patrimoine biologique exceptionnel. Il faut que ces affirmations, ces vérités incontestables et d’ailleurs incontestées trouvent leur traduction législative et soient suivies d’effets concrets. S’agissant d’un sujet aussi vital, le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité nous a offert et nous offre encore l’occasion de répondre à cet impératif.

À cet égard, je tiens à saluer ici la cohérence dont nous, parlementaires ultramarins, avons su faire preuve dans les travaux au Sénat comme à l’Assemblée nationale. Grâce au soutien du Gouvernement et de Mme la rapporteure, nous sommes parvenus à améliorer ce texte afin de permettre aux territoires ultramarins de bénéficier d’une représentation plus pertinente et plus juste au sein des différentes instances de gouvernance de la biodiversité.

Ces améliorations, qui étaient indispensables à la justesse de ce projet loi, doivent à présent être préservées et consolidées et je sais, mes chers collègues, pouvoir compter sur votre soutien et votre clairvoyance pour qu’il en soit ainsi.

Nous aurons également à consolider et préciser les corrections apportées à l’article 18. Je pense notamment à la prise en compte par l’AFB, lors de la redistribution des avantages pouvant découler de l’utilisation des ressources génétiques, de la part importante de la biodiversité de nos territoires ultramarins. Nos populations et nos territoires aspirent à une croissance verte et au développement de filières locales de pointe et d’avenir en matière de recherche, d’innovation et d’utilisation durable de notre biodiversité.

Je pense également aux procédures d’information et de consultation des communautés d’habitants autochtones et locales pour l’accès aux ressources génétiques et l’utilisation des connaissances traditionnelles associées. La personne morale de droit public qui sera chargée d’organiser cette consultation, de recueillir leur consentement et d’assurer leur représentation aux différentes étapes de ces procédures se doit de détenir la légitimité indispensable à l’exercice de cette responsabilité. C’est pourquoi, avec le soutien de mes collègues Gabrielle Louis-Carabin et Éric Jalton, de Mme la rapporteure et du Gouvernement, j’ai défendu un amendement, qui a été adopté, qui vise, en Guyane – une fois le changement statutaire réalisé – à faire du Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge cette personne morale de droit public.

Je pense, enfin, aux avantages découlant de l’utilisation des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques : ils devront être affectés à des projets réalisés en concertation et avec la participation des communautés autochtones et locales concernées.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, puisque la pédagogie – et, permettez-moi de le dire, la persuasion – est l’art de la répétition, permettez-moi de redire quelques mots prononcés il y a un an dans cet hémicycle. Préserver la biodiversité, c’est préserver l’environnement dans lequel elle s’invente et se réinvente chaque jour.

Préserver la biodiversité, c’est aussi, et surtout, reconnaître les droits de ceux qui oeuvrent depuis des siècles pour sa préservation et sa valorisation. Kali’nia, Lokono, Palikur, Teko, Wayampi, Wayana : nous sommes tous unanimes à saluer l’action que ces communautés mènent pour conserver, développer et transmettre aux générations futures leurs terroirs et leurs savoirs ancestraux, qui constituent leur identité et, plus encore, l’histoire de notre humanité – notre histoire.

Ce n’est donc pas seulement la nature en soit que nous devons protéger : cela ne suffit pas. Il nous faut protéger la possibilité pour toutes les différences d’exister, là où du nouveau peut apparaître, nous surprendre, nous inspirer et nous permettre de nous améliorer.

Il s’agit d’une écologie culturelle, que nous devons considérer comme une garantie pour l’avenir et comme un capital pour nos générations futures. Madame la secrétaire d’État, votre conclusion a fait écho à cette préoccupation, et vous allez sans doute la traduire, dans ce projet de loi, en actes.

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