Intervention de Didier Chabert

Réunion du 2 février 2016 à 16h15
Mission d'information sur les moyens de daech

Didier Chabert, sous-directeur Moyen-Orient au ministère des affaires étrangères et du développement international :

Ce sont les militaires qui nous informent de la situation sur le terrain et qui nous permettent d'affirmer que Daech ne lance plus d'offensives en Irak impliquant plus de quelques centaines de combattants. Daech est en train de construire des réduits défensifs très solides ; ainsi, l'organisation a creusé des fossés autour de Mossoul et procède au minage intense de certaines localités qu'il sera difficile de reprendre. Mais un groupe combattant qui ne parvient plus à mener d'offensives de grande ampleur et qui se concentre sur la défense de ses possessions se trouve sur le recul. Cependant, les militaires américains n'envisagent la reconquête de Mossoul que dans plusieurs mois, voire dans quelques années. En effet, si l'on voulait attaquer Daech dans cette ville très rapidement, les pertes humaines civiles seraient très nombreuses. Il n'en reste pas moins que l'on se demandait il y a un an et demi si Bagdad allait tomber, alors que l'on s'interroge aujourd'hui sur la date à laquelle Mossoul pourra être reprise. L'expansion de Daech a été contenue, le groupe recule maintenant, mais il reste fort, notamment pour défendre ses positions, et la reconquête de chaque ville nécessite un investissement militaire énorme pour les forces irakiennes. Après chaque bataille, comme le montre l'exemple de Ramadi, il leur faut des mois pour se reconstituer et se réarmer.

On a réussi à couper les moyens d'action les plus spectaculaires de Daech, qui avaient entouré ce groupe du halo de la victoire à partir de l'été 2014 et lui avaient permis d'attirer de nombreux combattants. Aujourd'hui, cette image peut s'estomper, si bien que Daech investit encore plus massivement les réseaux sociaux pour y diffuser sa propagande. On pourrait s'interroger sur le maintien en service des satellites stationnés au-dessus des régions contrôlées par Daech. En fait, les couper supprimerait également l'accès d'autres pays. En outre, les liaisons Internet et satellitaires permettent à Daech de communiquer à l'extérieur, mais nous ouvrent également une fenêtre d'observation sur la situation dans les zones contrôlées par l'organisation terroriste. J'ai rencontré hier une jeune chercheuse travaillant sur les femmes et le djihadisme, qui peut, grâce à Internet, rester en contact avec de nombreuses femmes vivant dans le territoire administré par Daech. De même, des blogueurs se trouvent à Raqqa où ils sapent de l'intérieur l'action de Daech. Pour cette organisation, Internet représente à la fois une force et une faiblesse. Nous devons minimiser l'écho que Daech tire de l'utilisation d'Internet et maximiser la capacité qu'il nous offre de le connaître. À ce titre, les universitaires continuent de réfléchir à l'espace de Daech, à la manière dont il est construit et à la nature de la contre-propagande que nous devons développer.

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